La cassette de l'ennui

Après avoir lu monts et merveilles sur ce faux documentaire, je suis quelque peu tombé des nues.
D'un point de vue technique, le moins que l'on puisse dire c'est que The Poughkeepsie Tapes ne se hisse pas au sommet de ce genre décrié qu'est le found foutage (on est loin d'un Cloverfield ou d'un Grave Encounters par exemple), le film se révélant très plan-plan, à l'instar du genre qu'il émule. Les tentatives de manipulation stylistique - avec victime en amorce et tueur s'approchant en fond de champ - se situent dans les extraits issus des fameuses cassettes retrouvées dans la maison du tueur. Celles-ci sont d'une qualité dégueulasse (bien que voulue), disons-le. Quant au contenu lui-même, il s'avère décevant. On nous promet des montagnes d'horreur, et tout ce qu'on voit c'est une femme rebondissant sur un ballon (un peu de mauvaise foi...)... sans doute le fameux pouvoir de la suggestion. Ou les limites du budget. Ou le manque d'inventivité des créateurs.
Mais là où le bat blesse véritablement, c'est dans la caractérisation du serial killer. Ce qui nous fascine dans ce genre de cas est autant la personnalité du tueur, son parcours, que la description de ses crimes. Ici, le tueur brille par son absence. C'est sans doute pour ça que le film choisit l'angle des cassettes plutôt que de la personnalité éponyme. Que seraient les crimes de Ted Bundy sans Ted Bundy ?
Notre Waterstreet Killer est en effet un patchwork, un tueur composite, qui change de MO comme de chemise, pour mieux troubler les enquêteurs. C'est pratique, et c'est surtout un procédé scénaristique censé accroître l'intérêt et le suspense. En définitive, cela manque surtout de consistance, de crédibilité. Jamais le Waterstreet Killer n'entrera dans la mémoire collective parce qu'il lui manque une unité, une caractéristique qui le définisse, à la manière d'un Richard Ramirez ou d'un Jeffrey Dahmer.
Autre léger grief : la fadeur des acteurs émulant d'éminents spécialistes. Des scènes qui, cinématographiquement parlant (puisque c'est bien d'un film qu'il s'agit), n'ont d'autre intérêt que de remplir une fonction : faire progresser le récit, par ailleurs plutôt habillement construit. Et c'est bien là le point fort du film à mon sens, qui fait qu'on peut le suivre sans réel déplaisir, mais en attendant toujours que ça décolle, d'en apprendre plus sur le Mal, la nature humaine, etc.
Or, n'importe quel vrai documentaire sur un serial killer s'avère plus intéressant, débarrassé de ses oripeaux scénaristiques (le tueur sans véritable personnalité et sans véritable MO).
Comme souvent, la vérité dépasse la fiction.