Better Days
7.4
Better Days

Film de Derek Tsang (2019)

Si Derek Tsang excelle de toute évidence dans l’art d’explorer les relations humaines et les histoires d’amour aux virages inattendus, cette fois-ci, il nous amène vers une rencontre improbable entre deux êtres écorchés par leur propre vécu. Le tout planté dans un blackground dénonciateur et terriblement lourd. Tellement dénonciateur que, pour que le film puisse aboutir dans les salles de cinéma, le réalisateur a dû négocier avec une censure pas du tout conciliante. Les compromis ont exigé des changements, des suppressions de scènes et même l’insertion d’un message du style « d’accord, c’est comme ça, mais nous sommes en train de tout faire pour changer la situation ».
C’est curieux parce que, ayant vécu la censure des films au temps de Franco et ayant devenue pour cette raison fan du montage, j’ai vraiment eu cette impression de ciseaux. Si le film est déjà magnifique, qu’est-ce que cela a dû être sans cette guillotine culturelle et politique ?
Le tragique sujet de l’intimidation dans les écoles qui se noie, dans ces mêmes institutions scolaires, dans une volonté d’ignorer sa gravité. De passer outre et de faire comme si, histoire de ne pas ternir la réputation de l’établissement. Il faut dire que le réalisateur hongkongais y va fort, comme un animal sauvage qui se retournerait pour affronter la situation. La réalité directe et sans filtre.
Le fameux Gaokao, des examens nationaux qui permettront l’entrée à l’université et qui déterminera l’avenir des élèves. Ce sujet n’est pas seulement pointé du doigt, le doigt en question s’enfonce dans une plaie ouverte et stressante qui provoque des très nombreux suicides chaque année.
Et puis, au milieu de tout ça, comme une oasis enfoncée au centre d’une jungle tranchante et incisive, une histoire tendre et touchante entre une jeune fille qui se voit harcelée cruellement par trois de ses camarades de classe et un jeune voyou sans lendemain qui s’engage à l’accompagner dans ses allers-retours au lycée. Cette subtile touche de sensualité (pas de sexe entre mineurs, ça on le sait déjà) presque contemplative embarque, adoucit le fil conducteur et nous donne du répit aux scènes d’une extrême brutalité.
Une fin imposée qui nous laisse entrevoir que le ministère de l'Éducation prend des mesures contre l'intimidation. Ah ! Toujours et encore cette histoire de ne pas perdre la face mais bon, on pardonne et c’était franchement à prévoir.
Pour finir à mon tour, je ne resterai pas sans faire référence à l’énorme et surprenante découverte de Jackson Yee, jeune chanteur de 18 ans qui par sa performance consolide son statut d’étoile montante en tant qu’acteur. Et puis, Zhou Dongyu, bien sûr, qui arrive toujours aussi adroitement à donner une atmosphère, une couleur, presque une direction à l’ambiance d’un film. Je suis vraiment en admiration pas leur jeu d’acteur.
Pour tous les cinéphiles qui apprécient les films de tout horizon et d’ailleurs, pour n’importe qui, il serait dommage de rater Better Days, de passer à côté de cette expression, je dirais méthodique, des sujets qui ont encore du mal à être pris par le sérieux qu’on leur doit. Le cinéma chinois nous montre encore une fois sa capacité de faire de très bon films outre que les films d’action malgré les limites imposées.

Cooleur_Asia
10
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le 2 nov. 2020

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