Le troisième long métrage de David Fincher pourrait principalement s'appréhender tel un remarquable exercice de style, tel un gigantesque pied de nez cinématographique à l'encontre de l'industrie hollywoodienne. Loin du parachèvement plastique de Se7en et bien avant le modèle d'écriture récemment représenté par Aaron Sorkin dans The Social Network The Game bénéficie pourtant de la superbe photographie de Harris Savides et d'un scénario passionnant, s'affirmant logiquement comme un film d'excellente facture.
Volontairement absurde et invraisemblable dans son déroulement The Game parle beaucoup et surtout de mise en scène, de scénario de vie et de mise en abîme : intriguant simulacre prenant la forme d'un polar classieux et un tantinet anxiogène le parcours de Nicholas Van Horton amuse autant qu'il surprend. Fincher enchaîne les péripéties en nous amenant d'une situation à une autre au gré d'éléments significatifs, faisant de son film un véritable jeu de pistes manipulateur. L'oeuvre est virtuose et symbolique en diable, notamment dans sa représentation de la filiation du protagoniste ; quant à l'interprétation de Michael Douglas elle demeure magistrale, fascinant mélange de guindage et d'humanité bafouée !
Il est évident que The Game reste un film mineur dans la fructueuse carrière de David Fincher, une oeuvre ayant parfois du mal à dépasser son sujet et reposant sur de grosses ficelles scénaristiques trouvant leur apothéose dans un deus ex machina totalement grotesque... Mais l'intelligence et le savoir-faire du cinéaste restent comme toujours inégalables dans le paysage du cinéma américain contemporain, travail d'orfèvre magnifié par la somptueuse musique de Howard Shore et la lumière de Savides. The Game est encore une fois la preuve que Fincher parvient toujours à tirer le meilleur d'un scénario lambda, s'entourant des meilleurs techniciens et artistes pour le plus abouti des divertissements. Et la beauté du geste.