"War is never a solution. It's an aggravation"!


Lord Charles Deeford: I do not discuss politics with women.



Benjamin Disraeli: I do.



1874, à la Chambre des communes, après un discours vibrant de son adversaire William Gladstone, le Premier ministre britannique Benjamin Disraeli ne parvient pas à obtenir un vote en sa faveur pour avoir les mains libres quant à une politique impérialiste. Mais quand celui-ci apprend que le sultan d'Égypte a de forts besoins d'argent et est prêt à vendre le Canal de Suez pour les combler, il saute tout de suite sur cette occasion d'imposer un peu plus son pays dans le monde tout en affrontant une Russie de plus en plus présente sur le continent asiatique… Mais le dirigeant doit faire face, pour parvenir à ses fins, à un directeur de la Banque d'Angleterre récalcitrant pour ce qui est de lui fournir la thune nécessaire ainsi qu'à des espions russes...


Ce biopic, bien évidemment sur la figure de l'ère victorienne qui donne son nom au titre du film, est sorti en 1929. Ce qui veut dire que le cinéma parlant en était à ses balbutiements. Ce qui veut dire que la mise en scène se contentait d'être statique et de filmer des dialogues. Il faut savoir aussi que ce film est adapté d'une pièce de théâtre. Ce qui veut dire que ce film n'est pas du tout l'exception à la règle en ce qui concerne la platitude de la mise en scène et, par extension, du scénario.


L'ensemble est donc très bavard et très théâtral. Pas une once de créativité technique, pas une once d'audace scénaristique. On filme des dialogues, et des acteurs qui jouent ces dialogues (même si certains d'entre eux sont excellents, plein d'esprit et d'humour, correspondant parfaitement au grand talent pour la répartie qu'avait Disraeli !).


D'un point de vue historique, l'ensemble se concentre surtout sur l'achat de Canal de Suez. Ce qui a pour conséquence que des faits historiques liés au chef du gouvernement anglais, comme la grande rivalité entre lui et Gladstone ou le couronnement de la reine Victoria comme impératrice des Indes, sont complètement mis au dixième plan (le premier n'étant évoqué qu'au début, le second qu'à la fin !). C'est dommage, car ils auraient pu apporter plus de matière au contexte et donner des personnages secondaires plus forts que ceux auxquels on a le droit.


Et la séquence dans laquelle Disraeli craint que la mort touche son épouse (celle-ci est jouée par la véritable moitié de l'acteur principal, Florence Arliss !) n'a aucune consistance. D'autant plus que rien n'avait été développé dans ce sens dans les scènes antérieures (parce qu'elles se focalisent quasi-exclusivement sur le Canal de Suez !) pour que l'on puisse partager le point de vue émotionnel du protagoniste (en outre, il est à noter que dans la réalité, sa femme était décédée deux ans avant la période durant laquelle se déroule le film ; en conséquence, on ne peut pas sortir l'argument du respect de la vérité historique !).


Ah oui, les espions russes dans ce film sont des grosses brelles. Écouter la conversation de deux personnes en se cachant derrière un arbrisseau à cinquante centimètres d'eux, c'est complètement con. Voler un document dans le bureau de quelqu'un alors que celui-ci y est toujours présent est la garantie débile d'être tout sauf discret et efficace.


Mais le film vaut le coup d'œil malgré tout. Déjà, on peut y voir le très joli minois tout frais d'une blonde Joan Bennett âgée de 19 ans. Et puis surtout, George Arliss (qui, pour ce rôle, a été le premier acteur de la Perfide Albion à recevoir un Oscar du Meilleur Acteur dans l'Histoire et aussi le premier à le remporter en jouant une personne ayant réellement existé !) donne une interprétation haute en couleur (en ayant la coiffure la plus bizarre au monde, avec cette espèce de S sur le front !) de l'homme politique (qu'il avait joué auparavant au théâtre et dans un film muet !) et s'impose d'une manière écrasante dès qu'il apparaît, laissant très peu la possibilité à ses partenaires (peu aidés, il est vrai, par des personnages sans relief !) de se faire remarquer.


Résultat, l'intérêt de cette œuvre (si on n'oublie pas de souligner aussi les quelques excellents dialogues !) est plus à rechercher dans le talent de son acteur principal que dans un quelconque intérêt technique ou scénaristique ou historique.

Plume231
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le 5 mars 2022

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