Finlandaise ayant étudié l'archéologie à Moscou, Laura part pour un long voyage en train, avec pour but de rejoindre Mourmansk, pour y voir les célèbres pétroglyphes de la ville. Seule, car sa mécène et amante Irina a finalement annulé son billet. Le voyage dans le compartiment numéro 6 s'annonce éprouvant, en raison de la compagnie de son voisin Russe Lioha, peu engageante.
Le long voyage en train de Moscou à Mourmansk se prête au caractère d'initiation du film. Un lent parcours de meilleure connaissance de l'autre, de l'inconnu, et donc de soi-même. Cette dimension se cristallise dans le milieu historique et archéologique dans lequel évolue Laura. Une phrase est ainsi répétée deux fois dans le film, sur le fait que connaître le passé nous permet de mieux comprendre le présent et d'où l'on vient. Ainsi, l'expédition archéologique relève aussi de la quête personnelle. Parlant couramment le Russe, la connaissance de cette langue donne à Laura un accès à la culture et aux usages russes, bien que sa nationalité Finlandaise soit relevée plusieurs fois dans le film. Elle trouvera même au cours du voyage la protection de la cheffe de wagon, une femme de prime abord pourtant peu commode. Le seul autre étranger qu'elle rencontre, un Finlandais, sera moins un allié qu'un traître.
Le film exploite avec réussite le langage à la fois par le corps et les langues vivantes, donnant au récit une grande authenticité. Le traitement des images participe aussi de cet élan de fraîcheur, de naturel. Il en va tout particulièrement des plans filmés au caméscope par Laura de Moscou, remplis de Baboushkas mais aussi des souvenirs de la vie moscovite bourgeoise et bohème auprès d'Irina. Il y a aussi les plans sur les visages, les traits tirés par la fatigue et l'alcool, rougis par le froid. Les plans mettent à l'honneur les expressions et une attention au détail, comme lorsque Laura tire le portrait de son voisin assoupi.
La relations entre les voisins de compartiment est au cœur du film, formant un pont entre les cultures et entre les parcours de vie. Le face à face impromptu entre Laura, lesbienne, archéologue, artiste et Lioha, misogyne, travailleur dans une mine, béotien, est finement amené. Deux êtres que rien ne rapprocherait, et qui finissent par s'entendre tout de même grâce à une écoute, une curiosité et une bienveillance réciproques. La scène de la soirée passée chez une vieille Russe (qu'on imagine de la famille de Lioha) est représentative de l'échappée joyeuse, de la parenthèse magique du quotidien, permise grâce au pari de la confiance.
Si la dernière partie du film, qui se passe à Mourmansk, est moins renversante que le huis-clos du wagon, elle reste un résultat sincère de la traversée humaine parcourue par les voisins du compartiment numéro 6.