The Social Network est un contraste.
Celui d'une mise en scène figée, glacée, numérique confrontée à un récit virevoltant, énergique, jeune, et mouvementé.
C'est le passage de Fincher à son nouveau type de réalisation, ses nouveaux paris de mise en scène. On oublie le style hard-core, les fulgurances hypnotiques et barrées, les séquences poisseuses de Se7en ou Fight Club et on se plonge ici dans le froid, le distancié, l'impassible, le brillant, certes.
A l'image du héros, personnification de la mise en scène. Son débit est hallucinant, sa vitesse intellectuelle plus rapide qu'une mitraillette. Mais son caractère, ses ambitions, son calcul permanent font de lui un monstre. Et c'est là l'objet, classique pour un biopic : comment un monstre a t'il créé le site internet (aujourd'hui) visité par 2 milliards d'internautes ?
Pour raconter cette histoire folle, Fincher penche pour un rythme fou et déconstruit son intrigue, quitte à parfois compliquer le trajet pour le spectateur (avis aux habitués de la V.O. : il faut s'accrocher pour lire les sous-titres qui s’enchaînent bien vite !!). Ce rythme est entretenu par les acteurs, tous de jeunes comédiens (à l'époque) pas si connus, à qui Fincher a eu l'ingénieuse idée de donner place entière dans son film. C'est un film jeune, moderne, vibrant, avec tout ce que jeunesse signifie et embarque avec elle, mais cette jeunesse, folle, débridée, drôle souvent, Fincher l'osculte à travers son personnage de Zuckerberg, de côté, en marge, toujours un peu différent, quasi autiste, et le confronte, comme pour souligner le contraste entier qu'est le film, à des jeunes, plus "normaux" ; les beaux-gosses Andrew Garfield et Justin Timberlake qui s'en tirent à merveille.
Mais le rythme, à ne jamais s’essouffler, nous anesthésie presque. Certes le scénario de Sorkin, brillamment écrit, sait se rendre parfaitement lisible et alterne élégamment entre anecdotes (le plus souvent amusantes) et enjeux majeurs, le tout souligné par un sens du dialogue qui fait mouche, de la répartie qui claque. Mais cela sur deux heures épuise véritablement.
Ainsi sans être compliqué, The Social Network est un film exigeant, qui assomme par ces flash-backs permanents et son intrigue parfois alambiquée mais dont l'image, morte par trop de stylisme, fait manquer de vie à l'ensemble, et perd la fougue impériale de la jeunesse dont elle montre pourtant les ébats.
C'est trop sage mais survolté.
Épuisant mais mort.


Un constraste, je vous dis

Charles Dubois

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