"El Perdido" est un western de Robert Aldrich tourné en 1961.
C'est un western dans lequel il y a mélange des genres pour aboutir à un film, ma foi, tout-à-fait intéressant.


C'est un western classique où on trouve tous les ingrédients habituels : le troupeau de bœufs qu'il faut déplacer, la poussière de la piste et du désert, les bagarres, les duels et même les indiens.


C'est un western romanesque où deux hommes tournent autour d'une belle femme et de sa fille. L'un tente en vain de ressusciter une histoire qui s'est rapidement achevée il y a seize ans et s'imagine la revivre auprès de sa fille. L'autre qui arrive à la fin de sa poursuite et qui cherche dorénavant à poser ses "valises".


Mais c'est surtout un western tragique où les héros sont prisonniers de leur passé et incapables d'y échapper. Bren O'Malley, un tueur en fuite, retourne se réfugier chez une femme qu'il a connue 16 ans auparavant et dont il n'a gardé que l'image d'un bal où la femme avait une belle robe jaune. Dana Stribling, un shérif à la poursuite de Bren, est marqué par son devoir de vengeance de l'homme que Bren a tué mais aussi de la femme de cette victime qui s'est pendue. Puis, Belle, la femme que Bren a aimé, jeune fille, est devenue une femme qui a désormais une expérience de femme, d'épouse d'un rancher et, qui a une grande fille. Elle aussi est marquée par son passé mais elle n'éprouve pas le besoin de le raviver mais souhaite plutôt en sortir. Le Destin le lui permettra-t-elle ?

Pour rester dans le registre "tragique", il y a les trois mexicains au service de Belle qui observent, commentent, supputent les actions des gringos Bren, Dana et Belle (et sa fille) ; Aux différents entractes, ils sont là et parfois chantent des chansons qui résonnent étrangement aux différentes scènes. C'est tout simplement le chœur des tragédies grecques…


Parlons des acteurs.
Bren O'Malley, le tueur en fuite, c'est Kirk Douglas. Un Kirk Douglas tourmenté par cette aventure d'il y a seize ans, peut-être la seule chose de bien qui lui soit arrivé ! Le look de l'acteur avec son costume noir avec un ceinturon en argent et un petit pistolet : en décalage avec les tenues des autres personnages du film qui ressemblent plus aux classiques vachers. Ce look va séduire la fille de Belle ; on peut même imaginer que ce même look avait pu séduire Belle quand elle avait l'âge de sa fille. Ceci accentue d'ailleurs son aspect tragique car il semble prisonnier de son image. Une scène magnifique où Kirk Douglas sent bien la situation lui échapper (si tant est qu'il l'ai eue en main), c'est la scène où il manque étrangler un chien qui lui fait face. Ou encore la scène où il se trouve face à la fameuse robe jaune que la fille chipe à sa mère (sans savoir) où il croit enfin retrouver le passé.


Belle, c'est Dorothy Malone, le personnage central de ce western et des hommes qui gravitent autour d'elle. Magnifique personnage qui est à la fois la raison et le devoir. Avant tout pragmatique, elle veut désormais vivre une vie laborieuse mais tranquille. La passion ou le sentiment, oui, à condition qu'elle s'accompagne de stabilité. Elle n'hésitera pas à prendre le flingue pour séparer O'Malley et Stribling en train de se passer une peignée.
La scène clé où elle aborde calmement avec O'Malley un problème relatif à sa fille est juste digne.


Le rôle de Dana Stribling est tenu par un Rock Hudson, monolithique, immense, rassurant, taiseux. C'est un vacher, avec un comportement de vacher. Au-delà de son devoir ou sa mission de vengeance, on sent l'homme honnête, placide. On sent bien la volonté du réalisateur de le placer en opposition totale avec l'instable Kirk Douglas.


La fille de Belle est jouée par Carol Linley dans un rôle de jeune fille qui découvre soudainement sa féminité et qu'elle peut plaire. La scène où elle apparait dans la nuit dans la fameuse robe jaune est sublime et fascinante.
Parmi les seconds rôles, Joseph Cotten joue le rôle du mari de Belle qui est un homme qu'on va dire usé par la vie et l'alcool sans oublier Jack Elam en cow-boy bien ignoble.


Et la réalisation de Robert Aldrich n'est pas en reste entre les magnifiques mises en scène de la conduite du troupeau dans différentes situations ou l'utilisation de vieilles ruines de type espagnol.


Au final "El Perdido" est un beau film intelligent et efficace.

JeanG55
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le 2 août 2021

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