Le cinéma étant un indicateur de l’état de santé d’une société, la Guerre du Vietnam eut une influence considérable sur les productions outre-Atlantique d’alors (Apocalypse Now, Punishment Park, etc.), et celle du 11 septembre 2001 est aujourd’hui encore palpable. Pour preuve, ce second opus de Star Trek selon J. J. Abrams, dont les attentats et la traque qui s’en suivit font véritablement figure de fil rouge à l’intrigue. Ainsi, comment considérer cette adaptation de la saga au genre port-traumatique ?
Un bâtiment chargé de symboles réduit en cendres, un attentat revendiqué par un ancien agent secret, un prétexte belliqueux et une chasse à l’homme à l’autre bout du monde, telles sont les grandes lignes de Star Trek Into Darkness. Le parallèle avec le 11 septembre 2001 est évident et assumé, et propose une réflexion quelque peu couillue sur ces événements pour un blockbuster – habituellement l’archétype du film qui ne détonne que les pupilles et les cages à miel, jamais le bulbe mort-né qui se cache derrière -, reprenant ça et là divers éléments de la thèse du complot proférée par les prophètes Cotillard et Bigard. Bon, pas de quoi non plus faire trembler les gonades de Dobeuliou, mais c’est quand même plus engagé que les âneries piles au milieu de François Biroute.
Et pourtant, même si Michael Moore avait enfilé le costume de Mr. Spock, ça n’aurait rien changé à l’affaire : qu’est-ce que viennent foutre les attentats du 11 septembre 2001 dans Star Trek ?
Certains argueront que tout média de masse se doit de sensibiliser un public large à des faits de société ; je leur dirai merde et leur répondrai qu’un blockbuster, s’il prend nécessairement corps dans la réalité du spectateur, pour que celui-ci y trouve un tant soit peu d’intérêt, ne doit pas non plus se transformer en docufiction : tant qu’on y est, le Journal de Mickey devrait faire un numéro spécial sur l’usage du Zyklon B dans les chambres à gaz, n’est-ce pas ?
D’autres affirmeront que c’est une manière d’évoquer le traumatisme du 11-septembre, une sorte d’exutoire pour le peuple américain. Oui, d’accord, mais pourquoi ne pas avoir écrit une œuvre indépendante et pleinement destinée à cet effet ? Spielberg a tourné E.T. l’extra-terrestre ET La Liste de Schindler, pas l’histoire d’un alien antinazis, alors pourquoi J. J. Abrams, son premier fan, n’en a-t-il pas fait de même ?
Finalement, quelles que soient les raisons qui menèrent à ce résultat, l’univers de Star Trek semble suffisamment complet pour qu’il n’y ait nul besoin de le rapprocher autant de notre réalité. Gageons que le sieur Abrams préservera le prochain volet de Star Wars des mêmes maux et propose une histoire vraiment originale.