Sans surprise

Quand on sait que Peter Berg est à l'origine de l'un des pires films de l'année 2012 (Battleship), on se dit que ce n'est pas gagné. Avec Du sang et des larmes, on sait déjà à quoi s'attendre : grosse dose de testostérone, dont le plus grand représentant de ces dix dernières années se prénomme Mark Walhberg. Et là, on tombe dans le mille : scène d'introduction avec des soldats surentraînés et prêts à en découdre avec les Barbus. Puis vient le très classique et très sobre "Tiré d'une histoire vraie", écrit blanc sur noir. Ouch ! Nous voilà bien embarqués. Et pour clore cette intro, vient enfin le tour de Wahlberg en personne et visiblement très mal-en-point, qui jacte un discours en voix off pour nous rappeler, par moult superlatifs, que l'Afghanistan n'est pas une partie de plaisir.

Le film n'a encore pas commencé et n'a encore rien dit que mes dents grincent déjà. Mais bon, soit, let's go.

Si le début est assez longuet et nous présente un peu le quotidien des soldats au sein de leur base, le film décolle enfin lorsque notre petite troupe de soldats se lance dans l'opération Red Wings au beau milieu des montagnes afghanes. Et là, on doit bien avouer que Peter Berg fait plutôt bien son boulot : les affrontements contre des ennemis quasi invisibles nous rappellent quelque peu "Jarhead" de Sam Mendes. Le suspense est bien posé, à coups d'embuscades à chaque détour de falaises ou à coups de lance-roquettes imprévisibles.

Mais le plus intéressant (attention, tout est relatif) reste la métamorphose physique de nos personnages, qui se font toujours plus amocher au fur et à mesure de la mission. Il faut bien montrer que si tu parviens à survivre, la guerre laisse des traces qui resteront indélébiles. Pour bien nous le faire comprendre, le réalisateur nous offre trois fois la même scène en l'espace de vingt minutes : nos soldats, pris au piège, sont contraints de se jeter à corps perdu dans des pentes très abruptes. Le seul son qui retentit alors est celui des corps qui déboulent sur des dizaines de mètres et qui se fracassent contre des arbres ou des rochers. Mais trois fois de suite nos soldats se relèvent (alors que toi, au premier essai, tu te serais brisé la nuque au bout de 20 mètres de dénivelés) parce que se sont les héros de tout une nation, et qu'ils ne peuvent donc pas mourir aussi bêtement.

Je vous passe les détails de la suite de l'opération, qui nous met K.O tous nos soldats sauf Walhberg, pour arriver directement au dénouement. Voilà donc notre survivant qui se fait accueillir dans un village afghan afin d'être aidé, et qui répète sans cesse à ses hôtes : "Pourquoi faites-vous ça pour moi ?", "Pourquoi faites-vous ça pour moi" ? Deux heures de film pour en arriver au constat final que tous les afghans ne sont pas des Talibans. Chouette programme.

Et attention, clou du spectacle mesdames et messieurs, Mark Walhberg embrasse le gosse afghan qui saute dans ses bras, remercie vingt fois le père, et c'est le clap de fin : le générique nous montre les photos des vrais soldats ayant participé à l'opération, sur fond d'une reprise très émouvante de "Heroes" signé Bowie. Ça dégouline de partout, c'est très patriotique et propagandiste : bref, c'est typiquement ricain.

Un 3 très généreux pour avoir fait le boulot dans les montagnes. Mais pas plus.