CONTEXTE

Les films d'horreurs existent de longue date (les films de la Hammer peuvent témoigner). Les films avec un meurtrier qui accumule les crimes à l'arme blanche (aux Etats Unis les slashers ou les giallo en Italie, les deux genres ayant leurs codes) ont aussi une longue histoire (Psycho au hasard...). Mais le slasher moderne avec un boogeyman inarétable qui dézingue de l'adolescent tout le long de la pellicule on le doit à John Carpenter avec Michael Myers et Halloween en 1978.

Le fait que Vendredi 13 arrive juste après Halloween n'a d'ailleurs rien d'un hasard puisque le film a clairement été fait pour rebondir sur le succès du film de Carpenter.
Le film sera d'ailleurs lui même un succès plus ou moins équivalent (les deux films ayant rapportés plusieurs dizaines de M$ pour des budgets inférieurs à 1M$) et ce à travers le monde (le film réalise plus de 600 000 entrées en France) et ce malgré des critiques désastreuses.

Le réalisateur (Sean Cunningham) restera le producteur de la série et ce encore actuellement là où le scénariste Victor Miller restera sans aucun lien avec les autres opus (déclarant même n'en avoir jamais vu aucun). Mais aucun des deux n'avait vu arriver ce qui allait devenir la plus longue des sagas classiques de l'horreur (Halloween, A Nightmare on Elm Street, Hellraiser ou Texas Chainsaw Massacre restant toutes moins prolifiques pour le moment)

Soutenue par le public (sa longévité au cinéma en est la preuve vivante), décriée (à juste titre la plupart du temps) par les critiques, la série (et ce premier opus n'y fait pas exception) sera une cible de choix pour le MPAA (l'institut de censure américain) : tous les films se verront plus ou moins amputés des séquences les plus gores...
On se retrouve donc avec des films souvent moins gores que par exemple la Baie sanglante...la comparaison avec le giallo de Mario Bava n'étant pas innocente, le film de 1971 étant une des références visible de la saga comme on le verra par la suite (le premier titre de Friday the 13th étant d'ailleurs A long night at the Camp Blood, à mettre en parallèle avec le A Bay in Blood, comme on pourra mettre en parallèle la Baie italienne et le Crystal Lake...)


HISTOIRE

1958 : Deux moniteurs se font tuer au camp de vacances de Crystal Lake. Des années plus tard, le vendredi 13 juin de 1979, le camp est sur le point de rouvrir quand les meurtres recommencent...Vu que tous les moniteurs vont dans les bosquets se faire des papouilles, ils passent inaperçus jusqu'à ce que le camp soit quasiment entièrement exterminé. Le tueur, c'est Mrs Voorhees qui venge son fils Jason, mort noyé parce que les moniteurs batifolaient au lieu de surveiller le lac.

CRITIQUE

Les films d'horreurs vieillissent mal c'est un fait connu. Les gimmicks horrifiques prennent vite de l'âge peu aidé par les effets spéciaux qui eux aussi sont souvent datés. Alors quand on parle d'un slasher (genre ultra codifié parmi les genres codifiés) datant de la préhistoire du genre, on est en droit de s'attendre plus à une pièce de musée qu'à un bon film.

Surprise ! Le film fonctionne extraordinairement bien. Ce n'est pas du tout grâce aux acteurs (quoique les rôles féminins soient plutôt bien interprétés, surtout les deux derniers présents à l'écran) qui ont étés choisis dans l'ensemble, plus pour leur qualité physique (le but avoué du réal était d'avoir des acteurs qui pouvaient venir d'une pub Pepsi) qu'autre chose. Ce n'est pas le scénar non plus qui est somme toute assez classique (pour les 2/3 détails qui ne font pas preuve de classicisme se reporter à la partie « saga »). Non, non ce qui fait la force du film c'est bel et bien sa réalisation.

Le film est en effet extrêmement bien fichu à 2 niveaux. Le premier tiens dans le fait que le film est plus ou moins un whodunit : tout le long du film les personnes ont beau mourir, on ne connaît ni le tueur, ni ses motivations. Pour cela Sean Cunningham reprend le principe de l'ouverture d'Halloween ou de la première moitié de la Baie Sanglante de Mario Bava, avec les plans en caméra subjective. Si l'ouverture du film de Carpenter reste célèbre, son emploi dans le film restait anecdotique. Ici cela rajoute un sentiment profondément malsain de partage avec le tueur qui se verra renforcer tout le long du film (la motivation dudit tueur étant on le verra assez compréhensible).
Mais cela resterait inutile sans le deuxième point positif : la gestion de l'inattendu. Dans un film d'horreur on anticipe toujours : qu'est ce qui va arriver hors champ, d'où va surgir le tueur, etc. Et dans la plupart des films, on retrouve invariablement les même codes répétés ad nauseam (La colline a des yeux réutilise les même effets déjà vus 1000 fois par exemple) : on s'attend à ce qu'il arrive par la droite, un chat passe par la droite, on relâche l'attention, bam le tueur arrive par la gauche avec la musique qui s'énerve...
Et bien ici, si on reste dans le même schéma, on est surpris de manière régulière (la caméra subjective parfois de manière trompeuse aidant énormément à cela), et on peut même sentir la trouille venir à certains moments et s'installer progressivement.

