Une Femme Fantastique n'était pas sur mon planning, puis en m'attardant devant la bande-annonce, elle a titillé mon immense curiosité. Le regard de cette femme ne me laissait pas indifférent et je voulais savoir comment sa tragique histoire d'amour allait se dérouler. La séance sera difficile, mais elle vaut la peine d'être intensément vécue.
Depuis un an, Marina (Daniela Vega) est en couple avec Orlando (Francisco Reyes). Après une soirée au restaurant pour fêter l'anniversaire de celle-ci, il va se réveiller en pleine nuit en se sentant mal. Elle va l'emmener à la clinique, mais ce sera trop tard. Son décès va signer le début d'une suite d'humiliations à l'encontre de cette femme pas comme les autres.
Une femme fantastique, formidable et amoureuse. La relation de Marina et Orlando est vécue comme une anomalie dans notre société. La différence d'âge est souvent vu comme un arrangement financier entre les deux intéressés. L'ex-femme d'Orlando ne se privera pas de lui demander s'ils avaient une relation tarifiée. En clair, elle lui dit qu'elle est une pute. La violence des propos tenus par cette femme, ne sont qu'un exemple parmi tant d'autres. Auparavant, un médecin et policier ont déjà maltraité son identité sexuelle, car Marina est différente à leurs yeux. C'est une femme transgenre et face à elle, les gens se montrent agressifs. Les institutions et la famille d'Orlando vont être odieux à son encontre. Ils ne peuvent accepter son choix de vie, car leurs esprits sont trop étroits. Ils s'estiment meilleurs, mais c'est bien loin d'être le cas.
Une héroïne transgenre. On ne laisse pas le temps à Marina de faire son deuil. On la soupçonne de violence à l'encontre d'Orlando, d'être une prostituée, une chercheuse d'or, une détraquée et à aucun moment ces gens ne se disent que c'est tout simplement une femme amoureuse. Malgré les humiliations, elle reste debout et continue d'avancer. Elle encaisse les coups et les mots, mais va se montrer plus forte que ce que laisser supposé son apparente fragilité. Le chien qu'Orlando lui a offert, va devenir le symbole de sa lutte. C'est son dernier lien avec le défunt. Elle se fout du côté matériel : la voiture et l'appartement. Elle veut ce chien auprès d'elle et va se battre jusqu'à ce que sa divine voix se fasse entendre.
C'est un film dur, émouvant et sensuel. Daniela Vega est magnifique. On est de tout cœur avec elle, tout en ne comprenant pas le déferlement de haine qu'elle subit de la part des personnes qui se dresse face à elle. La musique onirique de Matthew Herbert, nous permet de lâcher un peu prise en se laissant bercer par la douceur de ses notes. Ce sont des petits moments de tendresse dans ce monde de brutes. La réalisation de Sebastian Lelio ne lâche pas son héroïne. Il prend soin d'elle, en rendant hommage à sa beauté et sa force de caractère.
Depuis Crying Game de Neil Jordan en 1993, on peut à nouveau constater que notre monde en soi-disant évolution, n'accepte toujours pas ce qu'il ne comprend pas et les femmes en sont les principales victimes. Ce film avait été un choc émotionnel pour l'adolescent que j'étais. Il m'a permis de comprendre que l'amour avait différents visages et celui de Marina en fait parti.