A Week Away
4.7
A Week Away

Film de Roman White (2021)

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A week away, teen movie chrétien qui ne s'en cache pas, mais qui se cache des choses à lui-même...

Etant désœuvré après une coupure d'internet de plus d'un mois sur mon PC, je me suis laissé tenter par A week away. Un peu comme aller à un Mc Do après un naufrage sur une île déserte. Non pas fan mais consommateur occasionnel de teen movies depuis pas mal d'années, 100 Girls, American Pie..., j'étais curieux de voir comment se porte le genre à travers cet échantillon. D'abord je remarque l'unité de lieu (le colonie) et de temps (une semaine) : pas d'échappatoire, on restera avec les ados du début à la fin, sans réelle capacité de trouver une respiration ailleurs. Un peu comme dans ces stages dit de "thérapie de conversion" chrétiens qui, aux Etats-Unis et malheureusement ailleurs, visent à remettre dans le droit chemin de la sexualité hétérosexuelle les brebis égarées. Mais je m'égare, nous reviendrons à la sexualité (ou son absence) chrétienne.

Il y a bien un prologue avec poursuite du protagoniste par un policier mais ça s'arrête là. Il y a a aussi l'escapade hors du camp, avant le climax de fin, lorsque le garçon reprend ses oripeaux de héros solitaire, hoodie, blouson et étui à guitare comme au début, son destin se construit de nouveau sur une cassure et un mouvement, une fuite. Sachant que ses parents sont morts dans un accident de voiture, une certaine ironie pointe, car son double féminin, Avery, qui a aussi connu le deuil avec la mort de sa mère quand elle avait 6 ans vient à sa recherche avec la voiture de son père (oui, la liberté de mouvement, l'indépendance sans la présence du père s'exprime ainsi, comme dans beaucoup de films américains.

Quelques idées que je voudrais partager avec vous :

On parle beaucoup de la série "Mercredi" à l'heure actuelle, je ne l'ai pas vue. De ce que je retiens de ce personnage de la famille Addams en lien avec ce film, c'est cette jeune demoiselle intelligente et cynique, fascinée par la mort, qui est envoyée dans un camp de vacances du bonheur et qui nous gratifie de sa critique acerbe des valeurs américaines façon Dysney, de leur côté coloré, du respect benêt de chacun, et où les bons sentiments sont servis comme la substance indéterminée de la cantine que le héros Will, dans A Week Away, regarde avec dégoût et suspicion alors que son camarade, biberonné dès sa plus tendre enfance à ce type de nourriture (spirituelle, pensons au Christ) s'en délecte sans discernement.

Les traits inhérents à ce type de film : la voix survoltée de l'animateur qui vient rythmer chaque début de journée, façon Good morning Vietnam ou façon série ado comme Parker Lewis ne perd jamais. On nous en fait grâce le matin où le jeune héros a fait mentir son horloge biologique d'adolescent pour composer une chanson et regarder le lever de soleil, ce qui ne manque pas d'attirer à lui la belle Avery. Avery, plutôt pétillante et pas trop niaise, mais qui est tout de même tombée dans le panneau de la midinette. Si elle avait réellement écouté, elle aurait entendu que Will avoue dans son début de chanson qu'il ment. Et oui, paradoxe : ce film derrière la forme et son ambiance de comédie musicale divertissante, c'est avant tout un fond, un message chrétien, pour ne pas dire de la propagande. Un extrait de chanson m'a particulièrement frappé quand le film annonce bonhommement sur le tableau "war games" (holy war ?) et que l'équipe rouge entonne que "God loves us more" et "Our god is an awesome god" ou quelque chose du même acabit, je me suis demandé ce qu'ils faisaient exactement des dieux des autres religions. La plupart des chansons comportent des références à dieu, je n'ai pas trouvé le script sur le net mais d'ici quelque temps, quand il sera disponible, je ne manquerai pas de le lire en détail.

Autre point : l'absence de sexualité ou de sexualisation des corps. C'est tout de même étrange que dans le genre de la comédie romantique dans lequel ce film pioche allègrement, la caméra ne soit pas amoureuse des corps et ne fasse pas de place à l'expression du désir. C'est bien sûr pour que cette comédie reste bien chrétienne et puisse être diffusée à tous les publics, y compris à ceux des camps de vacances chrétiens. Il n'y a que du badinage innocent et l'acolyte du héros on ne peut plus chrétien, George, fils coincé à sa maman, finit tout simplement par faire une allusion au mariage à la fille de ses rêves, en tout bien tout honneur, alors que rien de charnel n'a été vécu. Comme si la sexualité ne pouvait s'exprimer que dans le cadre du mariage.

Si, et là vous allez peut-être me trouver espiègle dans ma lecture psychanalytique d'un teen movie : il y a un petit bisou timide vers la fin mais surtout, le seul moment où il y a un réel rapprochement des corps, c'est lors d'une partie de paintball avec combinaison intégrale. Will et Avery sont temporairement alliés, unis, mais dos à dos, donc pas moyen de symboliquement procréer. Petite anecdote, c'est Avery qui tire à bout portant sur Will après qu'ils ont vaincu leurs adversaires. On pourra y voir un renversement des codes de genre, on vit une époque moderne, les filles ont le contrôle, c'est la jeune fille qui projette le liquide sur l'homme (safe sex tout de même encore une fois, le liquide n'a pas pénétré).

Presley aide George à se relever, toujours gantée. J'y vois 2 possibilités : 1. les réalisateurs se disent inconsciemment que finalement le préservatif, c'est pas si mal car il permet un minimum d'union des corps. 2. les combinaisons noires en cuir et latex font écho au folklore SM, lieu d'expression caché d'une sexualité par trop réprimée par les conventions.

Sur le plan stylistique, dans les chansons la répétition du mot "god" devient assez vite lourdingue, on a compris dieu est partout avec nous, ils est omniscient comme il est omniprésent dans les paroles. Dans la scène où chacun livre sa petite part de vérité personnelle (je ne sais pas si c'est une pratique courante dans ce type de camps, d'oser livrer ainsi ses pensées devant une assemblée), Avery commence par un beau chiasme "I don't know much but this much I do" qui a la force de la répétition, du rythme et qui renforce les accents de sincérité du locuteur. Elle enchaine par "Our god is an awesome god". Après elle explique pourquoi dieu est "génial" : le terme, adjectif mélioratif, me fait tiquer à 2 titres. D'abord car ce mot sonne un peu ado, ensuite car qui en doutait chez nos amis croyants ? Les besoins de dévotion et de se relier à quelque chose qui nous dépasse sont universels et peut-être le contexte de la collectivité religieuse est celui dans lequel cela se fait le plus aisément, mais j'avoue que cette façon de faire, façon déballage en public, me laisse un sentiment de malaise.

Voilà, je suis loin d'avoir tout couvert (sortez couverts ou restez chastes, pas de sexe prénuptial !) juste pour finir, Will, encore un héros qui a de la volonté (oui tout le monde parle bien anglais de nos jours, will power), petite référence à Will Hunting ? a pleinement suivi son parcours initiatique, sa quête d'identité à travers la rédemption (il ne vole plus, il n'est plus un "quitter", il chante des chants religieux) : il a retrouvé une famille, maillon local de la grande famille religieuse prête à accueillir de nouvelles ouailles si elles se conforment à ses rites et à ses valeurs, pas si la personne trouve elle-même et qu'elle vit sa propre liberté.

PS: Même le réalisateur s'appelle Roman (romain), et White, avec tout ce qui est associé à cette couleur en occident !

DugastDominique
5
Écrit par

Créée

le 19 déc. 2022

Critique lue 81 fois

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