This is Thatcher

Très belle réalisation, plongeant le spectateur dans l'Angleterre déclassée des années 80, avec pour trame de fond le développement des punks et l'acculturation d'une partie du prolétariat, favorisant la montée du fascisme. La proximité des révoltes, celle, populaire, joyeuse, tarée et celle, plus colérique, désoeuvrée, et frustrée des skins est extrêmement bien montrée. Sorte d'errance incarnée par le jeune Shaun, dépourvu de père, solitaire et en quête d'affirmation. Beaucoup de bienveillance accompagne son entrée dans le groupe de punks, mais beaucoup d'innocence, qui va le mener , comme pour tant d'adultes, vers le chemin de la haine, parfaitement incarné par Sephen Graham, ancien taulard enivré des tensions xénophobes ambiantes dans l'Angleterre ultralibérale de Tchatcher. Car il s'agit aussi et surtout d'un film politique, une violente charge contre cette politique de négation des êtres (que les informations ressassent à travers le prisme de la guerre menée aux Malouines), et un pied de nez poétique, où, au milieu de tours désolées, désert urbain sans âme, survit une bande de fous, en décalage sur à peu près tout avec leur époque. Un message servi par un casting exceptionnel (le jeune acteur est très bon) et une mise en scène toujours très soignée et d'une très grande poésie.

Au final, le film est un projet aussi libre que ses personnages, puisqu'il s'offre au spectateur cette poignée d'individus au milieu d'une uchronie sociale destabilisante sans jamais porter de jugement, ni sur l'oisiveté du groupe, ni sur les dérives idéologiques qui le rongent. Une liberté dont on franchira même les limites, avec des scènes particulièrement osées.