Très bonne surprise ! Très bonne surprise déjà de voir Marjane Satrapi changer totalement de registre en s'attaquant à la comédie horrifique, et surtout très bonne surprise que de voir The Voices évoluer à un tel niveau de justesse et d'originalité !
Pourtant, voir Ryan Reynolds dans le premier rôle avait de quoi rebuter, mais je me suis laissé convaincre par certains de mes éclaireurs (et par le pitch aussi) pour finalement me rendre compte que l'acteur avait fait et était un très bon choix - notamment grâce à son sourire un peu niais, mais toujours bogosse. La sculpturale Gemma Arterton et la non moins charmante Anna Kendrick complétant ce casting hollywoodien surprenant.
Jerry, en réinsertion après un long séjour à l'HP, se retrouve donc à travailler dans l'usine de baignoires chatoyante d'un patelin paumé du fin fond de l'Amérique. Forcément seul, et en quête de socialisation sur les conseils de sa psy, Jerry s'emballe pour un rien et notamment pour l'organisation d'un pique-nique avec ses collègues, option chenille derrière la "petite" anglaise bien gaulée dont il tombe rapidement raide dingue - et c'est peu de le dire.... Mais une fois rentré chez lui, on découvre un Jerry schizo donnant la réplique à son gros chien (sa bonne conscience) et à son petit chat (la mauvaise). Mais si encore Jerry n'était que schizo... De grosses tendances bipolaires, maniaques (les tuperwares), et finalement tête en l'air complètent le tableau. On comprend aussi à sa façon de mater le déhanché d'un Elvis chinois sa très probable homosexualité refoulée : un détail qui aura d'ailleurs son importance lors du premier "accident"...
Et sa vie rebasculera lorsqu'il retrouvera par hasard sa lointaine amoureuse, venant de lui poser un lapin (et non pas venant de lui "causer" un lapin), mais qui l'invitera finalement à dîner... Bon, pas la peine de tout raconter, mais je dois bien admettre que la tronche du cerf m'a laissé plutôt dubitatif, tout comme les rares scènes de meurtres... Parodiquement voulu ? Peut-être, vu que tout le reste, et notamment certains plans, m'ont carrément halluciné de précision et de beauté (macchabée à l'aube, champ avec la psy). Et ce d'autant plus que l'atmosphère du film n'a rien de malsain, faisant qu'on n'éprouve aucune antipathie envers notre psychopathe.
Ce que j'ai préféré dans The Voices, au-delà de son décalage et de son humour, c'est que tout se tient vraiment très bien. La folie du personnage principal vis-à-vis du drame de son enfance m'a passionné. Le mec se trouvant même être plus heureux sans ses médocs, et donc dans une sorte d'impasse le poussant à continuellement mentir à sa psy. Et lorsque l'on découvrira le véritable intérieur de son appart - au milieu de nulle part et au coin d'un club de bowling désaffecté (métaphore ?) -, on se dira que quand même, rien n'a été laissé au hasard ; que tout a été exploité.
Et pour dire que tout sonne juste, j'ai même trouvé la petite bluette très mignonne. Non, vraiment, The Voices fonctionne parfaitement, grâce à la solidité de son scénario notamment. D'ailleurs, lorsque Jerry trouve enfin d'importantes réponses à ses délires, juste parce qu'il met sa psy dans l'obligation de lui parler vraiment (petite pique à cette corporation au passage), c'est assez profond. Son "On a le droit de désobéir ?" résonnant comme une réponse assez cinglante et particulièrement cohérente compte tenu de son traumatisme initial...
Quant au final, il s'inscrit parfaitement dans la lignée du film : amusant et totalement décalé.