El Sicario c’est le récit de la vie d’un tueur des cartels mexicains. Tout est fait dans une chambre d’hôtel : la chambre 164. Cette chambre a été utilisée auparavant pour un enlèvement. Cette chambre on ne sait pas bien ou elle est, on voit la porte et la chambre en elle-même. Et encore on n’a que très peu de point de vue sur la chambre. Le film est extrêmement sobre. C’est un quasi huis-clos : on voit juste 2 ou 3 plans de l’extérieur. De plus le Sicario est masqué.

Tout ça raconté comme ça, ça donne l’impression de ne pas être très cinématographique. Et puis écouter parler quelqu’un pendant 1h20 ça n’a pas l’air d’être passionnant. Et pourtant si. La grande idée de ce film c’est le carnet dans lequel écrit et dessine le Sicario. Notre regard ne peut s’attacher qu’à ça finalement et c’est ici que le Cinéma nait. Le cinéma c’est recréer un monde à partir de bribes. Ici c’est exactement le cas. Un dessin où il explique la torture m’a fait frémir comme jamais (oui il y a bien sûr sa voix à côté mais le dessin rend tout ça réel). Le carnet rend tout absolument concret, nous persuade que tout ça est vrai. Et puis le carnet formalise ce système, cette corruption généralisée du Mexique. Ce qu’il raconte est passionnant : je suis resté agrippé par le film pendant toute sa durée. L’homme qui raconte est un excellent raconteur.

Le ton sobre nous permet d’avoir la réalité du témoignage la plus complète mais elle permet aussi de jeter un regard particulier sur ce Sicario. Ce Sicario est un homme horrible qui a enlevé, torturé assassiné des gens. Il raconte ses actes en étant assez détaché comme s’il faisait un constat. Et nous jetons un regard amoral sur cet homme. On ne porte pas de jugement sur lui et on s’accroche presque au personnage, malgré nous.

Avec peu d’images, aucun sensationnalisme Gianfranco Rosi crée pourtant un film ample, passionnant et, paradoxalement, totalement sensationnel.
SansEchafaudage
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le 21 oct. 2012

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