On a suffisamment glosé sur l'hommage aux blockbusters 80's de Spielberg que constituait ce ravissant "Super 8" pour revenir sur les évidences que soulignent le visionnage du film : voici des enfants confrontés à la fois à l'absence du père et à des phénomènes mystérieux, un certain sens du merveilleux (lumières bleues et grands yeux éblouis), une défiance profonde envers les symboles de l'autorité, tout cela supporté par une narration construite de manière classique et une grande lisibilité des scènes d'action, respectant le spectateur... Ce qui fait pas mal de choses que le cinéma de divertissement hollywoodien actuel a oublié, et que J.J. Abrams nous offre ici, pour notre plus grand plaisir.


Les deux premiers tiers de "Super 8" sont tous simplement parfaits, voire même magiques par instants : Abrams, s'appuyant sur un casting impeccable - au milieu duquel resplendit le diamant brut qu'était alors la toute jeune Elle Fanning -, jette un regard fort sur la fin de l'enfance, dans une ambiance en effet très "spielbergienne" (mais en mieux, car moins aimable, plus lucide quant à la violence du monde ?). La scène de catastrophe ferroviaire, même si elle n'atteint pas la véracité de son ancêtre pré-digitale du "Fugitif", est un véritable moment d'anthologie : l'un des indéniables talents de J. J. Abrams est bien sa capacité à créer un spectacle à la fois intellectuellement structuré et esthétiquement cohérent à partir de scènes de chaos, comme il le prouve à nouveau lorsqu'il décrit la dévastation de la petite ville ouvrière livrée aux forces militaires incontrôlables.


Il est seulement dommage que le scénario de la dernière partie de "Super 8" soit moins parfaitement abouti que ceux du modèle Spielberg, et que le final soit aussi franchement inintéressant : même si la "nostalgie du retour" et la possibilité d'une empathie inter-espèces (mais également entre les êtres humains jusque là déchirés par leurs querelles et leurs rancœurs) sont deux points pertinents, la confrontation avec les "monstre" n'est pas très convaincante, pas plus d'ailleurs que l'explication de la construction du vaisseau spatial, sans logique ni cohérence.


Ces défauts restent cependant mineurs par rapport à la franche réussite de la plus grande partie du film, qui nous restera longtemps en mémoire.


[Critique écrite en 2011 et complétée en 2021 après un troisième visionnage du film]

EricDebarnot
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le 14 oct. 2014

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Eric BBYoda

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