Marvel Girl porterait bien son nom si les X-Men ne continuaient pas leur itinéraire apocryphe, mais elle se rattrape en ne le portant pas et en étant devenue l’allégorie de sa franchise, qui atteint aujourd’hui son septième film d’équipe avec ce projet « Supernova » et son douzième en comptant les épisodes dédiés à Wolverine ou Deadpool. Surexploitée pour avoir déjà été Phoenix dans The last stand et avoir vu son histoire du Hellfire Club refondue dans First class, elle est pourtant le dernier joker de la nouvelle équipe comme elle avait été celui de l’ancienne, à moins d’être le moyen de terminer en beauté grâce à la dimension cosmique de sa biographie fictionnelle. Mais entre-temps, Captain Marvel a confirmé qu’à trop grands pouvoirs, on risque un trop petit scénario, puisqu’il ne peut y avoir ni enjeu ni méchant suffisamment solides pour fragiliser l’invincibilité. Donc, le producteur-réalisateur a choisi deux directions plus ou moins nouvelles, et pas forcément parallèles : revenir narrativement à la « Dark Phoenix Saga » en donnant des gages aux fans comme l’île de Genosha, et s’inspirer esthétiquement du réalisme de Logan en sollicitant notamment Daniel Orlandi pour les costumes des X-Men…


Dès la séquence liminaire de l’accident, on se demande pourquoi le producteur-réalisateur n’a pas été réalisateur plus tôt, et tous les combats confirmeront cette impression, mais on se demande aussi très vite pourquoi tant de « X » dans le décorum, et toujours cette plastique lisse et bleue comme la facilité. Cela dit, le vrai problème est d’avoir tout centré ou tout misé sur une Superwoman mal jouée au point que certains face-à-face sont gênants, qui se perd dans des tribulations à peine dignes d’un adolescent, et qui est opposée à une Lilandra trop réécrite pour que ça soit signifiant. Dazzler est casée au détour d’une fête, Mystique tuée au détour d’une crise, mais pas avant d’avoir dit à l’un de ses amoureux qu’elle et lui étaient tout ce qu’il restait de First class alors qu’il en reste surtout des traces, jusque dans la musique et assez pour regretter ces développements sans fond, qui plus est maquillés d’un fard de CGI si encombrant. Car une fois de plus, il s’agit de différence et de famille, voire d’intégration mais pas dans le MCU, d’où cette Genosha en forme de bidonville pour bobos et ce Paris pour épilogue, avec DS, café des « vieux copains » et « rue de la paix », à rebours de l’ancrage historique des débuts et au détriment de Fassbender et McAvoy, qui sourient pourtant mais sûrement de tout ça.


Pour public averti (mais qui n’aura pas cette fois à investir plus de deux heures sur la chose) : Dark Phoenix (2019) de Simon Kinberg (précédemment producteur pour Bryan Singer mais passé à la réalisation à la demande des acteurs, à moins qu’il n’ait compris qu’on pouvait être crédité pour un Bohemian rhapsody sans en avoir réalisé la moitié), avec Sophie Turner (qui joue là sa carte de membre du club des actrices au regard vide, au point qu’il a fallu mettre des effets spéciaux dedans pour le rendre plus enflammé) et Jessica Chastain (qui joue là sa carte de membre du club des fans de Tilda Swinton, en prouvant elle aussi qu’on peut passer de l’art et essai au film de super-héros sans se compromettre tout à fait)


Avis publié pour la première fois sur AstéroFulgure

Adelme
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le 5 juin 2019

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