Coup de maître.

C'est le premier film d'Argento que j'ai vu. S'il se présente formellement comme un essai de pur esthétisme, "Suspiria" va beaucoup plus loin. La réussite dans le traitement de la couleur et de la musique permet justement de gros moments de peur intense, et ce du début à la fin : percussions, stridence de cordes, chœur mystique, basses ondoyantes pour un ensemble sonore complètement inédit mais très efficace, et en harmonie avec l'image. Du côté des décors, c'est totalement inédit, les murs dotés de différentes couleurs intensément criardes, assez rarement utilisées en décoration d'intérieur offrant des contrastes purement phénoménaux, et contribuant à l'aspect mystérieux de l'endroit. L'ambiance axiogène est continue sur toute la durée du film, et est entretenue lors des moments de pause par les personnages mystérieux peuplant l'école de danse, que ça soit les professeurs sorcières ou les servants suppôts du mal, réservant un sort particulièrement atroce à leur proies innocentes. C'est un Dario Argento vraiment possédé qui met en scène les meurtres atroces dont sont victimes les quelques membres de l'école, poussant à l'extrême les aspects esthétiques précédemment cités pour célébrer ces rituels barbares préparés avec un soin diabolique, tous orchestrés de la même manière, tel un protocoole sacré : suspense intense, apparitions soudaines et terrifiantes, contemplation horrifiante des mises à mort sanglantes d'une rare violence. Un essai, peut-être, mais un chef-d'oeuvre en tout cas, une réussite fantastico-horrifique jamais égalée, peut-être même inégalable.