S'inspirant clairement de l'efficace campagne marketing du Blair Witch Project et de son incroyable bouche à oreille qui avait transformé un petit film fauché en étonnant succès critique et public, J.J. Abrams avait créé la surprise en 2008 avec le mystérieux projet Cloverfield. Utilisant intelligemment les nouvelles ressources à sa disposition (internet en premier lieu), il aura réussi le tour de force de maîtriser de bout en bout la diffusion de sa nouvelle production, créant une attente savamment orchestrée à base de teasers et d'informations brumeuses, et fracassant finalement le box-office à hauteur de 170 millions de dollars pour un budget de 28, relançant du même coup la mode du found footage.


Un parti-pris esthétique apportant une immersion presque inédite, collant aux basques de ses protagonistes et jouant parfaitement avec les valeurs d'échelles. Mais si ses proches cousins [Rec] et Diary of the Dead parviendront la même année à inclure ce procédé dans une démarche narrative et thématique cohérente, Cloverfield peine malheureusement à le justifier dans son scénario.


Si l'approche formelle renforce le sentiment d'urgence et de tension, miroir à peine voilé de la paranoïa post 9/11, ainsi que l'aspect tragique d'une histoire d'amour mort-née au centre du film, le fait de confier la caméra à un protagoniste tête à claque (T.J. Miller, bien plus convaincant dans l'excellente série Silicon Valley) agace au plus haut point, d'autant que la photographie soignée et la qualité de la captation finissent par dénaturer la volonté des créateurs de reconstituer un certain amateurisme.


Pour le reste, Cloverfield navigue dans des eaux extrêmement balisées, hommage sincère mais un brin fainéant au kaiju-eiga et aux écrits de Lovecraft. Le film fait certes le choix payant de ne montrer sa créature qu'avec parcimonie et de faire court (si l'on excepte une exposition longuette), davantage de surprises lui aurait sûrement permis de se hisser bien au-dessus de la simple curiosité.


Joli coup de poker, Cloverfield aura au final bien plus marqué les esprits par l'ingéniosité de sa stratégie virale que pour ce qu'il est réellement, un gentil petit monster-movie pas trop mal torché par Matt Reeves mais loin d'être inoubliable.

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le 31 oct. 2016

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Gand-Alf

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