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Quel défi pour Rian Johnson, le réalisateur de l'excellent Looper, de reprendre l'intrigue de cette nouvelle trilogie Star Wars là où le critiquable Épisode VII la laissait. Et malgré tous les bâtons de J.J.Abrams dans la roue scénaristique de notre space-opera préféré, ça roule plutôt bien !



SUR LE FOND : 9 étoiles



Certains vont pouvoir épingler le manque d'originalité dans l'intrigue de ce huitième opus, et je ne peux leur donner entièrement tort. De la même manière que SW7 était une parodie nostalgique de l’Épisode IV, l'intrigue de ce nouvel opus peut sembler similaire à celle de l'Empire contre-attaque sur certains aspects.


Un maître refuse d'entraîner le héros principal pendant que les rebelles se font claquer par les méchants.


Mais cela serait un raccourci énorme de résumer Les Derniers Jedi de la sorte. Parce que contrairement à Abrams, Johnson est un réal qui réfléchit et qui souhaite faire passer des messages, montrer des choses par son travail. Ainsi, sur le fond comme sur la forme, certains éléments de facilité ont été esquivés. Éléments de facilité quasi inévitables pourtant, tant Abrams s'était forcé à n'apporter aucune réponse aux questions posées dans l’Épisode 7 Qui est Snog ? Que s'est-il passé entre Luke et Kylo ? D'où vient Rey ?


Qu’en est-il alors de ces (trop) nombreuses portes ouvertes durant l’opus précédent ? Eh bien, une bonne partie seront aussitôt refermées dans Les Derniers Jedi.


Plus la peine d’imaginer que Snog est en réalité Dark Plagueis, il est mort. En espérant toutefois un retournement de situation dans le prochain épisode car on manque cruellement de méchant emblématique là.


La bascule de Kylo (Adam Driver) dans le côté obscur est expliquée. L’origine des parents de Rey (Daisy Ridley) est dévoilée, même si cela sent le gros enfumage de Kylo. Bref, on ne voit pas très bien ce que va pouvoir donner l’opus final de cette postlogie. Mais n’oublions pas qu’il s’agit là de films et non d’une série TV, et même si nous savons que cet épisode s’inscrit dans une trilogie, il doit avant tout être cohérent et visionnable seul.


Donc même si Johnson renvoi la patate chaude de l’espace à Abrams, il signe tout de même un film intéressant à voir. On peut toutefois regretter que deux des trois intrigues de ce film ne servent strictement à rien


Rose et Finn se baladent sur une planète et un vaisseau pour désactiver le tracker du Premier Ordre, sans succès. Et l’apprentissage Jedi de Rey se résume à une mini-session de sophrologie sur une pierre...


En réalité, sans spoiler, le film aurait pu se nommer Star Wars 8 : La fuite des rebelles. Côté personnages, il y a du bon et du mauvais. Et souvent le bon est développé durant tout le film jusqu’à la bascule, où cela devient mauvais.


Exemple avec Snog (Andy Serkis) montré ultra-puissant, utilisant la force de manière incroyable, affirmant même savoir ce que pense et va faire Kylo jusqu’au moment où il est coupé en deux par ce même Kylo… Je ne critique pas le fait de tuer Snog, je ne l’avais pas vu venir et j’ai été vraiment pris par la scène mais cela coupe (littéralement) le développement du personnage. Et les scènes suivantes montrent la tête de Snog tirant la langue ou ses jambes tombant de son trône et vont à l’encontre du côté badass traité durant toute la première heure et demie de film.


Sinon, Finn (John Boyega) est rétrogradé au rôle de sidekick humoristique, Rey manie beaucoup moins bien le sabre que dans SW7 et le développement de Kylo est intéressant. Celui de Luke (Mark Hamill) aussi mais encore une fois, tout est gâché un mauvais dénouement.


Faire mourir Luke, c’est osé mais faire mourir Luke de cette façon, c’est nul ! C’est quand même Luke bordel, il a détruit l’Étoile de la Mort, il a suivi les entrainements de Kenobi et de Yoda, il a « tué » Vador. Et il meurt en fondu, de dos, seul sur son île, fatigué après avoir esquivé trois attaques de Kylo par hologramme ? Non, ce personnage emblématique de la saga méritait mieux.


Concernant Leia (Carrie Fisher), comment ne pas parler de cette scène ridicule où elle utilise la Force pour voler dans l’espace dans le plus grand des calmes ? Après le décès de Carrie Fisher, cette scène aurait pu être une belle façon de tuer ce personnage et rendre hommage à l’actrice. Quel est le but de cette scène ? Montrer que Leia peut utiliser la Force et l’envoyer à l’infirmerie pour qu’Amilyn Holdo (Laura Dern) reprenne le commandement ? Cela était faisable sans avoir ce plan ridicule et assez gênant.


Des reproches, on peut en faire, c’est certain. Mais tout n’est pas à jeter et Les Derniers Jedi restera très certainement le meilleur épisode de cette postlogie.



SUR LA FORME : 8,5 étoiles



Je serai plus bref sur la forme car, même si le film est beau et bien réalisé, rien ne m’a pour autant stupéfait. Rian Johnson est un réalisateur que j’apprécie, qui s’investit dans chacun de ses projets. Ce n’est pas un Yesman qui montre à l’écran ce que d’autres lui demandent de montrer. Il a besoin de s’investir en profondeur, d’écrire lui-même les scripts pour « donner sa pâte ». C’est donc naturellement avec la double casquette de scénariste/réalisateur que Johnson a travaillé sur Les Derniers Jedi.


Et à certain moment, on se demande s’il n’a pas cherché à critiquer le travail d’Abrams sur l’épisode précédent dans la manière où Snog dit ouvertement à Kylo à quel point il est ridicule avec son masque, ou par Luke jetant son sabre par-dessus son épaule comme troll ultime au traveling circulaire dégueulasse à la fin de SW7.



Lost Ben Solo you did. Lose Rey we must not.



Même si la dimension politique de l’intrigue n’est pas autant développée que dans la prélogie, Rian Johnson tente tout de même de distiller quelques propos politiques ou sociétales (le cynisme des marchands d’armes et plus largement de la guerre, et même la critique de la consommation de produits issus d’autres espèces). Le sujet du temps qui passe, présent dans Looper mais également dans les trois épisodes de Breaking Bad qu’il a réalisé, l’est également au sein des Derniers Jedi avec la thèse de Kylo.


Les structures en place (l’Ordre des Jedi, la Résistance, le Premier Ordre) ont assez vécu et il est souhaitable de tout détruire pour tout reconstruire.


Visuellement, il y a de très beaux passages, notamment le climax sur la planète Crait ou l’explosion du Destroyer par le bond en hyper-espace du vaisseau de la Résistance. D’ailleurs, la gestion du silence est parfaite sur cette scène, ce qui la rend encore plus prenante.


Bref, un très bon film qui, malgré sa durée record (2h32), ne laisse pas le spectateur s’ennuyer. Au vu de l’histoire, on n’aurait même pu imaginer une petite demi-heure de plus pour achever totalement cette postlogie. Mais c’est J.J.Abrams qui se chargera de trouver des éléments d’intrigue pour l’opus final. Bonne chance à lui !


Bonus acteur : NON


Malus acteur : NON



NOTE TOTALE : 9 étoiles


Créée

le 15 mai 2018

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Spockyface

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