Une Lara Croft rebootée dans un blockbuster raté

Subissant à son tour un reboot comme le jeu vidéo éponyme de 2013, "Tomb Raider" version cinématographique 2018 a la lourde tâche de faire oublier les deux premières lamentables adaptations des aventures de Lara Croft sur grand écran. Ce ne devrait pas être trop difficile se dit-on naïvement...


Ça part plutôt bien : finie donc l'hypersexualition à outrance de l'héroïne façon kit Angelina-Jolie-avec-lèvres-montgolfières-et-poitrine-en-avant du début des années 2000 ! Aujourd'hui, Lara Croft est une femme forte de 2018, plus humaine en se forgeant son caractère au fil des épreuves et incarnée à la perfection par Alicia Vikander. L'actrice suédoise impose en effet instantanément sa Lara dans nos esprits, jusqu'à en arriver à un point où elle se confond presque physiquement avec la nouvelle version du jeu vidéo. Là-dessus, "Tomb Raider" 2018 réussit haut la main son pari de rebooter une héroïne désormais plus en adéquation avec notre époque. Ce sera hélas sa plus grande qualité car derrière rien ne va se révéler à la hauteur.


Inconsolable depuis la disparition de Papa Croft, Lara s'est toujours refusée à reconnaître la mort de celui-ci pour reprendre le flambeau de la fortune familiale. Après une chute à vélo lors d'une course débile entre coursiers qui lui remet apparemment le cortex cérébral en place, la jeune femme décide enfin de prendre ses responsabilités et découvre à la lecture du testament que son père a disparu alors qu'il tentait de trouver une tombe mystérieuse sur une île mystérieuse recherchée également par une organisation mystérieuse. Ni une, ni deux, avec l'aide d'un Japonais alcoolique, la voilà sur les traces maritimes de son paternel et de sa mort... mystérieuse, évidemment.


Reprenant quelques noms familiers du jeu de 2013 (l'île de Yamatai, la légende d'Himiko, le bateau Endurance...) pour en faire n'importe quoi, l'histoire au coeur de "Tomb Raider" est d'une telle pauvreté qu'on en vient à se demander comment un scénariste a pu ressentir une quelconque fierté à pondre une intrigue aussi basique de blockbuster où le terme "inventivité" serait considéré comme une aberration de la pire espèce. Le film semble se développer autour d'un récit en pilote automatique complet, n'offrant absolument aucune surprise (même la révélation finale pourtant pas si bête autour du mythe d'Himiko est noyée dans la nullité de l'ensemble) et se contentant de placer quelques enjeux simplistes sur sa route afin de juste privilégier une sorte de passage en revue de toutes les actions de Lara Croft issues du jeu (il se met d'ailleurs en mode ralenti à ces moments précis pour bien appuyer le clin d'oeil au cas où nos deux-trois neurones en fonction pendant le visionnage ne les saisiraient pas). Les personnages sont unanimement de vagues silhouettes fantomatiques à une seule facette : Lara n'est définie uniquement que par sa relation avec son père (les flashbacks de son enfance sont bien grisâtres pour nous rappeler qu'ils sont d'une tristesse absolue), le pauvre Walton Goggins en est réduit à écarquiller les yeux et à tirer sur plein d'innocents dans le but de nous signifier qu'il est l'antagoniste de pacotille dans cette triste affaire (en passant, le bonhomme n'est pas vraiment très dégourdi : après sept ans passé sur une île minuscule, il n'a jamais trouvé la moindre trace d'une gigantissime caverne souterraine, ses employeurs sont d'une patience qui frise l'inconscience) et... c'est à peu près tout, le reste ne servant que de chair à canon autour de laquelle personne ne paraît vouloir créer un semblant d'empathie.
Côté action, "Tomb Raider" fera parfois le job (la séquence de la cascade) mais, le plus souvent, le manque de finition dans les effets numériques s'ajoutera à notre absence d'implication pour les événements à l'écran ou l'enchaînement de situations qui ne s'embarrasseront plus de la moindre crédibilité (tout ce qui se déroule dans le temple avec une mention spéciale évidente à l'énigme gênante ou aux pièges "post-tombe", pourquoi diable en avoir installé ?).


Alors, oui, "Tomb Raider" 2018 est mieux que les deux films précédents mais à peine malheureusement... Et c'est avant tout grâce à Alicia Vikander/Lara Croft, ce qui l'entoure n'atteint même pas la cheville de l'épisode le moins réussi de la saga en jeu vidéo.

RedArrow
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le 17 mars 2018

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