Tokyo année 20XX, ville fantasmée par tous les occidentaux, ravagée par des psychiques aux pouvoirs destructeurs, attaquée par des aliens body-snatcher, reconstruite en tokyo 3, dirigée par un empire américano britannique et j’en passe.

Dans l’histoire fantasmée du monde Tokyo en a vu des vertes et des pas mures. Mais ce n’est que trop rarement que l’on s’est intéressé à la ville en elle-même, ses bas fonds, ses âmes perdues et ses drames quotidiens.
Trop souvent plongé dans des catastrophes titanesques qui sont le fort de nos cher ami Nippon, on en oublie souvent que Tokyo n’est pas pire ni meilleure que n’importe quelle autre métropole et celà Tokyo godfather tente de nous l’inculquer, avec son scénario en forme de roman social nouvelle ère qui montre un peu à la face du monde que oui, Tokyo ce n’est pas seulement des adolescents fougueux qui sauvent le monde par devoir, c’est aussi des types normaux à qui tout est tombé sur la gueule.

Et Gin, Hana et Miyuki sont de ceux là, clochards pittoresques obligés d’écouter un sermon religieux histoire de pouvoir manger à Noël. Le premier est un alcoolo bourru, le second un trans déluré et la troisième une adolescente fugueuse, fresque presque banale qui balaye large sur tous les cas de détresses sociales.
Ce trio de choc va donc réussir à trouver dans les poubelles de la ville un enfant abandonné et va se faire le devoir au nom des hautes valeurs morales qui sont les leurs, ramener l’enfant à ses légitimes parents mais par eux même hein ? C'est sur que la police c'est qu'un tas de ruffians impropres.

Ce que j’ai trouvé très amusant dans ce film c’est la symbolique catholique qu’il déballe et remballe tout le long, comme une espèce de fil directeur magique à l’intrigue. Que ce soit dans les multiples deus ex machina qui sauvent nos amis sur le chemin, jusqu’aux discussions sur dieu et l’amour ainsi que les petits effets psychédéliques qui sont la marque de fabrication de Kon, tout dans ce film transpire une relecture de la quête des rois mages non pas pour trouver l’enfant béni mais pour le rendre à ses légitimes parents.

Et ce ne sont pas les attaques sauvages de La Bo en mode Ode à la joie Evangelionesque qui vont venir me contrarier dans mes positions, les japonais ont définitivement une étrange attirance pour les symboles religieux de l’occident.

Mais surtout ce qui m’a plu dans ce film c’est le fait qu’il ne tombe pas dans la parodie de lui-même. Tout d’abord l’humour est assez présent et permet de ne pas trop s’appesantir sur le destin tragique et les choix de vie peu judicieux de nos protagonistes. Le fait d’éviter l’écueil du pathos facile nous permet donc de laisser à l’œuvre une dynamique forte sans être plombé par des relents de pianos tristes et des plans émotions faciles comme on sait si bien le faire dans les films français. Je ne dis pas que le film ne possède pas ses rares séquences « émotions », mais celles-ci permettent surtout d’en apprendre un peu plus sur nos intriguant héros et pas de montrer du doigt leur conditions précaires l’air de dire « Ayez pitié de ses pauvres parias ».

Comme d’habitude avec les films de Satoshi Kon, l’ambiance graphique est très travaillée et quand on repense que le film est sorti en 2003 on peut carrément dire que ça en jette pas mal ! Mais ses graphismes ont surtout le mérite de montrer Tokyo sous un autre jour, celui du quotidien. Rames de trains, vieux quartiers, immeubles, ruines. La ville se dévoile comme une immense forêt de béton au travers de tous les plans et elle apparait vraiment comme un environnement riche, ni bon ni mauvais mais qui abrite toutes sorte d’étrangeté. Le tout accompagné d’un voile blanc de neige, histoire d’y aller un peu plus fort niveau pureté.

Ma seule petite déception vient de la musique qui est néanmoins beaucoup moins fantasque et épicée que dans paprika, dans le même registre que celle de perfect blue, elle s’accorde très bien avec le film mais s’oublie assez vite après.

Autre point que j’aimerai saluer c’est le chara design assez varié qui tend à rendre les personnages beaucoup moins plastiques à l’inverse de beaucoup d’œuvres d’animations, ici tout le monde à une bouille imparfaite, parfois grotesque mais qui aide à rendre les personnages pus vibrants.

Quand à l’intrigue en elle-même, elle est ce qu’elle est, loin des délires paranoïaque sur la notion de réalité, elle joue aussi sur les échelles de celle-ci mais en s’attardant sur le volet social cette fois ci avec une Tokyo des bas fonds que l’on visite de long en large et que l’on apprend à aimer.
Brume_Ondeblois
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le 23 déc. 2014

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Brume_Ondeblois

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