L’excitation se ressentait dans l’air, attroupé devant la salle tout ce petit monde attendait plus ou moins gentiment son tour pour s’assoir devant ce nouveau Star Wars, moi y compris évidemment, je n’ai loupé aucun film de la saga au cinéma, de la ressortie en 1997 de la trilogie originale jusqu’à l’Épisode III en 2005, ce n’était donc pas aujourd’hui que j’allais laisser passer ça, en bon fanboy j’y suis même allé en avance. Ce cher J.J. Abrams, déjà résurrecteur de Star Trek, prend donc la relève de George Lucas pour continuer l’aventure, là où ce dernier nous avait laissé sur Endor à la fin du Retour du Jedi, restait à savoir si la magie allait opérer à nouveau …


Le générique d’introduction fait en tout cas toujours son petit effet pour nous prendre à la gorge et nous coller directement dans le ton épique de cet univers si exceptionnel, la tête dans les étoiles, les pieds sur cette nouvelle planète désertique, Jakku, où Poe Dameron se voit confier la mission de rapporter le plan qui permettra à la résistance de retrouver Luke Skywalker disparu depuis plusieurs années. Capturé par le Nouvel Ordre les données se retrouvent donc dans son droïde BB-8, qui lui est parvenu à s’échapper de l’attaque, il croise le chemin de Rey une jeune pilleuse qui revend de vieilles pièces de vaisseaux pour se nourrir. Kylo Ren, souverain du pouvoir du côté obscur, ayant pour tâche de détruire le célèbre chevalier Jedi, se retrouve rapidement informé de cette fuite et lance une offensive pour capturer le précieux sésame avant l’Alliance, le début d’une course poursuite à travers la galaxie.


Les premières séquences ne manquent pas d’enthousiasme et rassurent illico presto notre dubitation quant à la réappropriation de la saga par un nouveau réalisateur et son cahier Disney, c’est certain qu’on aurait du mal à s’ennuyer devant cette intrigue et ces efforts pour nous enjailler d’entrée, le film nous prend dans ses bras, il suffit simplement de se laisser porter par ses plans joliment rendus et ses bruits de pisto-lasers, on est un peu chez nous en même temps. L’introduction des nouveaux personnages est plutôt intéressante, surtout Rey, campé par à mon sens la grande révélation du film Daisy Ridley, il n’est aucunement difficile de s’y attacher, idem pour BB-8 qui s’inscrit dans la pure tradition des droïdes attendrissants doués de sentiments, il se permet même de voler la vedette à C3PO et R2D2, très réussi. Oscar Isaac et John Boyega ne sont nullement en reste, autant le premier commence à confirmer à Hollywood et profite de cet opus pour légitimer sa réputation que le second, novice, montre certaines qualités, le seul défaut que je pourrais imputer à leurs rôles c’est qu’ils s’accrochent un peu trop à l’humour, et parfois c’est assez dérangeant. L’entreprise de feel-good et cet esprit de pérennité est d’ailleurs renforcée par le retour de Han Solo où Harrison Ford, 73 piges et quelques cheveux blancs, retrouve avec panache son personnage phare, sa présence soulage les inquiétudes.


Le côté obscur est par contre plus discutable, on a droit à un ersatz de Dark Vador et un nouvel empereur avec une trombine digne du chef des orcs dans Le Hobbit, je n’ai pas été hyper convaincu à ce niveau là malheureusement, on a du mal à véritablement trouver une hiérarchie où un général roux cabotin donne des ordres à un seigneur noir, le nouvel ordre vous me direz. Et puis il semble impossible de ne pas penser à l’Étoile Noire en découvrant cette sorte de planète hybride à la puissance de feu dévastatrice, tout comme Jakku avec Tatooine, j’ai eu la curieuse impression de m’immerger dans des lieux déjà vu alors qu’ils ne le sont pas, là dessus je trouve que l’imagination ne brille pas vraiment alors que j’ose penser qu’il y avait sans doute moyen de nous garantir des contrées véritablement inédites, une façon de conforter encore un peu plus le spectateur ? Fort possible. De même pour l’intrigue qui se rapproche sur beaucoup de points à celle de l’Épisode IV, on dirait que le scénario ne prend pas de risques pour s’évader un peu trop loin, je n’irais pas jusqu’à le qualifier de reboot mais on est à de nombreux moments dans du fan service à outrance, à côté de ça les tentatives à créer des liens familiaux semblent parfois gratuits pour susciter la surprise, enfin ça passe, on valide tout de même, tant bien que mal.


