Le diable a troqué ses cornes pour des oreilles de souris, Disney ayant cédé au vice en rachetant Star Wars pour prolonger l'aventure au cinéma, sans oublier les produits dérivés qui viendront avec, la « machine à fric » comme diront les détracteurs dénonçant vulgairement l'évidence. Pour reprendre le flambeau, Disney a choisi avec prudence J.J. Abrams, l'un des fils spirituels du cinéma de masse made in Spielberg. Sans compter que le cinéaste a su relancer la saga Star Trek avec un certain panache en 2009, de quoi se rassurer fébrilement. Après deux années d'attentes interminables depuis son annonce et gonflé par une hype qui n'a d'égale que sa campagne marketing, voici qu'enfin, tel un cadeau de Noël, Star Wars le réveil de la Force sort sur nos écrans. Les poings serrés, peut-être même habillés d'un costume pour les plus dévoués, les fans et même les autres se sont donnés rendez vous, l'heure est venue. Comme une messe mondiale, le rassemblement Star Wars, véritable force culturelle geek est enfin de retour. La force sera-t-elle vraiment au rendez-vous ?


Un peu.


Pas besoin de préciser à quel point l'enjeu était de taille et quelle pression pesait sur l'équipe en charge de redonner vie au mythe. Star Wars c'est presque, sans exagérer, une religion auquel J.J. Abrams accompagné de Lawrence Kasdan (scénarsite de l'épisode 5) au scénario ont la lourde tâche d'écrire ou du moins réécrire l'histoire.


Inutile de le nier, Star Wars 7 est clairement un hommage ou une repompe, c'est selon, d'Un Nouvel Espoir de George Lucas, la comparaison est inévitable, voulue peut-être mais parfois trop grosse pour ne pas la subir. Que ce soit les évènements ou les lieux rencontrés, il y a un air de déjà vu, tout se déroule quasiment comme dans le film de George Lucas. L'outil du mal étant d'ailleurs une nouvelle fois, une étoile noire, qui se détruit de la même façon que les précédentes... Pas très original, Star Wars 7 manque de surprises et ne prend pas de risque. Par paresse ou surtout par peur, JJ Abrams joue la carte de la sécurité, ce qui lui permet néanmoins d'organiser des retrouvailles conviviales respectueuses de la trilogie originelle.


J.J. Abrams est un fan et ça se sent. S'il ne développe, n'essaie pas d'étendre l'univers contrairement à la prélogie (l'une de ses rares qualités), il se l'approprie aisément en succombant inévitablement au fan-service. Evidemment, c'est le débat du moment, trop de fan-service tue le fan-service. Personnellement, je suis peut-être encore trop enfant attardé pour cracher systématiquement dessus, surtout que J.J. Abrams le fait plutôt bien.


Star Wars 7 est évidemment, au vu du budget, une réussite visuelle. La mise en scène de J.J. Abrams classique mais efficace, use de travellings en tous genres avec succès et bénéficie d'un montage ultra-dynamique pour ponctuer l'action, elle reste propre mais quelques fois trop hâchée. On retiendra surtout quelques séquences de courses poursuites prenantes ainsi qu'un duel de sabre au laser assez mémorable. Notons l'effort du cinéaste à moins faire recours au lensflare, ce qu'il compense par des mouvements de caméras stylisés, bien que too much.


Le soin apporté aux décors, armes et costumes est remarquable. De même pour les vaisseaux, tellement bien faits qu'on en oublierait que c'est du CGI, le Faucon Millenium n'a jamais été aussi beau. Sans compter les divers extraterrestres rencontrés pendant le périple dont le réalisateur a eu le bon goût d'user de l'animatronique pour donner vie à cet univers si particulier. Aussi, on a rarement vu des plans aussi somptueux dans la saga comme ce vaisseau échoué dans le désert qui évoque à lui seul un sombre passé. La photographie est très propre, souvent recherchée et offre quelques images mémorables. Jamais l'univers de Star Wars n'a été aussi flambant neuf.


Plus proche de la première trilogie, Star Wars 7 joue à fond la carte de l'humour qui, avouons-le, aura raison de nous une fois sur deux... Les blagues fusent énormément et s'avèrent trop nombreuses pour marcher à chaque fois, ce qui peut nous sortir du film à certaines séquences. Même si l'overdose n'est pas loin, on rit souvent de bon cœur, cette bonne humeur redonne même un peu de la légèreté et de l'esprit d'aventure qui habitaient la trilogie originelle. On ne se prend plus au sérieux comme dans la prélogie et c'est fort appréciable. Plus de blabla politique à deux balles malgré un manichéisme toujours aussi présent voire presque parodique comme lors d'un certain salut nazi...


Parmi tous ces clins d'oeil, et il y en a beaucoup (...), des visages du passé refont surface pour notre plus grand plaisir comme C3PO, Leïa ou Han Solo et Chewie qui arrivent de façon assez inattendue pour certains. Au delà de l'aspect nostalgique, tout cela n'arrive pas vainement : il faut se retrouver pour se dire adieu. C'est pour cela que tous ces cadeaux faits aux fans ne m'ont pas tant gêné. Le réveil de la force essaie de faire tourner une page.


