Ted
5.6
Ted

Film de Seth MacFarlane (2012)

Seth MacFarlane reprend l'épicerie Apatow et nous sert du rire au kilo.

La comédie américaine a connu plusieurs ères, celle de Mel Brooks, des frères Zucker, des frères Farrelly, voici le moment Judd Apatow. Depuis une petite décennie Apatow et toute sa clique – Adam Sandler, Will Ferrell, Paul Rudd, Seth Rogen, Jonah Hill – s’imposent comme le nouveau référentiel. Leurs caractéristiques ? Un humour irrévérencieux, potache et régressif, plus intelligent qu’il n’y parait ; des acteurs et des actrices venant de Saturday Night Live ou du stand up (voir le bel hommage rendu à cet exercice dans Funny People) conférant un rythme enlevé et des dialogues claquants.

Que ce soit en tant que réalisateur, scénariste ou plus souvent producteur, nous devons à Apatow les meilleures comédies des dernières années : Anchorman: The Legend of Ron Burgundy, The 40-Year-Old Virgin, Knocked Up, You Don’t Mess with the Zohan (à voir absolument !), Funny People, Mes meilleures amies. Il nous aura fallu attendre un grand nom du petit écran pour prendre le sillon creusé par Apatow. Seth MacFarlane est le créateur des excellents Family Guy et American Dad. Il a réussi l’exploit d’imposer ses familles timbrées aux côtés des Simpsons et South Park. Son défi du moment, son premier long métrage, Ted.

Le film est hilarant. Critiquer une comédie est une chose difficile tant la sanction est objective : a-t-on ri ? Oui et beaucoup. Ted est plein de rythme, on se bidonne et on ne s’ennuie jamais. Mark Wahlberg tient les traits d’un adulte légèrement attardé qui a pour meilleur ami sa peluche d’enfance à qui il a donné vie en faisant un vœu. A priori, le pitch peut sonner toutes les alarmes anti-nanar mais le film est une réussite. La voie grave et grossière que Seth MacFarlane prête à l’ourson est en tel décalage avec l’image du Teddy Bear que le déferlement d’insanités n’est jamais indigeste.

Signe d’une Amérique lassée du diktat de l’American Way of Life, notre protagoniste rejette les responsabilités et a pour seule ambition d’être bien avec sa femme et son pote. Ces personnages tournent le dos à la bienséance et à ce modèle de vie de l’épanouissement par la réussite professionnelle et l’avoir.

L’intrigue du film tourne principalement autour de la question du passage à l’âge adulte. Est-ce un impondérable ? Dois-je abandonner tout ce qui fait de moi un enfant pour devenir un adulte ? Seth MacFarlane offre la possibilité du non-choix au sein d’une vision très humaniste. Alors que le réalisateur réussit à déjouer tous les pièges scénaristiques, il se plie malheureusement à l’exercice durant le dernier quart d’heure. Une mince intrigue légèrement artificielle rend les éclats de rires moins fréquents.

Enfin, nous avons voulu profiter de cet article pour mettre en lumière la trajectoire de Mark Wahlberg, probablement la plus intéressante d’Hollywood. Son adolescence n’est pas des plus paisibles, cocaïnomane à 13 ans, il est condamné à 2 ans en maison de correction pour de multiples agressions racistes. Changé à jamais par cette expérience, il tourne le dos à son gang et se tourne vers la religion. Aidé par son frère, il se lance alors dans la musique et remporte un certain succès avec Marky Mark and the Funky Bunch (tout un titre). Il devient ensuite mannequin et pose notamment pour les sous-vêtements Calvin Klein (du chemin a été parcouru depuis les gangs de Boston). C’est autour de ses 25 ans qu’il entame enfin une carrière cinématographique. Si les prestations de Wahlberg ne sont pas toujours convaincantes (mis à part The Fighter et Les Infiltrés) l’homme passionne par son activité de producteur et son auto-dérision.

Dans l’ombre, Wahlberg produit des séries géniales. Il faut commencer par Entourage qui est largement inspirée de son histoire; In treatment, série très réussie sur la psychanalyse et enfin Broadwalk Empire qu’il est inutile de présenter. Ces trois séries aux thèmes et aux tons très éloignés sont d’immenses succès amplement mérités. Autre attrait de l’acteur, son autodérision. Mark Wahlberg fait un prendre un virage à sa carrière caricaturale de jeune premier en tournant dans The Other Guys et en apparaissant dans Saturday Night Live (parodiant ses accès de colères et son sex-appeal). Mark Wahlberg est une chose complexe, bien loin des personnalités homogènes produites par Hollywood. Il présente l’un des parcours les plus singuliers du cinéma américain, côté lumière des films de qualité ou de grosses comédies, côté off un producteur au nez creux.

Ted est une bonne illustration d’un acteur plongeant son image dans la dérision, une raison suffisante pour aller voir le film.

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Auteur : Maxime
LeBlogDuCinéma
7
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le 8 août 2012

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