Cléo et Gloria entretiennent une relation fusionnelle: plus qu'une nounou, quasiment comme une mère, Gloria a élevé la petite fille depuis ses premiers pas. A la mort de sa mère, Gloria décide de retourner au Cap Vert, auprès de sa famille et notamment ses deux enfants. La séparation étant insoutenable pour Cléo, on organise sa venue au Cap-Vert pendant les vacances.

Filmé dans la complicité intime de deux êtres à la fois vulnérables et dotés d'une incroyable force de vie, Ama Gloria met à l'honneur cette relation extraordinaire entre cette petite fille et sa nounou. Une relation savamment construite, pleine de délicatesse, de complicité, de respect et d'amour. Les personnages sont d'ailleurs d'une grande maturité - ce qui frise parfois l'irréalisme pour Cléo.

La grande majorité du film se passe au Cap Vert, où Cléo, bien qu'elle évolue plutôt à son aise, apparaît comme une intruse - déjà rien que par ses boucles châtain, ses grosses lunettes ou son teint rose - dans l'équilibre déjà fragile de la famille de Gloria. Cette généreuse part laissée aux vacances sur l'île est une manière de soulever la question de la compatibilité entre les deux mondes, les deux milieux. L'île permet aussi de nous plonger au sens propre du terme dans l'abysse de l'océan ou sur les hauteurs rocheuses de la côte cap-verdienne, un milieu qui peut être hostile aux nouveaux venus. Ces deux êtres que tout aurait pu séparer se trouvent liés par une force sublime et intense, que transmettent les gros plans sur leurs visages.

Au-delà de cette histoire d'amour et d'amitié entre Gloria et Cléo, le film traite aussi du rapport de force intrinsèque à cette relation. Une histoire qui s'est irrémédiablement faite au détriment des enfants biologiques de Gloria, desquels elle a du s'éloigner pour travailler à Paris. De plus, cette relation reste par nature commerciale, comme Gloria reçoit de l'argent pour veiller sur Cléo, somme glissée dans une enveloppe dorée (mais peut-elle se permettre quel que soit d'autre?).

La dynamique du film est tout à fait prenante, avec la naissance du petit-fils de Gloria, l'enterrement de sa mère, la construction d'un hôtel dans lequel elle a investi, autant de rituels et pratiques avec lesquels Cléo doit composer, bon gré mal gré.

Pour lier ces deux pans du film - drame et joie -, le film a recours à un procédé esthétique singulier: certaines scènes sont montrées sous forme graphique, dans un style épuré, pastel. Pour soulager le drame, ou encore faire appel à des souvenirs du passé.

Une parenthèse dans le déroulé des évènements, un peu à l'image de ces vacances au Cap-Vert, intenses mais qui vont finir.

Nuwanda_dps
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le 28 sept. 2023

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Emilie Rosier

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