Willy 1er est un film particulier, original, qui se démarque de la production cinématographique, et notamment de celle dont on a tendance à le rapprocher (Bruno Dumont par exemple), en ce qu’il prend le parti de raconter une histoire qui paraîtrait, de prime abord, plus que banale, mais dont les péripéties se révèlent titanesques à l’échelle de son héros, Willy.


Pronfondément singulier, inspiré par le comédien qui l’incarne, Daniel Vannet, Willy n’a toujours pas quitté la ferme familiale quand son frère jumeau, Michel, qui avait jusqu’ici suffi à son bonheur, se suicide. Profondément ébranlé par le drame, noyant son chagrin dans l’alcool, ce cinquantenaire un peu bourru choisit de se reprendre en main quand ses parents décident de le placer dans une institution, soi-disant pour son bien. À l’aide de sa tutrice, Catherine, incarnée par Noémie Lvovsky, Willy remue ciel et terre pour parvenir aux humbles objectifs qu’il s’est fixé (dans un réplique qui fera longtemps date) : avoir un appartement, avoir un scooter, avoir des amis, et tout ça à Caudebec, une petite bourgade qui, quand il en parle, semble être une grande ville, un sommet d’ambition, alors qu’elle se trouve à peine à 10 km de chez lui.


Et c’est très certainement tout cela qui fait la puissance de Willy 1er : la force d’humanité qui se dégage du personnage et de l’acteur, quasi indissociables, dans une lutte intense contre les forces du déterminisme qui jusqu’ici l’avaient écrasé. Si l’objectif est humble, le chemin n’en est pas moins long ; il donne notamment lieu à de nombreux décalages qui nourrissent l’humour de Willy 1er. À ce sujet, le ton est remarquable, et c’est par ailleurs un point sur lequel l’intelligence du film s’illustre : les réalisateurs n’ont pas choisi le manichéisme (Willy peut parfois être cruel, notamment avec un autre Willy, marginal pour Caudebec), tout comme ils n’ont pas choisi la condescendance (certains plans très esthétisants viennent lui donner toute sa noblesse, une espèce d’aura royale), tout comme ils n'ont pas choisi la hauteur ou le mépris de classe de la plupart des films ou des émissions qui aiment nous dépeindre avec montre de misérabilisme (caché parfois sous un autre nom, le « naturalisme ») le Nord. C’est véritablement l’amour qui semble être le moteur du film : l’amour pour un comédien, l’amour de la marginalité, de l’originalité, de la différence. Et rien que pour cela il faut souhaiter longue vie à Willy 1er, longue vie à Daniel Vannet, et longue carrière à ces quatre prodiges.

Rah-Yann
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le 18 oct. 2016

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