On a scale from One to Ken, I rate this film Ken/Ken

J'ai pu lire ça et là sur Internet qu'on avait droit avec Barbie à un autre film pseudo-féministe hollywoodien qui nous fait la morale sur la dangerosité de l'homme et du patriarcat. « Le film le plus woke de tous les temps » j'ai pu aussi lire chez certaines personnes. Le plus drôle était sûrement « Le jeu à boire Barbie qui pourrait vous tuer : un shot à chaque fois que vous entendez le mot patriarcat ». Et franchement je dois avouer que j'ai eu peur avant d'aller voir Barbie. Peur d'avoir justement cette leçon de morale racontée avec la lourdeur d'un éléphant souffrant d'obésité morbide que quelques très très rares films hypocrites promeuvent sans se soucier de la dangerosité de leur message (Birds of Prey, Black Christmas, The Craft en sont d'excellents exemples). Mais cette minuscule poignée de films est tellement mis en avant par une minorité au mégaphone trop fort (ou au doigt lourd sur Twit... pardon, X) qu'on a l'impression qu'on est noyé dans les abysses de ce genre de film depuis des années. Bien évidemment, cette vision est erronée et tout aussi dangereuse que les films qu'ils veulent dénoncer.


Je ne m'attarderais pas trop sur l'aspect technique du film. En dehors de l'inventivité de Greta Garwig dans sa mise en scène, ou du travail toujours remarquable de la chef décoratrice Sarah Greenwood, je me dois quand même de dire quelques mots rapides sur nos deux stars.
Margot Robbie est absolument pétillante en Barbie, elle l'incarne avec une telle candeur qu'elle illumine chacune de ses scènes. Si l'on avait encore des doutes, Barbie est bien là pour confirmer que nous avons là l'une des plus grandes stars du cinéma du moment, et le succès au box-office la consacre reine d'Hollywood. Mais que dire de Ryan Gosling ? Est-ce qu'il s'agit de la meilleure performance du film ? Absolument oui ! On l'oublie mais il possède un immense potentiel comique et vole assez souvent la vedette à tous ses partenaires. On peut aussi noter le trop souvent oublié Michael Cera, comme toujours au top même avec des personnages sensés être oubliables.
Maintenant je me dois de parler du fond du film afin de balayer tout doute qui puisse subsister sur le contenu soi-disant woke comme certains l'ont dit.


Bien sur que Barbie dénonce le patriarcat dans notre monde et le manque flagrant d'égalité homme/femme. Effectivement que le film est parfois écrit avec un minuscule stylo et des gants de boxe. Mais est-ce que vous vous êtes sérieusement arrêté juste sur ça ?
Je mentirais si je disais que je ne me suis pas senti frustré à certains moments, où le film énonce explicitement le mal(e) absolu qu'est le patriarcat. C'est vrai, ma part d'homme fragile s'est réveillée à quelques moments et a couiné, je l'admets. Mais c'est en voyant le forcing absolu de la caricature que ça a fait tilt. Parce que cette caricature des hommes qui considèrent les « gonzesses » comme des objets et des êtres inférieurs est écrite à la manière d'un sale gosse à l'écriture, celui qui force le trait pour s'amuser du cliché en lui chiant à la gueule.
Greta Gerwig (accompagnée par Noah Baumbach) n'a jamais été connu pour être très fine dans son écriture, elle est même parfois décriée par certaines féministes pour ne faire que du « service minimum » en ce qui concerne le mouvement. Mais il faut reconnaître que, malgré la lourdeur du propos du film, Barbie nous offre un parallèle intéressant doublé d'un magnifique message.


Si notre monde réel est gangrené par le patriarcat et le manque de reconnaissance que les femmes ont, qu'en est-il de Barbieland ? Car ce monde alternatif est un matriarcat, avec une Barbie présidente, uniquement des Barbie à la Cour Suprême et à pratiquement tous les jobs existants. Les Ken (et Alan) n'ont pas de fonction définies, ils sont Plage comme le dit Ken. Pas maître-nageur ou surveillant de plage. Juste Plage. Ils ne sont rien. Ils n'ont aucune reconnaissance de la part des Barbie, et ça le frustre terriblement. Un peu comme les femmes dans le monde réel. Et donc quand bien même le film s'appelle Barbie, le personnage le mieux écrit et avec le meilleur développement est bien Ken.
Dans la section commentaire de Youtube, j'ai pu lire :



Ken existe parce que Barbie a besoin d'un petit ami, comme elle a besoin d'un sac à main ou de chaussures. C'est un accessoire. Les filles ne s'intéressent pas à Ken parce que c'est un garçon, et les garçons ne s'intéressent pas à Ken parce que les garçons ne jouent pas à la poupée.



