Avant ce film, dans ma petite tête inculte, J.K. Simmons (dont je viens d'apprendre le nom) était surtout Mac McGuff, le super-papa de Juno. Comme je suis allée voir Whiplash en suivant aveuglément (c'est-à-dire sans voir de bande annonce, donc sans savoir autre chose que "c'est un mec qui fait de la batterie") les conseils d'une amie me disant "va le voir il est génial", la surprise était presque totale (chic!).
Terence Fletcher (J.K. Simmons, mais dans un changement de registre radical: vous m'suivez?), qui dirige l'orchestre que rêve d'intégrer Andrew (le "mec qui fait de la batterie") apparaît à la fois comme un dieu consacré et un odieux connard tyrannique aux insultes délicieusement fleuries et aux colères dévastatrices (mon héros, quoi). On passe de l'adoration complète pour son culot à l'envie de le calmer à coup de fléchettes tranquillisantes plantées sur son crâne chauve toutes les dix minutes: bref, c'est un peu LE personnage fort au début du film.
Je n'oublie pas Andrew, bien sûr: déjà parce qu'il est quand même le personnage principal, et que -punaise!- il n'y va pas de main morte pour tenter de devenir le meilleur batteur de jazz de l'univers: il crève ses futs, casse ses baguettes, fait saigner ses mains comme un John Bonham pouvait le faire, sue sang et eau à atteindre des tempos que je ne pensais pas humainement atteignables, tout en se faisant régulièrement houspiller-humilier-pousser à bout par son intraitable chef d'orchestre. Le fin mot de l'histoire, sans trop en dire : il faut des cinglés dans le genre de Fletcher pour permettre à des cinglés talentueux et ambitieux dans le genre d'Andrew de repousser toutes leurs limites malgré les gamelles monumentales (les camions dans la tronche et les coups bas orchestrés -haha- par des orgueils froissés, en l'occurrence) qu'ils se prendront à coup sûr avant d'atteindre le sommet.
Et puis le solo de la fin, quoi. A la fin du générique, je n'ai pas pu me lever tout de suite tellement mes jambes étaient encore crispées de partout - il faut dire qu'avec Lyusan (ou Ed la hyène, comme vous voudrez), on a frôlé la crise cardiaque pendant les quinze dernières minutes du film, durant lesquelles on sue, on tremble, on s'épuise avec le héros tout en le voyant prendre, à coups de pied et de baguettes, la plus belle revanche du monde sur le maître qu'il dépasse.
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