X-men stagiaire dans suite paresseuse et assez décevante

APRÈS SÉANCE


Début 2016, Deadpool dépoussiérait les films de super-héros en exploitant son personnage homonyme, brut, fun et méta au possible (même si avec du recul, le genre n’était plus aussi poussiéreux que ça grâce aux Gardiens de la galaxie et à Ant-man). Deux ans plus tard, une même recette peut-elle encore fonctionner ? Eh bien, visiblement non. Partagés entre un auto-plagiat dépourvu d’originalité et une réinvention risquée du premier opus, David Leitch et Ryan Reynolds nous servent finalement un entre-deux. Un objet bicéphale dont chaque versant annihile l’autre…


Wade Wilson (Ryan Reynolds) fait sa vie de mercenaire et enchaîne les contrats aux quatre coins du monde. Après un événement tragique, Deadpool se reconstruit au sein du manoir Xavier et se voit envoyer dans une mission des X-men : venir en aide à Russell « Rusty » Collins (Julian Dennison), un ado maltraité à l’orphelinat Essex. Et si Firefist ne vous dit rien, ce dernier va être très « populaire » dans le futur et Cable (Josh Brolin) l’a appris à ses dépens. Ce mutant cybernétique voyageur du temps cherche à éliminer Russell avant qu’il ne devienne Firefist et ne tue sa famille. Pour l’arrêter, Deadpool va devoir créer son équipe de super-héros : la X-Force.


Bon, sur le papier, ce synopsis semble un peu plus développé que celui de Deadpool où nous n’avions qu’une origin story et la traque d’Ajax. Mais après visionnage, qu’en est-il ?



SUR LE FOND : 5,5 étoiles



C’est assez décevant. S’il y avait eu autant de recherches, de travail et d’inventivité pour le film que pour sa campagne promotionnelle, Deadpool 2 aurait été bien plus intéressant. Il faut voir tout ce qui a été mis en œuvre pour la promo ! Ça a déjà commencé dès la scène post-générique de Deadpool avec l’annonce de Cable, il y a eu ensuite les posters, le twitter de Ryan Reynolds, le trailer, le coup de la chambre d’hôtel de Hugh Jackman, le clip avec Céline Dion, la réédition des plus grands films de la FOX avec Deadpool sur les jaquettes DVD et même un passage dans l’émission Burger Quizz ! Toutes ces opérations de comm’ pour un film finalement paresseux ne parvenant pas à transformer l’essai du premier opus.



You're so dark. Are you sure you're not from the DC universe ?



A mon sens, le défaut principal de Deadpool 2 est sa schizophrénie. Par rapport au premier volet, Ryan Reynolds et les autres scénaristes ont souhaité garder (voire accentuer) l’humour et le ton de Deadpool tout en développant une certaine dramaturgie (ce qui a visiblement conduit au départ de Tim Miller…). Et ce qu’on peut dire, c’est que ça ne fonctionne pas du tout : le délire du va-et-vient entre la vie et la mort, sa représentation aquatique, les enseignements philosophiques de Vanessa (Morena Baccarin), le deuil, la rédemption… Tous ces éléments ne collent pas au ton général du film, on n’arrive pas à y croire. Faut dire que parallèlement à ces scènes premier degré, Deadpool 2 sert pléthore de vannes méta ou pipi-caca. Alors, je n’ai rien contre les blagues en-dessous de la ceinture hein. Je ne suis pas en train de juger mais lorsque le personnage principal te rappelle 40 fois en deux heures qu’on se trouve dans un film qu’il moque lui-même, comment s’investir émotionnellement lors des passages dramatiques ? C’est impossible, la dramaturgie est déjà désamorcée.


Bon, les quelques scènes qui se prennent au sérieux ne fonctionnement pas, mais il y a de bonnes blagues au moins… Eh bien, là encore ça pêche. Les ficelles sont beaucoup trop grosses. Les vannes sont soit des grivoiseries qui marchent une fois sur trois, jusqu’au moment où elles sont surexploitées, soit des blagues méta consistant souvent à appuyer ce qui se passe à l’écran. Exemple : « Vous voyez le feu là, c’est du vrai feu hein ! », « Combat de CGI à suivre » ou « Les scénaristes, ces fainéants… ». Certaines références sont bien trouvées, tout n’est pas à jeter évidemment mais le fait de moquer la paresse du scénario n’excuse pas cette réelle paresse. Il y a bien trop de choses faciles :


Le coup de la pièce de plomb dont on connait l’utilité dès la première seconde, les colliers qui retirent les pouvoir bien pratiques scénaristiquement où le seul aller-retour possible avec la machine temporelle de Cable. Dès son arrivée, tu sais qu’il va utiliser son retour pour sauver Deadpool ou un autre et qu’il va renoncer à revoir sa famille. D’ailleurs, il y a tellement aucune raison pour préférer sauver un type qu’on connait depuis deux jours à peine au lieu de revoir sa famille pour laquelle on a fait tout ce voyage. Un cliché cinématographique toujours aussi incohérent.


