해운대 / The Last Day (Yoon Je-kyun, Corée du Sud, 2009, 2h)

Premier film catastrophe produit en Corée du Sud, ‘’Haeundae’’, du nom d’un front de mer de la ville de Busan fréquenté par une populace fortunée, se trouve avec ses 11 millions de spectateurices au seizième rang des meilleures entrées au box-office du pays. Autant dire que cette production auréolée de succès, surprend de la part d’un réalisateur plutôt habitué à l’art de la comédie.


D’ailleurs, sur les deux heures du métrage, près des trois quarts de la durée nous avons à faire à une comédie. Mettant en scène une galerie de personnages variées, représentant différents degrés de la société coréenne, avec plus ou moins de succès. Cela va de la comédie un peu lourdingue, sans a-propos, à la chronique douce-amère, en passant tour à tour par le drame et la romance. Sont ainsi convoqués tous les genres qui ont font le cinéma de Yoon Je-kyun.


Si dans ses précédentes réalisations (à l’exception de ‘’Romantic Assassin’’) cela fonctionnait plutôt bien, sur différents niveaux, cette partie est ici un petit peu ratée. Ce n’est pas que l’on s’ennuie, mais durant une majeure partie il ne se passe rien. La plupart des personnages sont des désaxés comme les affectionne tant le réalisateur, mais la mayonnaise a du mal à prendre.


Si certaines histoires sont toutefois réussies, et permettent d’éviter un ennui profond, tout manque cruellement d’enjeux. Le naturel avec lequel Yoon parvenait à convoquer différent style semble avoir disparu. Ce qui fait que durant près d’une heure et demi ‘’Haeundae’’ apparaît des plus vain. Pour ne pas dire inutile.


Jamais le danger ne se fait présent, bien que des personnages sont liés directement à la catastrophe qui se profile, essayant d’en anticiper les proportions, mais ça reste très secondaire. Les minutes défilent, sans qu’il y ai vraiment de quoi accrocher l’attention. Ce qui fait que lorsque le tsunami géant débarque, et que tout se met en branle, et il est difficile de comprendre ce qu’il se passe à l’écran, puisque c’est particulièrement confus.


La faute sans doute à des effets spéciaux peu aboutis, qui rendent la vague assez peu convaincante. Bon, certes le film est de 2009, et par rapport à de gros blockbuster américains c’est une production bien plus modeste, avec tout de même une volonté affichée de faire dans le spectaculaire. Et de ce côté-là l’intention est louable, et il est vrai que certaines séquences fonctionnent tout de même parfaitement.


Notamment celle du pont (je n’en dis pas plus…) qui faut son pesant de cacahuètes. D’ailleurs cette séquence a été intégralement pompée dans le ‘’San Andreas’’ de Brad Peyton en 2015. Heureusement il y a ici et là, durant la catastrophe, des petites fulgurances qui empêchent ‘’Heundae’’ d’être un naufrage (sic) intégrale, rappelant les qualités de réalisateur de Yoon. Et le dernier quart s’en sort plutôt bien, même s’il ne fait pas oublier les premières minutes.


C’est ainsi un résultat en demi-teinte pour cette œuvre qui avait pourtant la prétention de proposer un spectacle d’envergure. Mais bien qu’elle échoue (sic), il est néanmoins intéressant d’observer la séquence du tsunami avec en tête le cinéma catastrophe hollywoodien. Cela permet de prendre conscience de la différence de traitement dans la manière de présenter un tel événement, qui sont diamétralement opposées. Là où Hollywood met en avant le spectaculaire, dans ‘’Haeundae’’ c’est avant tout filmé à hauteur humaine.


En effet Yoon Je-kyun a pris l’habitude dans ses réalisations, ses nombreux scénarios et ses productions variées, de présenter des personnages particulièrement humains. Les mêmes qui par le tissu des relations qu’ils nouent entre eux permet d’en apprendre plus sur leur personnalité. Le film n’échappe pas à cette règle, et nombres de moments présentent une émotion soudaine, née de l’urgence des évènements qui se produisent.


C’est aussi là l’un des regrets, puisque par cette soudaineté l’empathie créée avec le public n’a pas vraiment le temps de s’ancrer. C’est peut-être un parti pris assumé, qui appuierait l’abrupte arrivée du tsunami, qui ravage absolument tout sur son passage, mais si tel est le cas et bien ce n’est pas la facette la plus aboutie du métrage.


Faisant clairement référence au tsunami de 2004, des passages reprennent le visuel des images d’actualités de l’époque, la démarche affichée se veut réaliste. Même si le tsunami est totalement démesuré, il permet d’évoquer l’impuissance d’une civilisation hyper moderne, par l’entremise de la ville ultra-urbanisé de Busan et ses multiples grattes ciels qui écorchent l’horizon, et se révèlent d’une vulnérabilité indéniable face aux éléments de la nature.


Sur ce point le film se fait convaincant, et la réflexion sur la vacuité des civilisations ‘’modernes’’, représentée par la quasi heure et demi de comédie, est renforcée par la bascule soudaine vers le drame le plus horrible, par l’irruption de la réalité vraie. Pas celle du quotidien, où il faut se lever pour aller travailler, puis aller faire des courses en rentrant, payer ses factures et rendre des comptes à son banquier. Mais le quotidien lié aux éléments, celui qui en un clin d’œil peut renverser une ville semblant irréductible, tel un château de carte des plus fragiles.


Se retrouve ainsi la thématique de la violence, exprimée ici par la catastrophe naturelle, soit une irruption de l’horreur indicible dans un quotidien parfaitement réglé. Tout n’est pas perdu avec ‘’Haeundae’’, car même si c’est loin d’être l’œuvre la plus passionnante de son réalisateur, elle se maintient sur la même lancé, par un genre très différent, qui permet de révéler les obsessions de l’auteur présentent dans ses précédents travaux.


En demi-teinte, il est quand même possible de saluer la tentative de ce premier film catastrophe d’une industrie cinématographique qui en 2009 est encore en cours de développement. En effet, le cinéma coréen que l’on connaît aujourd’hui ne date finalement que de la fin des années 1990. En ce sens, pour un genre qui n’avait pas d’équivalent, donc partant sur une base vierge, inspirée des blockbuster hollywoodiens, l’effort est salutaire, à défaut d’être concluant. Mais il n’en faut pas pour autant réfréner sa curiosité…


-Stork._

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le 8 mai 2020

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