The Circle tourne en eau de boudin

Bon.
Une fois le film achevé, j'avais l'impression d'avoir vu un mauvais épisode de Black Mirror.
Je ne savais pas que les artisans du film revendiquaient cette filiation.
De même que je ne sais pas ce que vaut le bouquin (il semblerait que ce soit une adaptation).
Ne reste que le film, la médiocrité crasse de l'écriture, la tristesse du jeu des acteurs, avec une mention spéciale pour Emma Watson qui passe un tiers du temps à cabotiner de façon artificielle, un autre tiers à chialer pour compenser l'absence d'implication. Ou de direction d'acteur, car elle est capable de mieux et le prouve le reste du temps.

Le ridicule consommé de l'intrusion dans la vie sociale de l'héroine au début de son contrat par la Social Guestapo en mode "on n'est pas là pour te dire quoi faire de ton temps libre, mais par curiosité, tu faisais quoi entre 4h02 et 6h23 ? Non, t'es pas obligée de répondre, mais tu faisais quoi ? Et tu n'as pas répondu à tes 4000 mails. Pourquoi ? Et pourquoi tu as une vie personnelle alors qu'ici on fait tous la fête ensemble ? Non c'est pas obligatoire mais (grosse oeillade théâtrale) les activités sociales sont (grosse oeillade) importante... Mais c'est just for fun, hein, ne te sens pas obligée, c'est Just For Fun HA HA HA HAAAA... A plus tard (regard lourd de sens)"
Toi qui n'a pas vu le film, tu te dis probablement que j'exagère cette scène. Ce n'est pas le cas. En fait, je n'arrive même pas à transcrire à quel point elle pousse le caricatural vers des sommets de ridicule insoupçonnés.
Mais le pire reste la réaction de l'héroine, qui trouve ça un peu bizarre mais bon, elle va faire un effort pour s'intégrer dans cette congrégation pas intrusive du tout.
Après, c'est un peu le propos du film, l'intrusion jusqu'à son possible retournement dialectique, mais la mise en place est tellement poussive, par à-coups bourrins et fins comme une choucroute en boite sur lit de Nutella.

Le sentiment de voir un script rejeté pour un court épisode de Black Mirror étiré en longueur pour en faire un long métrage ne nous quittera pas.
Le personnage mystérieux/créateur omniscient/fusil de Chekov se limitera à sa dimension fonctionnelle, attendant dans l'ombre que les scénaristes aient besoin de lui pour un coup d'éclat final.
L'évolution de l'héroine est elle aussi soumise plus aux rouages bien visibles du scénario que mus par une quelconque cohérence personnelle, chaque retournement étant mis en place par un événement ponctuel, et non une évolution réelle.

Et reste donc ce final (que je vais SPOILER allègrement, donc si tu n'as pas vu le film, cher lecteur, et que tu tiens malgré tout à le regarder, fuis), déguisé en happy end, car les "méchants" sont démasqués, pris à leur propre jeu... à travers la mise en place officielle et définitive d'une société où la vie privée aura strictement disparu.

Bref, l'idée est intéressante pour une discussion de fin de soirée, mais la mise en place est tellement poussive que l'orientation générale et le choix de positionnement, supposément subversif, quant à l'intrusion et ses conséquences ne parvient pas à faire mouche et ressemble simplement à une énième maladresse.

Une critique détaillée serait intéressante, mais je ne vois pas pourquoi je fournirais plus de temps et d'effort à critiquer un film que ses scénaristes à l'écrire.
J'attendrai une oeuvre qui traite son sujet avec plus de finesse et de respect.