La puissance du livre pouvait-elle traverser l'écran ?
Il est généralement évident que le cinéma n'arrive pas souvent a égaler l'œuvre littéraire d'où une certaine exigence des lecteurs.
Au début du film je grimaçais. Le rythme du montage, sorte de va et vient entre présent et passé très rapide n'aide pas du tout le spectateur à s'approprier l'histoire de cette femme.
Heureusement le montage s'étire et laisse l'histoire prendre sa place.
Mon avis est partagé, il y a d'excellente chose au niveau de la mise en scène qui se concentre sur la difficulté d' Eva à reprendre le dessus sur ce qui lui est arrivé. Tilda Swinton est parfaite pour ce rôle de mère désœuvrée. Mais pour la lectrice que je suis, l'essence du livre manque au film.
Le roman est clairement une critique de la société américaine et non un plaidoyer contre une hypothétique mauvaise mère. De plus la part sur les tueurs de masse et leur origine n'est pas vraiment appuyée.
On comprend assez vite que le film tourne autour d' Eva avec des scènes récurrentes où elle tente de nettoyer les éclats de peinture sur la façade de sa maison, et pour cela le livre est bien retranscrit.
Autre quintessence du bouquin, en lien direct avec le titre, c'est le genre épistolaire. En effet la mère communique par le biais de lettres envoyées à son mari. Pour cela je reconnais que la réalisatrice a pris le parti du silence plutôt que de la voix off, offrant à Tilda Swinton de montrer l'étendu de son talent pour faire ressentir le mal être du personnage.
J'ai aussi été frustrée, je pense que cela vaux aussi pour ceux qui n'ont pas lu le livre, par le choix de ne pas mettre en scène la tuerie de Kevin. Alors que le montage nous montrait sans arrêt des bouts de ce jour funeste, il semblait logique que la scène soit finalement montrée dans son ensemble à la fin du film. A noter que c'est une scène particulièrement bien décrite dans le livre (très visuelle) d'où une certaine déception. Mais là encore on va dans le sens d'une mise en scène tournée vers Eva.
De manière générale le film est beaucoup plus pudique que le livre pour les scènes violentes.
Les personnages gravitant autour d' Eva sont aussi bien représentés. Franklin (bien que physiquement différent), est un père en opposition à la mère qui n'évolue pas dans la même sphère que son fils et sa femme. Quand à Kevin, bien que le choix d'un acteur beau gosse ne soit pas judicieux, il réussit à créer un malaise.
Je préfère recommander le livre qui est beaucoup plus intense, quitte à voir ensuite l'adaptation personnelle de la réalisatrice Lynne Ramsay. Mais mon jugement sur ce film découle forcément de ma vision du livre.
LuluCiné
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le 30 sept. 2011

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