A Serious Man, ou le nihilisme éclairé, un livre de Job athée
Avant tout, je souhaite dire une chose. Les frères Coen, ça s'écrit "les frères Coen". Pas Cohen. Pas Coën. Pas Coenh. Pas Coehn. Pas Kcquauheinne. Coen.
Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen, Coen. Coen. En plus, c'est marqué partout de la même manière, donc je ne comprends pas pourquoi 50 % des gens qui écrivent des critiques de leurs films les publient en y orthographiant Coen "Cohen". C'est Coen ! Relisez-vous, faites quelque chose. Coen. Je ne comprends pas, c'est bizarre, il doit y avoir un blocage psychologique collectif sur ce nom. Quand ils écrivent C-O-E-N, la touche "H" les démange.
- J'ai trop envie de mettre un "H" en plein milieu de ce mot. Ça me manque visuellement. Ça me met mal à l'aise.
Ne jamais garder des T.O.C. trop longtemps comme ça. C'est mauvais. Après, on se conditionne trop, et plus tard on remet l'effort, plus la thérapie cognitivo-comportementaliste guette.
Bref, sur ces bons mots, je vous laisse.
Ah bah non j'ai oublié de faire la critique donc, A Serious Man, film des frères COEN. Passons sur la maîtrise technique, le regard humoristique désespéré et un peu condescendant propre aux frangins, le sens du rythme inédit, c'est tro bo, tout est abouti, parlons un peu du fond. Qu'est-ce que ça signifie ? Qu'est-ce que c'est que cette fin ? Eh bien je vais vous le dire David Pujadas. D'abord, ça se passe en 1967 dans une famille juive dont le cadet est sûrement né vers les mêmes années que Joel et Ethan, et est le deuxième "héros" du film. Œuvre personnel, donc.
Ça parle de la femme, du couple, ça parle de la jeunesse, mais je pense que c'est surtout un film très amer sur la religion, qui met deux heures à démontrer son échec. La religion, c'est une communauté donc (dans le film, on a l'impression qu'ils habitent dans une ville uniquement peuplée de juifs, mais c'est juste parce que les protagonistes ne gravitent qu'autour de leur communauté - Larry sous-entend ne pas trop aimer les goys), dans laquelle on est censé s'entraider, s'échanger des réponses aux maux de la vie, à la Sy Ableman, qui est en fait un gros con, vu qu'il tire dans les pattes de Larry en le descendant professionnellement à travers les lettres anonymes.
Et dans les situations les plus compliquées comme celle de Larry, assailli de tuiles de tous ordres, on va demander conseil aux plus grands esprits, les rabbins. Le premier est une jeune tête à claque fétichiste des parkings et trop théorique dans son approche du problème, le deuxième, sa solution c'est de tout laisser pisser, et le troisième, l'honorable Marshak, a l'air d'avoir compris depuis belle lurette qu'il n'avait pas plus de réponse à donner que n'importe quel autre type lambda, et se contente (d'après ce que j'ai compris) d'écouter Jefferson Airplane quand il a un coup de mou.
Les rabbins sont des types comme les autres, des humains, avec un peu de culture en plus. Mais ce qu'ils savent du Talmud ne leur donnera jamais de réponse à l'énigme de l'univers. Qui est la suivante, selon les frères Coen : Dieu (Hashem en l'occurrence) n'existe pas. C'est une béquille devant le néant. La religion, c'est du vent. Seuls comptent la logique, la physique, les mathématiques, le Mentaculus, et le reste est essentiellement du hasard. Tu te prends une tornade dans la face ? Mauvais moment, mauvais endroit. Il t'arrive des emmerdes en rafale, et le point final, c'est que t'as le cancer ? Pas de bol.
Mais comme les frères Coen aiment bien brouiller les pistes, A Serious Man débute par une sorte de court-métrage qui se passe un siècle avant l'action du film en Europe de l'est, et qui affirme l'existence des dibbouk, donc du Diable, donc de Dieu. C'est la séquence la plus étrange du film, et celle pour laquelle, je pense, il n'y a pas de vraie interprétation. Mais pour la suite, c'est vraiment clair, mon interprétation, c'est qu'il n'y en a pas.