Jetés aux oubliettes depuis 1983, Solo & Kuryakin sont de retour!
Musique, humour et action: tout est là!
N'en déplaise aux amateurs de divertissements sur-travaillés, souvent
en cela infidèles à l'esprit de la série qu'ils adaptent, les Men from U.N.C.L.E sont bien là!
L'annonce d'un projet mettant en scène Hammer et Cavill pouvait néanmoins refroidir.
Pour mémoire: l'un a raté son Lone Ranger, précipitant Johnny Deep avec lui dans le gouffre, l'autre a tout bonnement détruit Superman.
Rien de rassurant donc à voir arriver deux loosers de la pire espèce dans ce reboot d'U.N.C.L.E.
Et pourtant, c'est une véritable réussite: le duo fonctionne bien, les antagonismes et rapprochements aussi.
Hammer joue un Kuryakin un rien caricatural mais extrêmement jouissif de violence contenue, non retenue et de rage "russian way".
Cavill, s'il s'éloigne un peu du style américain de Solo, le campe avec classe. Son seul défaut est de faire un appel de pied évident (ne serait-ce que mèche sur le front oblige) aux créateurs de James Bond. Il apparaît plus que jamais crédible pour remplacer Daniel Craig dans le rôle, idée que je réprouvais: merci Henry pour ce chemin de Damas.
Hugh Grant est très crédible dans le rôle de Waverly, mieux que l'original même.
La musique originale de la série est mise à l'honneur, elle aussi, et ressort grandie de sa modernisation.
L'affrontement final est excellent dans son visuel, comme un bouquet final succédant à ceux d'états second de Solo et Kuryakin, eux-mêmes assez impressionnants.
Mais ce reboot accuse certains défauts qui, s'ils peuvent être vus comme des qualités, restent néanmoins des défauts à qui est un fan de la série.
Tout d'abord, et c'est avec ce vice de fabrication que débute le film: la patte Tarantino, absente de la série originale. Le babélisme extraordinaire d'Inglorious Basterds est repris ici au service d'un réalisme peu nécessaire avec la même typographie dans le sous-titrage.
Ensuite, l'histoire de Napoleon Solo est contée au spectateur par le patron de Kuryakin suivant une technique qui pastiche l'histoire d'Hugo Stiglitz dans le même film de Tarantino.
Transfuge de ce dernier film, Sylvester Groth joue de nouveau un allemand nazi du nom d'Oncle Rudi - qui donne son nom au code des deux agents - et qui se comporte en bon personnage tarantinesque.
Muni de son livre de photo souvenirs de tortures, il se livre à toute une explication sur cette passion qui est la sienne, où il est passé maître, faisant le lien avec son enfance. Il y a du Landa de Tarantino et du Maguire de Mendès.
Et puis, il y a le Ritchie's touch.
Pas forcément désagréable mais problématique vis à vis de l'esprit de la série.
Mise à prix et Snatch ont déjà prouvé que Ritchie est une sorte de Tarantino anglais.
Mais ici, c'est surtout Sherlock Holmes qu'on reconnait. Que l'on reconnait, hélas, partout!
Le duo Solo / Kuryakin ressemble à s'y méprendre au binôme Holmes / Watson: le sérieux aux examens de conscience trop approfondi / le bon vivant aux méthodes originales. Reste que le duo Hammer / Cavill a son style et son énergie propre pour masquer cette ressemblance.
Le duo aura affaire à une séduisante jeune femme qui, tantôt les manipule, tantôt les aide: une délicieuse Alicia Vikander (Ex Machina) qui parfois rappelle Irène Adler. Si Kuryakin est le plus proche d'elle, c'est pour laisser la place à Elisabeth Debicki (Gatsby le magnifique) pour Solo.
Méchante du volet, elle se paye le luxe d'une scène d'empoisonnement du héros au somnifère similaire à celle d'Irène dans Sherlock Holmes.
Les deux personnages féminins introduisent souvent une logique de flas back sur les événements amenant à une relecture de la situation des personnages et ses enjeux, une fois encore comme dans le diptyque Sherlock Holmes.
Sherlock Holmes, Sherlock Holmes toujours, avec le retour de Jared Harris, qui y campait déjà la nemesis du héros de Conan Doyle, le Pr Moriarty, et qui revient pour jouer le patron de Solo.
Comme pour tester les spectateurs attentifs, les deux héros se retrouvent avec lui dans un restaurant. Lorsqu'il part pour les laisser faire connaissance, l'ensemble des clients - qui sont en réalité ses agents - partent avec lui. C'était déjà ce qui se produisait lorsqu'il faisait un signe sonore pour vider un restaurant où Irène Adler (Rachel McAdams) le rencontrait, sûre d'être en lieu neutre. Clin d'oeil plaisant ou clin d'oeil de trop?
En conclusion, un excellent reboot de la série que l'on espère fertile en suites mais qui se laisse parfois trop parasiter par ses liens avec le diptyque Sherlock Holmes de son réalisateur ou Inglorious Basterds de Quentin Tarantino.