(Ne lisez pas si vous n'avez pas vu le film, cette critique contient beaucoup de spoilers.)
Je savais de quoi le film traitait et cela ne m'a pas empêché d'être surpris. Le projecteur tombé du ciel au tout début, point de départ de la recherche d'indices, la suspicion de Truman, tout cela m'a tenu en haleine : je ne voulais pas savoir ce qu'il allait découvrir mais comment il allait le découvrir.
Tout commence dans une ville modèle, Seaheaven, une espèce de ville en carton qui me rappelle la banlieue aseptisée où débarque Edward aux mains d'Argent. Superficialité des rapports et illusion de l'apparence sont au rendez-vous. Truman Burbank (Jim Carrey) y mène la vie d'un monsieur tout le monde qui travaille dans un bureau avant de rentrer chez lui où l'attend une femme aimante(Laura Linney). Enfermé dans sa routine, il s'y complait néanmoins.
Puis il décide d'écouter son cœur d'aventurier et de partir aux Îles Fidji. On lui barre la route.
Il rencontre alors Sylvia qui lui révèle alors que tout ce qui l'entoure est faux. Qu'elle n'a pas le droit de lui parler. Qu'il va finir par s'apercevoir de la supercherie.
D'indice en indice, il va réaliser que tout ce qui l'entoure est là pour lui. Qu'il est le héros malgré lui d'une télé-réalité géante, que tous les gens qui l'entourent sont des acteurs et que sa chère Seaheaven n'est qu'une ville-studio. Toute sa vie n'était qu'un show filmé en tous temps, en tous lieux. Il va alors tout faire pour s'échapper de ce monde.
Et c'est à partir de là que le film me déçoit un peu. Tout homme qui, longtemps prisonnier d'un mythe où il ne perçoit que l'ombre de la réalité, se voit libéré de ses chaînes, préfère dans un premier temps rester dans ses entraves. Il est toujours difficile d'accepter la vérité. Lorsque la vérité dit "tu as 30 ans passés, toute ta vie n'est que mensonge, tu as vécu 30 ans de faux-semblants, il existe un monde réel en dehors de celui-ci", il est quasi IMPOSSIBLE de l'accepter. Ou alors cela mène a un énorme conflit intérieur. Je vois peu de conflit intérieur chez Truman. Il est déterminé, presque jusqu'au bout. Il ne doute quasiment pas. On peut remettre en doute son statut d'être humain - peut-être son personnage n'est-il qu'une allégorie.
On peut d'aileurs voir les choses sous un angle plus métaphorique. La scène du dialogue entre Christof (Ed Harris) et Truman peut représenter le doute face à l'inconnu ou face à la vérité. J'y vois, pour ma part, la victoire du fils sur le père. Le premier "non" véritable adressé au père par le fils. (Il ne faut pas oublier que Truman a été officiellement adopté par les réalisateurs de la télé-réalité.)
Je regrette donc le peu de crédit accordé à l'impact psychologique du Truman Show sur son protagoniste principal, et à la difficulté qu'on peut avoir à se rebeller.
En revanche, j'apprécie la dimension symbolique qui met en avant l'importance de la désobéissance et la nécessité de s'ouvrir au monde, d'être une explorateur à l'image de Truman enfant.
Un bon film d'anticipation qui, s'il n'explore pas toutes ses possibilités, laisse au spectateur l'agréable impression d'être maître de ses choix, tout en instillant en lui un léger doute : ne sommes-nous pas, nous aussi, prisonniers à notre façon ? Chacun son Big Brother, dira-t-on.