Du sang et de la sueur #Attention Spoil (un peu mais spoil quand même)
Le dernier film de Damien Chazelle nous conte l'histoire de la rencontre de Andrew, batteur, jeune étudiant au conservatoire de New York et de Terrence Fletcher, grand manitou du Studio Band, professeur admiré autant que redouté de tous les élèves pour son intransigeance légendaire. Faire partie de son orchestre est un gage de réussite dans le milieu de la musique professionnelle. C'est au rythme du double swing que se lance le film. Dans le jazz, cela signifie jouer les notes deux fois plus vite. Whiplash est d'ailleurs le titre d'un morceau de Jazz dont voici le lien : http://open.spotify.com/track/4xHu9iUOEjMzmR2h8qxCr2
Vite repéré par Fletcher, Andrew est recruté dans le Studio Band, d'abord comme batteur remplaçant puis rapidement comme titulaire. Dans le même temps on découvre que Fletcher a une manière particulière de coacher ses élèves. Les exhortant à dépasser leurs limites pour être les meilleurs. Il utilise pour cela un ton martial que ne lui envierait pas un sergent chef des marines. Hurlant, humiliant, frappant parfois, il pousse ses élèves dans leurs derniers retranchements. Andrew fait son maximum pour contenter le Maître, fait tous les sacrifices. Il prendra tous les risques possibles, même celui de sa vie, mais ce ne sera jamais assez. Psychologiquement dévasté par Fletcher, il finit par abandonner la musique.. vous verrez la suite dans le film.
Attention ce n’est pas un film sur le jazz, ni sur la musique, ni sur la batterie, qui ne sont que les vecteurs d'un sujet plus sombre et plus profond. C’est un film sur le dépassement de soi même, sur la compétition qui règne dans la pratique d'une activité à haut niveau (musique, sport...) où seuls ceux qui auront su s'élever au dessus des autres s'en sortiront. En voyant Fletcher (J.K Simmons, inénarrable patron de presse de Spiderman) hurler sur Andrew (Miles Teller) je n'ai pu m'empêcher de penser au sergent Hartman de Full Metal Jacket (Stanley Kubrick -1987) qui lui aussi hurlait sur ses recrues, peut être avait il en tête qu'ils mourraient tous si ils ne dépassaient pas leurs limites pour rester en vie dans l'enfer du Vietnam.
Le coté un peu dérangeant de Whiplash est qu'il légitime presque, dans sa scène finale, ces pratiques qui peuvent (on le voit dans le film) avoir des conséquences désastreuses.
Techniquement, Chazelle, délivre un film cru, tant au niveau de la lumière avec des couleurs et des dominantes sans artifices ni corrections, que des images, parfois chocs (les mains ensanglantées d'Andrew, l'accident de voiture..), appuyées par un montage, particulièrement dynamique, qui fait corps avec la musique. Les scènes en plan fixe sur Andrew, le visage crispé de douleur et dégoulinant de sueur, s'évertuant à aller sans cesse plus vite font paraitre son supplice interminables (j'ai eu 3 fois la chair de poule).
J'ai été embarqué par le film, son sujet, sa manière de le traiter ainsi que par la réalisation. Certains crient qu'il est outrancier mais je les soupçonne de mal connaitre le haut niveau car le sujet du dépassement de ses propres limites y est constant. D'autres crient à l'injustice faite au Jazz, pour ma part je pense la musique n'est finalement qu'un univers dans lequel le film se déroule. L'histoire aurait pu avoir lieu dans un autre environnement (sportif par exemple) qu'elle aurait encore tenu debout.
Chapeau Damien Chazelle !
Allez voir ce film, il vaut le coup !
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