Tel un début de série télé, Star Wars 7 n'est là que pour assurer la succession, mettre en place une trame et introduire les nouveaux héros et méchants qui composeront cette nouvelle trilogie : des personnages et une histoire qui font écho, tel un miroir, à la saga originelle. Complexe d'oedipe toujours présent, les descendances tumultueuses sont de retour et les nouveaux personnages se présentent, se rejoignent ou en remplacent d'anciens avec une simplicité plaisante mais qui va un peu trop vite en besogne.
Malgré ses 2h15, le film s'enchaîne à toute allure, ce qui en fait un blockbuster très agréable à regarder, bien rythmé mais qui ne prend pas le temps d'approfondir ses personnages et son background quand il le faudrait. C'est peut-être ce qui dérangera la plupart des fans : après le traditionnel générique d'introduction, Star Wars 7 arrive comme un cheveu sur la langue et posent des questions sans donner de réponses, ce qui agacera la plupart. On pourrait dire qu'on n'a rien vu, ce n'est pas faux mais on ne peut pas vraiment lui reprocher non plus, c'est le début d'une nouvelle trilogie, il faut en garder sous la pédale.


Pour reprendre le flambeau, les nouveaux héros sont la jolie Rey (Daisy Ridley <3) et Finn (John Boyega), accompagné d'une nouvelle mascotte BB8 - véritable réussite qui fera autant le bonheur des spectateurs que celui du père Noel. Le duo d'acteurs est vraiment bien trouvé, ils sont impliqués, même trop par moments, on peut ressentir les faiblesses de leurs débuts de carrière mais paradoxalement cela apporte une véritable fraîcheur et une sincérité touchante. Si Rey n'est qu'une Luke Skywalker (ou Sangoten) au féminin et charmante qui plus est, Finn est un personnage assez original qui permet d'humaniser les stormtroopers, de voir qu'il y a un humain sous le masque. La prise de conscience du personnage se fait aussi nôtre lors de l'introduction qui, bien qu'un peu grotesque, a le mérite de nous immiscer directement dans le propos et de montrer véritablement de quelles atrocités est capable l'empire (la scène de destruction des planètes aussi). On voit le mal en action ainsi que son nouveau visage et futur grand méchant : Kylo Ren, interpreté par Adam Driver.


Dans l'ombre de Vador, c'est peut être le personnage le plus intéressant ou du moins au plus grand potentiel. Aux prémices de son passage vers le côté obscure, Kylo Ren, tel un adolescent en pleine crise, apparaît instable voire carrément bipolaire et c'est bien la première fois qu'on voit un Sith se forcer à rester du côté obscur... Bien qu'il enlève son masque trop tôt et que le tourner en dérision n'était parfois pas la meilleure décision, le personnage est en plein devenir, voué à évoluer et il est fort à parier que son passage métaphorique au stade d'adulte déterminera l'avenir de la saga.


Autour des personnages principaux s'ajoutent plein de seconds rôles interprétés par des acteurs de qualité (Oscaar Isaac toujours aussi charismatique, Lupita Nyon'go, Max Von Sydow) mais qui n'ont, pour certains, pas encore dévoilé leur richesse et font surtout office de figuration, on en saura plus dans le prochain épisode...


A noter un John Williams en petit forme qui se contente du minimum, un peu dommage mais supérieur à la norme quand même.


Timide et maladroit, voulant bien faire en respectant le cahier des charges, ce nouveau Star Wars n'ose rien développer à fond et frustre autant qu'il peut réjouir. Pas loin de singer Un Nouvel Espoir, J.J. Abrams ne prend pas trop de risques. En passant la vitesse de la lumière, il pose les bases d'une nouvelle trilogie dont le premier épisode souffre déjà d'un syndrome récurrent aux blockbusters issus d'une saga récente : ne pas se suffire à soi-même. N'attendez rien d'autre que des retrouvailles au scénario un peu paresseux mais plein de passion pour ses ancêtres. La nostalgie va marcher pour beaucoup, replonger dans cet univers avec les moyens d'aujourd'hui, ça fait son effet. Si le fan passera par toutes les émotions, il restera sûrement sur sa faim, comme lors d'un pilote de série télé. D'ailleurs le film s'adresse autant aux néophytes qu'aux fans. On va certainement beaucoup lui cracher dessus mais, malgré ses - gros - défauts, le film bénéficie tout de même de scènes marquantes, de bonnes idées et le nouveau casting est attachant. On y croit et les déçus comme les satisfaits attendent déjà le deuxième épisode, histoire d'aller dans une galaxie un peu plus lointaine. Ce nouvel épisode alimente déjà les débats, comme quoi quelque chose s'est réveillé...


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-veloutou
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le 19 déc. 2015

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-veloutou-

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