Le tout débute à La Havane à la fin des 40's dans les clubs où la vie nocturne bat son plein. On y rencontre Chico, le pianiste et Rita, la belle diva. D'emblée, tout dans ce film d'animation est magnifié par la danse, les cuivres, et surtout, les robes colorées qui volent au vent. En somme, l'insoutenable insouciance de la séduction.

D'ailleurs, les scènes les plus émouvantes sont précisément les scènes de baisers. Elles sont autant de démultiplications, qui superposées les unes aux autres, finissent par former une seule étreinte, moins tumultueuse que passionnelle.

Cette relation amoureuse, unissant Chico et Rita, a la beauté de l'éphémère. Les incompréhensions et la jalousie amèneront très vite Rita à quitter Cuba pour New York. Il y a ce beau moment où elle embarque sur le bateau : son ami lui explique que lui, décidément non, il ne l'aurait jamais laisser partir ; puis cette réplique d'une simplicité désarmante : "dommage que ce ne soit pas de toi dont je sois tombée amoureuse".

Suivent les clubs new-yorkais, le déracinement, Charlie Parker... Puis Chico qui se réinvente à Paris, crée du neuf, de l'inédit... Mais toujours, l'île en toile de fond, comme une litanie qui ne dit son nom, presque suffocante.

Film de construction, non de destruction. Film d'évocation, non de dénonciation.
"Chico & Rita" garde cette irrésistible légèreté de ton, propre à certaines formes poétiques. On se situe ici dans le haut du panier, assurément.

Les questions politiques les plus brûlantes sont elles mêmes abordées avec pudeur et nuances, en particulier la politique raciale qui avait cours aux EU, et le passage de l'art cubain sous les fourches caudines de la Révolution.

Certes, "Chico & Rita" n'a pas la puissance des chefs d'oeuvre "Persepolis" et "Valse avec Bachir", mais il déploie pourtant une chaleur proprement renversante, sidérante de justesse.
Derrière cette simplicité savoureuse, le film donne également du grain à moudre, cette histoire laisse tout de même penser que la meilleure voie pour être obnubilé par son passé réside dans le fait même de vouloir le fuir à tout prix.

Au surplus, la scène finale est belle à couper le souffle.
Il y a là toute l'ivresse de l'ambivalence.
murakamien
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le 27 sept. 2011

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murakamien

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