Malgré un bon nombre de nouvelles têtes introduites dans Deadpool 2, la plupart de ces personnages est assez vide. Negasonic (Brianna Hildebrand) ne sert strictement à rien, Colossus qu’à servir la baston finale en CGI et Russell Collins est terriblement relou. Il n’a rien de crédible, c’est un personnage complétement creux donc on ne s’attache pas du tout à lui. Je ne parle même pas de la X-Force :


Deux scènes : recrutement et anéantissement.


Domino (Zazie Beetz) tire toutefois son épingle du jeu. Son pouvoir est très intéressant, même si cela aurait pu être mieux exploité, mieux développé et surtout mieux exposé. Le personnage de Cable souffre de la stratégie de la FOX souhaitant produire quatre films autour de lui. Conséquence : un sous-développement dans Deadpool 2 de manière à en laisser pour les suites… Dans les comics, Cable est le fils du fils du X-men Cyclope. Sa mutation est bridée par un techno-virus injecté par Apocalypse himself. C’est un voyageur temporel hyper badass réparant les erreurs du passé. Dans Deadpool 2, c’est un mi-homme mi-cyborg qui cherche à sauver et retrouver sa famille et qui échoue à moitié… Malgré tout, ils en ont pas fait un personnage manichéen et c’est plutôt pas mal.


Maintenant que Deadpool est hyper banquable (le premier opus étant 2ème au box-office mondial de tous les temps des R-rated), les caméos se multiplient et les X-men acceptent de se montrer pendant deux petites secondes. Doit-on y voir une certaine perte d’indépendance par rapport aux autres films de super-héros ? Une chose est sûre, l’irrévérence sincère de Deadpool semble aujourd’hui bien plus superficielle. Globalement, ce second opus n’est pas catastrophique mais un peu décevant.



SUR LA FORME : 6 étoiles



Bien que Deadpool 2 ne surclasse son ainé que d’une poignée de minutes (11 précisément), il a l’air terriblement plus longuet. Certaines scènes sont ostensiblement tirées en longueur, des blagues sont faites trois, quatre fois de suite pour tenter d’accentuer le côté comique. Sans grand effet généralement.


Les morts de la X-Force par exemple. On se tape les cinq d’affilé et c’est tellement long. Au bout du troisième, j’en avais déjà marre moi.


Bref, il y a de nombreux passages où ça stagne, où l’intrigue n’avance pas, où c’est clairement mou. Du coup, tout le troisième acte est gâché par ces longueurs. C’est long et sans grand intérêt.



With this collar on, my superpower is just unbridled cancer. Give me a bow and arrow and I'm basically Hawkeye.



En voyant les premiers retours sur Deadpool 2, encensant les scènes d’action, j’étais plutôt impatient. David Leitch à coréalisé John Wick avant de signer Atomic Blonde qui comporte à mon sens une des meilleures fight-scene de ces vingt dernières années. Eh bien, je m’attendais du coup à des scènes d’action bien plus impressionnantes dans Deadpool 2. Même si on est un peu au-dessus du premier opus, ce n’est pas ouf non plus. L’introduction du film avec les différents contrats de Deadpool est sympa, le reste est assez oubliable. Il y a même quelques scènes où les CGI sont dégueulasses comme la poursuite du camion et l’explosion de la station-service. Bref, c’est finalement bien loin de mes attentes.


Globalement, je trouve qu’il n’y a pas beaucoup d’originalité à l’image. Et elle est également absente au niveau de la musique. On reprend la musique du premier opus, on prend des musiques du MCU notamment des Gardiens de la galaxie, et on passe trois fois de la dubstep. Le reste de la musique est utilisé à des fins humoristiques mais c’est toujours la même recette : scène d’action en slowmotion et musique qui n’a rien à voir pour créer le décalage. C’est tellement paresseux… Et assez dommage.


Bonus acteur : NON


Malus acteur : NON



NOTE TOTALE : 6 étoiles



Paragraphe post-crédits :


Bon, globalement c’est drôle évidemment. Ryan Reynolds a toujours autant d’autodérision sur ses mauvais choix de carrière et ça fait plaisir. La scène incrustée dans X-men Origins : Wolverine est même très bien réalisée. Mais c’est quand même du réchauffé bordel. Les allusions à Green Lantern et à X-men Origins : Wolverine étaient déjà présentes dans Deadpool. Un jour, ça ne sera plus drôle du tout. Et Dieu merci, ils ont retiré la scène où il tue Hitler bébé ! Quoi que, ça aurait peut-être été ça la réelle subversion.

Créée

le 21 mai 2018

Critique lue 268 fois

Spockyface

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