Everybody knows this is nowhere
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L’amoureux de cinéma et le gilet jaune, lorsqu’ils ne se confondent pas, ont au moins un point en commun : ils reçoivent occasionnellement bien plus qu’ils ont donné. L’un paye sa place de ciné ou de VOD, l’autre paye ses impôts. L’un comme l’autre, le premier au figuré l’autre au sens propre, se font parfois crever les yeux par ceux qu’ils font bouffer. L’un apprécie plus que l’autre.
Comme cinéphile dilettante, après le visionnage de quelques films dispensables, voilà qu’au hasard d’une invitation amicale, je me retrouve posé devant Trois femmes de Robert Altman. Film auquel je n’aurais jamais pensé par moi-même. Je suis en mode détente totale. Le rugbyman sur le terrain est entraîné, échauffé, préparé, à prendre à tout moment un troisième ligne dans le buffet. Alors que je suis au bord de l’eau turquoise, en mode Pinacolada, chemise hawaïenne et tongs, lorsque je subis ce plaquage déterminé par un type de 120 kilos lancé pleine balle.
Dire que c’est un film étrange, à part, serait euphémiser. Le réalisation, faite de zooms et dé-zooms constants, de lents panoramiques, donne le mal de mer. J’ai pas aimé sur le coup, normal. Mais évidemment, c’est fait exprès. Cette sensation de voguer sur un bateau ivre n’a pour but que de nous embarquer sur la même galère que les héroïnes. Je suis plutôt réticent en général, devant des procédés formels trop frontaux. Mais là, avec du recul, je dois avouer que ça a marché. Pour rester dans la métaphore maritime, sans redouter du coup, le cliché, je dirais que le film est immersif.
Je ne pense pas, comme certains, que la condition féminine soit le principal thème du film. Plutôt la condition humaine. Rien que ça, oui ;-). Les personnages sont en peine avec le monde, comme chacun peut l’être à sa manière idiosyncrasique. Nulle métaphysique en apparence, mais en apparence seulement. Elles sont nos caricatures, nos névroses. Elles sont présentées comme en peine avec la sociabilité. Perdues dans des aspirations, des désirs, ou des fantasmes, elles voudraient finalement, juste exister, être avec l’autre, parmi les autres, incluses, trouver un lien qui les relie au monde. Elles cherchent maladroitement leur place, échouent, se perdent, trouvent ce qu’elles n’attendaient pas.
La solution qu’elles finissent par trouver, c’est celle que nous choisissons tous : réduire l’univers à une dimension acceptable et viable.
Créée
le 9 mars 2020
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