Pour oublier une mauvaise journée, il y a généralement deux solutions. 1) Entrer dans un bar et se réveiller amnésique et douloureux le lendemain avec un tatouage de lémurien sur la fesse. 2) Se rouler en boule devant un film en mangeant des cochonneries. Dans les deux cas, ce n'est pas bien pour l'apparence de la dite fesse mais vous pouvez au moins espérer passer une bonne soirée. Encore faut-il bien choisir ce qu'on boit ou ce qu'on regarde: quelque chose de vaguement intéressant ou divertissant. Tout sauf Capitaine America donc.

Comme beaucoup des autres productions Marvel, Capitaine America repose sur deux ficelles: les blagues faciles et les effets spéciaux. S'attendre à autre chose serait comme aller au MacDonald en s'attendant à une séance de dégustation chez Kaspia: on risque d'être déçu, forcément. Côté effet spéciaux, il n'y a rien à redire. Des portes-avions volants, un super-frisbee, des interfaces de h4ck3rs... Bref, un Marvel. On passe donc à côté des trous du scénario, de l'ineptie des situations et on espère en prendre suffisamment plein les yeux pour passer un bon moment. Mais là, même avec une suspension d'incrédulité en hyper-diamant, ça va être très difficile.

Tout d'abord, le scénario (jamais bien élaboré) réussi avec brio à encore moins innover que celui de ses prédecesseurs. L'histoire: Capitaine America essaye d'arrêter un complot au sein du Shield. Prenez le premier Mission Impossible et un certain James Bond avec Pierce Brosnan, montez tout ça n'importe comment et vous aurez toutes les scènes du film mais avec des meilleurs acteurs. Et ça sera probablement tout aussi cohérent. J'ai rarement vu une telle série de clichés aussi mal agencés et mal amenés. Ne vous méprenez pas, je n'ai rien contre les clichés ou les scénarios peu élaborés, ça marche parfois très bien. Mais ça demande un peu de subtilité parce que sinon ça rend le film aussi long qu'un Paris-Cergy à l'heure de pointe. Je vous donnerais bien des exemples mais comme tous les rebondissements du scénario reposent sur ces clichés, je voudrais éviter de spoiler un film qui le fait très bien tout seul dans ses 20 premières minutes.

Le problème de Capitaine America, c'est qu'un thriller sauce théorie du complot demanderait que pour une fois les personnages se comportent intelligemment. Mais non, on continue à avoir la même recette, je tape tout le monde jusqu'à ce que je gagne.En fait, tous les Marvels, c'est Hulk mais avec un costume différent. Que dire? Détruire sa propre base secrète pour donner une chance au héros de se cacher dans les décombres? Check. Placer le centre névralgique de sa forteresse volante dans une capsule en verre à l'extérieur de la coque? Ah oui, brillant. Attendre trois plombes pour se libérer (le temps que tout le monde se fasse tuer) alors qu'on pouvait le faire depuis le début? Je vous recommande pour une médaille. L'abysse est atteint quand Rogers regarde d'un air constipé un distributeur à sucreries avant d'y cacher une clé USB avec des données secrètes super importantes. Heu...et c'est l'espoir du monde libre? Peut être que Georges Bush Jr est devenu scénariste en plus de peindre.

Autant Capitaine America est très bien dans son rôle de premier de la classe biclassé boy scout dans les Avengers, autant comme vedette unique d'un film de 2 heures, c'est un peu long. Il y a pourtant de la matière: un personnage qui a hiberné depuis la seconde guerre mondiale, c'est parfait pour faire du blockbuster simili-contestataire à la Batman. Mais pour ça, il faudrait des dialogues à défaut d'un scénario. Mais même là, il ne devait pas y avoir de budget. Au moins Hulk a une excuse pour ne pas parler. Là, le seul passage où Capitaine America s'interroge un tant soi peu sur sa vie et ses motivations dure 2 ou 3 min sur l'ensemble du film. Quant à l'agent Romanov et sa culpabilité étalée longuement dans les Avengers, le film y consacre royalement 30 secondes. Nick Furry était plat dans Avengers, il est extra-plat dans Capitaine America (mais il ne donne pas l'heure).

On touche ici à la limite de la recette Marvel. L'humour et l'action qui marchaient dans Iron Man, en grande partie grâce à Robert Downey Jr, ne sont pas applicables partout. Cela allait encore dans Avengers car chaque personnage ne se voit pas assez consacré de temps pour révéler son manque de profondeurs. Mais quand on essaye de faire du Tony Stark avec un Capitaine America, c'est du potentiel gâché. Au contraire de DC qui n'a qu'un super-héros intéressant (haters gonna hate), Marvel en regorge pour peu de mettre un peu plus d'argent dans le scénario. Il y aurait pourtant de quoi écrire une fresque épique et critique de notre époque: le complexe militaro-industriel d'Iron Man, la ségrégation des X-Men, la propagande de Capitaine America, la religion avec Thor, etc... Malheureusement l'intelligence et la prise de risque, ça n'est pas mesuré dans le ROI (NB: Retour sur Investissement).

Dans une scène particulièrement navrante, Robert Redford explique avec le même enthousiasme de caniche mort que dans All is Lost (aka Robert Redford dans un bateau) qu'il est "très très en colère". Hé bien, je suis très très déçu. Mais au moins les cochonneries étaient bonnes.
OrsonneOuellsse
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le 13 avr. 2014

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OrsonneOuellsse

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