Le film parle du progrès. Du progrès à l'échelle d'une vie, mais aussi de plusieurs. Et ce qui nourrit le progrès, au delà des réussites, ce sont les échecs.
Tout comme un Jedi en devenir, la première génération ne doit pas renier ses erreurs, elle doit les accepter pour apprendre d'elle. C'est comme cela que, de génération en génération, on peut progresser.
Pour la première génération, celle de Luke, le problème se pose de la façon suivante: la force n'est pas commensurable pour les êtres; comment dès lors ces derniers peuvent s'empêcher de valoriser à outrance les seuls pour qui elle l'est un tant soit peu, à savoir les Jedi ? Ces derniers sont effectivement les dépositaires d'un savoir qui n'appartient qu'à eux, et qui se faisant se transforme en pouvoir.
C'est l'erreur de l'Ordre: s'accaparer un savoir, empêcher la démocratisation de l'utilisation de la Force. C'est l'erreur des Jedi, de la génération de Luke; erreur de laquelle la génération suivante doit apprendre pour progresser.
Cette idée de progrès se retrouve dans l'un des aspects phares de cet épisode: l'utilisation de la Force. Je n'ai jamais eu autant l'impression, dans Les Derniers Jedi, qu'après tant d'épisodes, on avait enfin repoussé les limites de ce qu'on était capable de faire avec cette énergie mystique. Que ce soit la mise en connexion d'individus ou la projection astrale, l'épisode VIII gâte et a parfaitement compris ce qu'était la Force. La Force c'est la réalisation de l'impossible, c'est la transcendance (par exemple, après que Rey et Ben ait été connecté, ce dernier a été éclaboussé par les vagues d'Ach-too alors qu'il ne s'y trouvait pas). Et un bon Star Wars (ça existe, je pense) se caractérise par le fait qu'il donne en spectacle cette réalisation de ce qui semblait pourtant impossible: Yoda ne peut pas soulever le X-Wing de Luke, et pourtant il le fait; Ben ne peut pas avoir été mouillé par les vagues d'Ach-too alors qu'il n'y était pas, et pourtant si. Pour bien réussir cet effet, il faut que le film insiste sur la réalisation en tant qu'elle est exceptionnelle; chose que la Prélogie ne fait par exemple pas en nous montrant des vieux Jedi faire des pirouettes et des sauts périlleux de façon nonchalante.
Star Wars, c'est avant tout de l'émerveillement.
A la question que pose le film sur la façon dont on doit recevoir les actes des anciens, il répond de façon assez nuancé. Ces derniers ont pu faire des erreurs, mais il ne s'agit pas non plus de "tuer le passé": ce que nous dit Les Derniers Jedi, c'est que tout est bon à prendre chez les anciens, y compris les échecs, mais avec un degré de recul différent. On doit prendre les réussites tels quels, et apprendre des échecs (un apprenti qui ne fait que réussir n'apprend donc rien) et, donc, émettre une distance avec eux.
L'épisode IX racontera donc par quelle moyen la nouvelle génération a progressé et, comme le laisse entendre la fin des Derniers Jedi, a démocratisé la Force et le savoir qui l'entoure.