4.5/6 (un vraiment bon film d'horreur, doté de bonnes idées à la pelle)



SAGA

Le film en tant que premier a forcément une place à part dans la saga vu qu'il lance la franchise. Mais en plus de cela il est aussi un de celui qui est le plus différent de l'idée qu'on se fait de la série.
En effet pas de tueur au masque de hockey ici vu que le tueur n'est pas Jason Voorhees mais sa mère Pamela Voorhees (bien que le prénom de Pamela n'apparaisse que dans le Chapitre Final) ! (on retrouve d'ailleurs ici une solution au whodunit qui ressemble à une version inversée de Psycho...Bien que cela soit sans doute involontaire puisque le fait qu'on s'attende au fils est dû seulement à une culture populaire née après)
Son mobile est simple et crédible : son fils Jason (la v.f. l'appelle Jacky...sans commentaire !) est mort noyé sous ses yeux alors que les moniteurs sensés le surveiller s'éclataient au pieu...
Du coup elle se transforme en vengeresse qui punit tous les ados qui osent consommer hors mariage. C'est l'idée qui deviendra le fil (plus ou moins) conducteur de la série : les Vendredi 13 ont toujours un tueur réactionnaire qui tue les personnes sortant du droit chemin...la vision du droit chemin incluant petit à petit tout le monde, comme toute idée réac poussée à son extrême (bon par contre faut pas chercher beaucoup plus loin, c'est quand même très con les Vendredi 13 hein).
D'un point de vue beaucoup moins recherché c'est du coup un excellent prétexte pour montrer des scènes de sexe torrides (comprendre des scènes gentiment érotiques) et permettre de déshabiller les acteurs et les actrices(enfin pour le moment surtout de les mettre en petite tenue ou bikini pour les filles et torse nu pour les garçons)...rien de choquant et pour une fois cela trouve une justification dans le scénar !

Outre le côté tueur réac et les scènes de nudité, il y a encore 2/3 éléments introduits dans ce film qui deviendront des éléments récurrents.
Le premier -qui justifie le massacre quasi systématique de tous les personnages- c'est le fait que le tueur s'occupe discrètement de ses victimes. C'est tout simple mais ça fonctionne, les réactions périlleuses des protagonistes passent du coup comme une lettre à la poste vu qu'ils ne sont pas au courant du sort de leurs petits camarades.
On trouve aussi une scène de rêve qui deviendra un gimmick fréquent...rendant le crossover avec Freddy Krueger somme toute assez logique ! Le procédé est d'ailleurs la seule pointe de fantastique présente dans ce premier film...pointe de fantastique qui restera pendant un long moment inexploité comme on le verra ensuite.
A ce sujet là j'aurais d'ailleurs dû parler avant du responsable des excellents SFX : Tom Savini (Dawn of the dead !), qui a eu l'idée de cette séquence où l'on voit un Jason putréfié sortir de l'eau pour y entraîner Alice, l'unique survivante. Une des scènes les plus flippante de la saga.
Enfin on pourra noter le personnage d'Alice qui inaugure la liste des personnages féminins forts de Friday the 13th. Personnages fort du sexe dit faible qu'on retrouve aussi dans la figure maléfique de Mrs Voorhees...
Adinaieros
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Back to Crystal Lake - Vendredi 13

Créée

le 11 oct. 2010

Critique lue 1.9K fois

22 j'aime

5 commentaires

Adinaieros

Écrit par

Critique lue 1.9K fois

22
5

D'autres avis sur Vendredi 13

Vendredi 13
B_Jérémy
8

Kill her, Mommy

Je suis le messager de Dieu ! Vous êtes condamné si vous restez ici ! Cet endroit est maudit. Maudit!! Il a une malédiction de mort. Vous êtes condamné ! Vous êtes tous condamnés !! Que le carnage...

le 26 mai 2023

49 j'aime

44

Vendredi 13
Rano84
5

Ta mère elle est tellement sadique qu'elle te perce les boutons à la machette !

Désolé pour le spoiler mais Wes Craven l'a fait avant moi... Bordel, en ce moment Arte envoie du paté.... des Hitchcock, des Star Trek et ce soir vendredi 13. Après un premier massacre subit par...

le 10 juin 2013

31 j'aime

6

Vendredi 13
Adinaieros
6

Alice au pays des cauchemars....

CONTEXTE Les films d'horreurs existent de longue date (les films de la Hammer peuvent témoigner). Les films avec un meurtrier qui accumule les crimes à l'arme blanche (aux Etats Unis les slashers ou...

le 11 oct. 2010

22 j'aime

5

Du même critique

Rango
Adinaieros
8

Rango, Gore, Johnny et Hans.

Bon. C'est pas forcément évident d'écrire une critique sur un film dont on est sortis avec comme première impression de ne pas avoir réussi à tout saisir. Car, oui, Rango est un film complexe. C'est...

le 12 avr. 2011

50 j'aime

3

La Secrétaire
Adinaieros
10

Comédie Romantique (mais BDSM)

La Secrétaire sous son affiche provocatrice recèle un pur film de cinéma au cœur d'or. Car, oui, La Secrétaire est une comédie romantique avec toutes les étapes obligées. On a la relation amoureuse...

le 15 janv. 2011

42 j'aime

1

Memories
Adinaieros
5

....?

Bon. A priori je vais être le premier a poster une critique un peu négative et ça me fait pas forcément plaisir en plus. * Rose Magnetic : ça démonte. Voila. C'est beau, c'est intelligent, c'est...

le 25 févr. 2012

30 j'aime

6