Velvet Buzzsaw
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Velvet Buzzsaw

Film VOD (vidéo à la demande) de Dan Gilroy (2019)

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Je m’attendais au Cri de Munch, mais c’est aussi chiant qu’un monochrome de Klein…

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Après avoir vu la bande annonce de Velvet Buzzsaw, ma soirée du 1er février était bouclée. Seul, la nuit venue, après avoir fermé les volets et éteint les lumières, je démarrai Netflix et lançai le film. L’avertissement « 16+ / Violence » ne conforta dans mon idée : j’allais être intrigué, bousculé, voire dans le meilleur des cas, effrayé. Près de deux heures plus tard, au générique de fin, c’est empli de déception que je rallume les lumières.



SUR LE FOND : 5 étoiles



La bande annonce de Velvet Buzzsaw faisait une double promesse : dresser le tableau cynique du monde de l’art et de la critique de la Cité des Anges, et proposer une intrigue dérangeante, angoissante et terrifiante. Malheureusement, même si on peut considérer la première promesse tenue, le film ne parvient pas un seul instant à faire naitre le début d’un embryon de départ de frisson. Déjà, tout était dans la bande annonce donc cela n’aide pas à être surpris. Mais même sans ça, Velvet Buzzsaw n’arrive pas créer une atmosphère suffisamment angoissante malgré l’univers proposé assez propice à cela sur le papier. Les éléments surnaturels sont assez cheap, et les explications de contexte sont trop confus.


La mort de la mère et de la sœur de l’artiste, la maltraitance de son père, son passage dans un hôpital psychiatrique, le rejet de l’argent dans toute son œuvre, l’utilisation de son sang dans la peinture, le fait d’exploiter les œuvres au lieu de les jeter comme il le souhaitait...


Il y a assez de background pour faire au moins quatre films différents et là, tout est plus-ou-moins utilisé dans une soupe pas très digeste. Surtout qu’au final, ce ne sont pas les œuvres elles-mêmes qui agissent, mais les autres formes d’art à proximité manipulées par les créations de Ventril Dease. Les meurtres vont alors s’enchainer avec plus ou moins d’originalité faisant de Velvet Buzzsaw un slasher un peu mou. Il épouse d’ailleurs certains codes de ce genre particulier comme des personnages incohérents et stupides (Bryson et Jon en tête). Malgré tout, le film est à la hauteur de ses ambitions concernant le côté satire acide du monde artistique. Quasiment tous les personnages s’intéressent plus à la valeur d’une œuvre qu’à l’œuvre elle-même, et puis il y a une ou deux scènes caustiquement drôles.


Celle où Jon Dondon (Tom Sturridge) prend les ordures pour une œuvre d’art dans l’atelier de Piers (John Malkovich). Et puis dans le même genre, celle où tout le monde croit que le cadavre de Gretchen (Toni Collette) fait partie de l’œuvre Sphère.


Mais la satire passe évidemment par les personnages de Velvet Buzzsaw qui sont tous plus détestables les uns que les autres. Jake Gyllenhaal est en roue libre et offre un Morf Vandewalt aussi extravagant que dans Okja, et autant psychopathe que dans Night Call. Sa prestation est pour beaucoup dans les quelques qualités du film parce que le reste féminin du casting (Zawe Ashton, Rene Russo et Toni Collette) est assez mauvais.



SUR LA FORME : 5,5 étoiles



Jusqu’en 2014, Dan Gilroy était un scénariste relativement lambda, n’ayant jamais été associé à un projet vraiment intéressant. Il est ensuite révélé comme l’un des réalisateurs les plus prometteurs grâce à son premier film, Night Call (ou Nightcrawler en VO), dans lequel Jake Gyllenhaal devient petit à petit le pire des charognards dans un monde médiatique toujours à la recherche de l’image la plus choquante. Après le décevant L’affaire Roman J., Dan Gilroy revient à ce qui avait fait son succès cinq ans auparavant : la critique acide et dérangeante. Cette fois, c’est le monde artistique de Los Angeles qui est la toile de fond de son œuvre, et on peut dire que c’est une décision murement réfléchie. En réalité, Velvet Buzzsaw est né dans l’esprit de Dan Gilroy il y a plus de vingt ans lorsqu’il (co)signa le scénario de Superman Lives de Tim Burton. Ce film ne verra évidemment jamais le jour, et ce malgré la tentation de voir Nicolas Cage en collant bleu et slip rouge. Les studios Warner, n’anticipant pas de suffisantes retombées financières, décident d’abandonner le projet. C’est cette gestion économique de l’art qui restera au travers de la gorge de Dan Gilroy et qui lui inspira plus tard Velvet Buzzsaw.


Les décors nocturnes de Los Angeles, propres au contexte de Night Call, étaient propices à développer un thriller avec une ambiance perturbante. Ici, la majorité de l’intrigue se déroule en journée dans des lofts ultra-lumineux ou des galeries bourrées de néons. Cela offre une photographie bien léchée qui fait aussi fake et artificiel que l’univers dépeint. Cohérent donc, mais qui n’aide pas à créer une ambiance d’épouvante. On a aussi d’ailleurs beaucoup de plans de transition sur la ville, sur des buildings, qui font davantage sitcom que film d’horreur.



The admiration I had for your work has completely evaporated.



Les effets spéciaux numériques sont assez cheap, mais pas nombreux donc ça va. La plupart des effets reposent en réalité sur des mouvements de caméra et sur ce qui est en dehors du champ. Et c’est plutôt bien géré comme dans la scène où Jon Dondon (Tom Sturridge) se retrouve emprisonné dans l’œuvre qu’il expose. Velvet Buzzsaw tente quelques trucs en termes de réalisation. Il y a notamment du split screen, et même du POV où le sujet est un tableau qui se met à suivre sa victime. Malgré cela, globalement, le film reste assez académique et donc pas très intéressant.


C’est finalement assez représentatif du sentiment que laisse Velvet Buzzsaw : pas très intéressant, et assez décevant. Le budget de 21 millions de dollars est évidemment loin des grosses productions hollywoodiennes, mais permettait tout de même de s’attendre à beaucoup mieux. En réalité, excepté Jake Gyllenhaal qui est probablement l’un des acteurs les plus talentueux de sa génération, le film ne propose pas grand-chose.


Bonus acteur : NON


Malus acteur : NON



NOTE TOTALE : 5 étoiles


Créée

le 3 févr. 2019

Critique lue 974 fois

1 j'aime

Spockyface

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