
Habituellement, quand on voit un film en langue étrangère, il est sous-titré. La langue des signes étant, par définition, une langue à part entière, on peut se demander pourquoi The tribe nous est présenté sans sous-titres. Volonté d'un cinéaste radical ou argument marketing ?
La question se pose très rapidement, et avec elle la pertinence de situer le récit dans un institut pour sourds-muets. S'il s'agissait seulement d'illustrer l'envie de faire un film sans paroles, c'est un peu léger. S'il s'agissait d'une plongée en terre inconnue, c'est raté.
The tribe souffre du "syndrôme Después de Lucia" (>>>) dans sa manière d'infliger au spectateur une mécanique de l'insoutenable sans proposer la moindre position de repli, violemment, sans point de vue, pour le simple plaisir de mettre en image des scènes sordides.
Pas une once d'humanité ne transpire du film. Pire, le mauvais traitement infligé aux personnages féminins, les deux filles n'étant ici que gourdasses avides et soumises, la manière dont la prostitution est institutionnalisée par le film lui-même, jusqu'à cette abjecte scène d'avortement, dépassent la simple misanthropie. Misogyne et gratuit, The tribe est glauque par essence.
On regrettera alors que les talents de mise en scène du réalisateur servent un récit repoussant. Dynamique et fluide dans la première partie, la caméra fait preuve d'une énergie orpheline et vaine. The tribe est racoleur jusque dans des scènes de sexe esthétiques mais injustifiées.
Le soin apporté à la forme est ici contredit par une volonté de surenchère qui semble en avoir dupé certains. Il est pourtant nécessaire de faire la part des choses. Au cinéma, le regard compte : celui du cinéaste comme celui du spectateur. Celui de Myroslav Slaboshpytskiy est torve et malsain.