Avec son casting 5 étoiles et la hype autour de son réalisateur, Black Mass sentait le film à Oscar survendu par une presse dithyrambique. Alors disons le d'emblée : Oui, le film n'a absolument rien d'une chef d'oeuvre et se révèle mineur comparé aux chefs d'oeuvres du genre. Néanmoins,il a au moins le mérite de s'en démarquer (un peu) de par son traitement.
En effet, Cooper a l'intelligence de ne jamais singer la mise en scène et les grandes figures de gangster scorcesienne : ici pas de montage énergique ni de travelling au ralenti sur fond de Rolling Stones. La mise en scène est sobre et contribue à installer une atmosphère pesante. Exit aussi la voix off cool et les anti-héros flamboyants. La narration s'appuie sur les témoignages des membres déchus du gang de Whitey Bulger et la plupart des protagonistes brillent par leur médiocrité (voir comment le personnage de John Connoly démolit le cliché de l'agent du FBI vertueux) et se révèlent au mieux cyniques au pire pourris jusqu'à la moelle.
Au sommet de la pyramide, on retrouve Bulger qui est érigé en figure du mal ultime et dont la caractérisation le rapproche davantage de la créature fantastique que du gangster comme en témoigne son apparence physique monstrueuse. Ainsi, Cooper filme Johnny Depp (qui n'a pas été aussi bon depuis des lustres) comme un véritable vampire qui distille une sensation de malaise à chaque fois qu'il rentre dans le cadre.
Ce personnage fascinant bouffe littéralement l'écran et les personnages secondaires qui peinent à exister, notamment les femmes inintéressantes au possible. L'ombre de Bulger plane tout au long d'un récit par ailleurs extrêmement classique conçu sur le modèle du "rise & fall" et dont les intrigues secondaires (la relation entre Bulger et son frangin politicien, les mafieux italiens) sont malheureusement expédiées.
Black Mass est donc loin d'être déplaisant mais s'avère trop timide dans son approche du genre pour marquer durablement le spectateur. Dans un registre similaire, les infiltrés et The Town sont plus intéressants que la péloche du Cooper qui vaut surtout pour la performance de son interprète principal.