Pluie d'hémoglobine dans un flou artistique

The Villainess est film immersif inventif et survolté qui pourrait vous donner quelques vertiges tout en vous laissant la sensation d’être totalement bluffé. La scène d’introduction filmée à hauteur d’épaule renvoie directement à l’univers des jeux vidéos de type FPS. Et le réalisateur s’en donne à coeur joie ! Comme si l’action plus qu’un genre était un nouveau médium cinématographique. Faisant sans cesse références aux arts audiovisuels, cinématographiques et vidéo-ludiques, Jeong Byeong Gil (정병길) semble vraiment prendre son pied dans un film vif et sanglant.


Maîtrisée, l’image joue entre plan large et rapproché, champs contre champs pour marquer les oppositions entre les personnages. Les scènes d’actions sont filmées dans un flou qui donne, au bout de deux heures de film, le vertige ! Pourtant la prouesse technique est vraiment à saluer car elle parvient à extraire un scénario de vengeance, somme toute classique, en un excellent film d’action et d’espionnage.


Sok Hee, la vilaine à laquelle on s’attache
Efficace et terrifiante, Sok Hee est une assassin sans vergogne que le désir de vengeance amène au limite de l’humain. Si les premières images nous convainquent de sa folie meurtrière, les révélations progressives du film nous lient chaque fois un peu plus à ce personnage. Son chemin tragique et morbide parlent d’un monde de mafia où la morale n’a pas sa place. Son univers impitoyable ne l’empêche pas de rêver d’un avenir enfin paisible avec sa fille, unique objet de son amour après la perte de son père et de son mari.


Mais, de rebondissement en rebondissement, son chemin de vie sera semé d’embuches ! La violence reprend le pas avec son enrôlement dans une unité des services secrets spécialisée dans la création d’espionnes. Le film entre alors dans le registre du film d’espionnage. Recrutée et formée, Sok Hee devient une arme gouvernementale pour débarrasser le pays de la pègre.


Pourtant, film coréen oblige, il marque un temps d’arrêt au milieu de la narration mouvementé pour imprégner ses personnages d’une histoire plus sensible. La caméra change de style. Elle s’éloigne et prend de la distance pour mieux nous amener d’un registre à l’autre. La romance, la psychologie, les intrigues du passé et les jeux d’espionnages cohabitent ainsi brillamment avec l’action et l’hémoglobine.


La romance sous couverture des deux espions nous porte au rire et aux larmes car nous sommes finalement les seuls à connaître les vrais sentiments qui étreignent les personnages. Ainsi complice de leurs secrets sentiments et témoins impuissants du destin auquel le réalisateur les conduit, on apprécie d’autant plus la vengeance exutoire de nos personnages. Car, de révélation en jeux croisés, les spectateurs sont seuls complices et confidents du chemin de Sok Hee et, avouons-le, on veut la voir vaincre quitte à regarder avec indulgences l’invraisemblance de son invincibilité.


La méchanceté s’incarne au travers d’un ennemi invisible qui change, de twist en twist, plusieurs fois de visage. Sortant du seul rapport binaire allié-ennemi, le film n’aborde, cependant, qu’en survol cette figure du méchant. Et si on parvient à l’identifier à fin, on reste bien en peine de les détester seulement. Car la méchanceté s’incarne au travers de plusieurs personnages que leurs choix, les circonstances et l’écosystème violent conduit à cet état. Seule l’enfant, est-ton certain, n’a pas de méchanceté tapit dans ses actions.


The Villainess est ainsi un excellent film d’action. Il s’amuse de plusieurs genres et registres et joue avec le médium cinématographique. Et cela pour notre plus grand plaisir ! Attention cependant à ne pas le voir trop près de votre écran. Les jeux de caméra risqueraient de vous donner le vertige. Tout comme le ferait l’hémoglobine et la montagne de cadavre, qui au cours des deux heures banalises complètement l’acte de tuer. Bref, puisqu’il fait parti des rares films coréens que l’on présente ici qui soit diffusé en France. Si vous n’avez pas eu la chance de le découvrir au cinéma, vous pourrez l’acheter en DVD.


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Halin
7
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le 9 avr. 2018

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Haëlin

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