Pour son troisième long-métrage, Tim Sutton poursuit sa captation de la vie américaine par le prisme du genre dramatique. Loin du rythme effréné des grandes villes états-uniennes, l’action prend place dans ces petites localités transpirant la solitude et la précarité. C’est dans l'une de ces bourgades que nous rencontrons deux individus empruntant des voies illégales pour survivre.
L’un est un père de famille déterminé à quitter sa situation sociale. L’autre est un être méprisable mu par une soif de violence insatiable. Leur rencontre sera le début d’un périple funèbre.


La plupart des récits reposant sur des destins croisés retardent au maximum la rencontre entre les différents individus. Ici, l’auteur prend à contre-pied ce modus operandi en amorçant son récit sur la confrontation entre ces deux hommes.
La suite des événements prend alors une toute autre dimension. Nous connaissons ce qui les lie. Nous savons les motivations de chacun et le danger encouru s’ils sont amenés à se revoir. La tension est donc constante. Elle est une épée de Damoclès planant constamment au-dessus de leur tête.


La trajectoire de ces deux êtres est diamétralement opposée. Elle est à l’image de leur personnalité.
Jarhead Earl, incarné par Jamie Bell, effectue un périple où l’esprit de famille est prégnant sous différents aspects. L’ensemble de ses actions ne sont motivées que par la promesse d’une élévation sociale et la possibilité d’un avenir meilleur pour son entourage. Ainsi, bien que certains de ses actes soient répréhensibles, ils nous sont tolérés en connaissant leur finalité.
Chainsaw Angus, joué par Frank Grillo, représente une menace constante pour tous ceux qui l’entourent. Il se dégage une aura morbide lorsqu’il est présent dans un lieu. On sait peu de choses sur cet homme. Ce mystère ne fait que décupler la menace qu’il représente.


La construction parallèle de deux individus antinomiques influe énormément sur l’atmosphère qui se dégage de l’œuvre.
D’un côté, nous avons un drame où un homme est contraint de se mettre en danger pour le besoin de ses proches.
De l’autre, nous avons un thriller où nous suivons le parcours meurtrier d’un personnage antipathique.
Cette hybridation des genres est assurément l’un des atouts du film. La visite d'un même lieu par nos deux hommes donne un résultat constamment différent. Ce processus permet de conserver un lien entre ces protagonistes. On apprend aussi l’avancement de leur voyage respectif sans que cela soit explicité.
Cette construction scénaristique n’est pas exempte d’inconvénients. En fonction des affinités de chacun, nous pouvons être amenés à préférer une des deux trames. De même, le rythme est inconstant. Il varie en fonction de la trajectoire que nous observons. Celle de Chainsaw est cadencée par les cadavres qu’il sème tandis que celle de Jarhead est plus contemplative.


L’auteur arrive donc à mettre à profit cette dualité de traitement jusqu’à son final où la brutalité de l’un et la sensibilité de l’autre offre un dénouement tendu et incertain.
En somme, Donnybrook est une œuvre dotée d’une intrigue classique transcendé avec brio par de Tim Sutton.

tzamety
7
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le 25 mars 2020

Critique lue 753 fois

tzamety

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