C'est exactement de cette manière qu'il se décrit à la fin, il n'existe que pour elle et ne possède pas d'identité propre. Les Ken, de par leur fonction dans Barbieland, ne sont que des accessoires. Et c'est ce manque de considération et de reconnaissance qui le mène à idolâtrer le patriarcat et à l'imposer au sein de Barbieland, car il peut enfin compenser ce manque d'amour en s'imposant et en dominant l'autre sexe et la société matriarcale qui l'a continuellement rejeté. Un autre commentaire soulignait ce fait :



Le personnage de Ken avait le sens le plus profond du film. Selon moi, "Ken", comme beaucoup de jeunes hommes à notre époque, souffre d'un manque affectif et cherche à être aimé sans jamais y parvenir. Il se donne beaucoup de mal pour réaliser de grandes choses afin de compenser ce manque affectif. Mais rien ne fonctionne à la fin, car les choses matérielles ne peuvent pas compenser. Une fois qu'il l'a compris, son cœur se brise et il finit par accepter que Barbie ne veuille pas être sa petite amie. Il renaît alors sous le nom de "The Ken" et peut enfin penser par lui-même et ce qu'il veut être. Il ne se laisse pas influencer par ce que les autres veulent qu'il soit. Un personnage magnifique en effet !



Et le film de se conclure sur un constat simple : peu importe quel est le sexe dominant, il cherchera toujours à asservir l'autre, à le castrer émotionnellement, économiquement et socialement, que ce soit dans un patriarcat ou dans un matriarcat. La chanson I'm Just Ken de Ryan Gosling ou le discours (un poil lourd dans son propos mais tout de même poignant) d'America Ferrera en sont chacun un parfait exemple de frustration masculine et féminine dans chacune de ces sociétés décrites. Et comme solution de proposer d'inclure davantage de personnes du sexe opposé dans la hiérarchie sociale de leur monde afin d'atteindre un jour une égalité parfaite, sans discrimination de genre, même s'il s'agit d'un procédé extrêmement long qui peut prendre des décennies au minimum. Un magnifique message d'espoir autant envers les hommes que les femmes dont n'auraient pas renié les pionnières du féminisme, alors à la recherche d'un idéal d'égalité, clairement utopiste pour leur époque.


Si je me suis autant concentré sur le message du film, c'est qu'il était à mes yeux clair de rétablir la vérité sur Barbie. Je ne suis pas woke ou anti-woke, d'extrême droite ou d'extrême gauche. Je suis juste un Ken qui veut aimer un film porteur d'un beau message sur l'égalité homme/femme et qui décrit la frustration homme/femme au sein d'une société autant castratrice envers les deux, même si c'est écrit avec lourdeur et sans finesse.



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Les commentaires originaux que j'ai cité plus haut, au cas où ma traduction soit imprécise, avec le lien de la vidéo extrait de I'm Just Ken sur laquelle je les ai trouvé, car j'ai tellement aimé cette scène et cette chanson que je ne peux m'empêcher de l'écouter en boucle :


1- « Ken exists because Barbie needs a boyfriend, in the same way that she needs a handbag or shoes. He's an accessory. Girls don't care about Ken because he's a guy, and boys don't care about Ken because boys don't play with dolls. »


2- « The Ken character had the deepest meaning of all. The way I saw it that "Ken", like many young men in this day and age are so emotionally deprived and looking for love but never getting any back. Going to great lengths to achieve big things to compensate for this deprivation of emotions. But nothing works out in the end because materialistic matters can not compensate for it. Once he finally understands it, it breaks his heart and finally gets over the fact that barbie doesnt want to be his gf. Then he is reborn as "The Ken" and he can finally think for himself and what he wants himself to be. Not to be influenced what others want him to be like. Magnificent character indeed! »

19fox64
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le 30 juil. 2023

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