J.J. Abrams ne nous avait pas menti pour ce qui est de rendre une copie fidèle à l’approche de la première trilogie, les effets visuels sont ici au service du film et non l’inverse, là où la prélogie fautait, l’esthétisme est beaucoup moins kitsch et ça fait plaisir, les combats terrestres et spatiaux ne sont pas si nombreux mais réussis, j’ai beaucoup aimé le duo Rey-Finn dans le Faucon Millenium, séquence très haletante qui permet aux personnages de trouver une complicité. La virtuosité est au rendez-vous sans forcément nous en mettre plein les yeux comme au Futuroscope, Abrams a compris qu’il faisait un film et non une attraction de fête foraine, grâce lui en soit rendue dans cette époque de vulgarisation "CGI-esque", c’est le point fort du film, ne pas trop en faire, juste ce qu’il faut. Et qui dit Star Wars dit combat au sabre laser, autant pour Kylo Ren que pour Rey et Finn ça reste assez déroutant, dans le sens où ça n’a pas vraiment de sens, en tant que Sith et légitimement initié à l’art de l’arme noble, Kylo semble galérer pour venir à bout des coups de deux débutants, le genre de chose qui ne serait jamais arrivé auparavant, on se rappelle de l’entrainement intensif de Luke, c’est le genre de duel qui doit se régler en deux temps trois mouvements, étrange, même si il est de bon ton que les gentils survivent envers et contre tous.


La passerelle entre la vieille école symbolisée par le duo Han Solo-Leia Organa vis à vis de la nouvelle avec Rey et Finn demeure tout de même fragile, la relève semble s’établir mais par le biais d’éléments passablement poussifs, on nous force à ressentir des émotions envers ce couple oldie mais après tant d’années passées et trop de rides marquées la relation a du mal à refonctionner, c’est le "syndrome Bronzés 3", Carrie Fisher m’a limite fait de la peine en petite jeune mamie botoxée, sans compter qu’à vrai dire elle ne sert pas à grand chose, elle vient faire coucou. Surtout que l’issue tragique ne parvient même pas à bouleverser, c’est là qu’on se rend compte qu’à ce niveau là c’est raté, et c’est bien dommage, il ne vaut mieux pas dans cette situation se remémorer les grandes heures de L’Empire contre attaque car le fossé est assez immense, pas de miracle. Quant à l’utilisation de la Force c’est aussi sujet au débat, ça semble tellement facile pour Rey, elle expérimente ses pouvoirs sans en connaitre le traitre principe (vu qu’elle ne la connait qu’au statut de légende), à ce moment là pourquoi Leia ne s’en ai jamais servie (sauf la réceptivité mentale dans l’Episode V si je me souviens bien, ou l’instinct dans le VI) ? Je cherche encore la cohérence.


Pour ce qui est de la partition musicale, mise à part les thèmes connus, je n’ai pas trouvé de symphonies mémorables (même La Menace Fantôme en avait) ça n’est pas forcément préjudiciable mais disons que ça aurait pu aider à appuyer des moments qui le méritaient amplement, comme le climax du film, qui là aussi manque d’émotion, ça reste cependant surprenant (bien qu'ayant été honteusement spoilé avant de me couper du monde de l'internet). Mais le niveau global de pur divertissement est là, et même si les enjeux paraissent par moments un poil trop sur-scénarisées on prend du plaisir, et au final c’est tout ce qu’on demande lorsqu’on va voir du Star Wars, on veut de l’action, du frisson, de l’aventure, et on est servit dans un degré efficace et modeste, rien que pour ça je dis bravo à J.J. Abrams car le contrat était tellement difficile à remplir, tellement casse-gueule, il suffit de voir comment Trevorrow a chié sans complexe sur Jurassic Park avec son Jurassic World, non, le créateur de Lost a bien réussi son pari tant bien que mal. Surtout que son opus se conclu admirablement avec une vraie attente qui promet beaucoup quant à la suite de cette nouvelle trilogie, même si je le rappelle quelques points restent assez inquiétants, et j’ai bien peur que Rian "Looper" Johnson ne bousille tout ce chemin parcouru.


En conclusion ce Star Wars : The Force Awakens reste un divertissement de bonne facture, évidemment les défauts sont inexorablement là compte tenu de l’attente et de la passion que suscite la saga délaissée par George Lucas, mais il serait presque irresponsable de totalement bouder son plaisir, notamment en ces temps de vaches maigres des blockbusters populaires comme Hunger Games, ça fait du bien. Reste désormais à prendre à nouveau son mal en patience pour retrouver Rey et Finn dans leurs nouvelles aventures en 2017, la franchise se cale sur des rails prometteurs, à Disney de ne pas affoler futilement la locomotive des rêves.

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le 16 déc. 2015

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JimBo Lebowski

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