La force de ce coréen est bien ailleurs, dans la rêverie et la contemplation.

Pour ceux qui ne connaissaient pas encore Hong Sang-soo, peut-être l’ont-ils découvert récemment sur les écrans avec son très bon In Another Country porté par Isabelle Huppert. Pour continuer d’explorer l’univers fascinant de ce réalisateur coréen, Blaq Out édite un très beau coffret double Dvd (sorti le 2 avril 2013) comprenant Woman on the Beach (et Night and Day). Woman on the Beach nous invite à contempler les tréfonds de l’âme humaine dans un décor balnéaire empreint de la marque de fabrique de ce grand nom du cinéma asiatique.

Dans Woman on the Beach, Hong Sang-soo traite de la relation homme-femme, de la jalousie, des rivalités avec comme questions : est-ce grave de se tromper ? N’est-on pas constamment prisonnier d’un même schéma amoureux ? Il filme la naissance d’un amour et sa fin, en passant par toutes les étapes du processus : la trahison, la réconciliation, l’acceptation et la rupture. Mais, bien au-delà des questions habituelles, Woman on the Beach montre un court instant de vie (une journée et une nuit) d’un homme essayant d’échapper à des images obsessionnelles, posant alors la question de savoir si l’on peut s’en affranchir et comment. On voit alors cet homme, Mr Kim, scénariste, exposant à sa jeune conquête, Moon-sook, sa théorie du triangle, selon laquelle l’homme se focalise sur des images restreintes et négatives qui le hantent et expliquant le moyen de s’en dégager en élargissant son champ de vision, un processus laborieux car non ancré dans les habitudes. Et oui, n’attendez pas du cinéma de Hong Sang-soo un puits d’actions comme savent si bien le faire ses condisciples asiatiques. Le force de ce coréen est bien ailleurs, dans la rêverie et la contemplation.

Pour qui ne connaît pas Hong Sang-soo, chacun de ses films peut être un apprentissage de son univers tant ils se ressemblent dans leur traitement. Woman on the Beach semble très abouti (2h07) et comprend tous les éléments qui sont chers au maître. La répétition de scènes en séquences identiques et les plans zoomés sont l’une des composantes originales de ce cinéma : Mr Kim rencontrera deux femmes qui se ressemblent et la plage devient le lieu de rencontres récurrentes. Ajoutons à cela, le goût pour les scènes de repas arrosé et les chassés-croisés amoureux, mais aussi la présence de la création artistique, avec une mise en abyme du travail de réalisateur (déjà présente dans In Another Country) avec le personnage de Joong-rae, scénariste en panne d’inspiration. La scène où ce dernier décrit son travail n’est pas loin de la situation cocasse. Hong Sang-soo, qui privilégie la spontanéité de ses acteurs, filme alors un personnage qui semble inventer son scénario au fur et à mesure qu’il parle, laissant ses interlocuteurs dubitatifs. Enfin, signe distinctif ultime de l’univers de Hong Sang-soo : la mer, l’immensité de la plage et l’ancrage de ses histoires sur un site touristique (souvent balnéaire) permettant aux personnages en quête de liberté et d’inspiration de s’affranchir et de se retrouver. La côte et ses horizons infinis servent alors de décor aux tourments intérieurs de l’âme, et subliment la rêverie et la contemplation où le réalisateur excelle.

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Auteur : Diane
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le 31 mai 2013

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