Règle N°1 : L'univers de ton film tu respecteras. "Oui mais là non, pas envie".

Pour moi, Elysium est le blockbuster de trop. Bon, je sais, je dis ça mais j'irai en voir des tas d'autres. Peu importe, car pour le moment, je suis grave vénère, tellement en colère contre le système que je pourrais monter une organisation secrète qui s’appellerait "L'organisation secrète des gens vénères contre le système". À la lecture de cette introduction, vous avez peut-être une idée de l'état dans lequel m'a mis le film.

Allons droit au but : Elysium se démonte lui-même. Ce film met en place avec efficacité un univers (certes simpliste) dans les 20 premières minutes du film, pour ensuite détruire, presque méthodiquement, toute cohérence le concernant.

Le début d'Elysium m'a emballé. Une base somme toute classique : d'un côté, le royaume des riches, ayant décidé d'ignorer la misère du monde, et de l'autre, celui des pauvres et de leur survie difficile (thème récurrent depuis le fameux Métropolis de Fritz Lang). Soit. Tout cela est esthétiquement bien attrayant et pessimiste au possible. Ajoutez un peu de Jodie Foster et la sauce prend plutôt bien. Bref, on pouvait espérer un scénario complexe, à la hauteur du pétrin dans lequel s'est fourré l'humanité.

Que nenni ! Après nous avoir séduit avec cet univers, le réalisateur sacrifie totalement toute cohérence sur l'autel du sacro-saint conformisme Hollywoodien auquel peu de blockbusters échappent aujourd'hui. Par exemple, on nous montre très clairement comment toute "déviance" dans le système est réprimée par l'armada de robots et de systèmes de surveillance grâce auxquels la caste supérieure a assis son contrôle sur la Terre. Le genre de robots qui te pètent le bras parce que t'as dit "chocolatine" au lieu de "pain au chocolat".

Cela n'empêchera pas notre cher Matt Damon de se taper une petite cavalcade pendant un bon tiers du film, alors que toutes les autorités le recherchent (plus un mec barbu super pas content). "On l'a perdu", annonce le technicien du centre de contrôle. Attend, ça sert à quoi de passer une demi-heure à nous montrer qu'il ne peut y avoir le moindre écart de comportement tant cette société si durement contrôlée, si c'est pour nous servir cette soupe juste après ? "Ah ben oui, mais bon c'est que c'était plus pratique pour le scénario voyez-vous...". Dans Gattaca par exemple, ça ne rigolait pas, et un poil de cheveux de travers pouvait signifier la mort, ce qui créait une réelle tension dans le film. Ici, fuck everything.

Tout le film suivra le même schéma, contournant habilement toutes les difficultés (et donc les sources potentielles d'intérêt) pour se fondre dans la masse. Le scénariste ne semble pas respecter son univers. La crédibilité d'un monde fantastique ou futuriste ne repose-t-elle pas sur sa cohérence intrinsèque ? Le monde d'Elysium est comme un château de cartes qui s'effondre sous l'assaut des clichés et des "conventions scénaristiques en vigueur". Et niveau clichés, vous serez servi. Je sais, on a l'habitude, mais là c'est quand même très fort. Je ne vous parle même pas de la métaphore ultra profonde du suricate et de l'hippopotame.

Elysium aurait pu être tellement intéressant si le matériau de base avait été plus respecté ! Au lieu de ça, le cahier des charges Hollywoodien a encore fait un sacré massacre. District 9, du même réalisateur, n'était pas un chef d'oeuvre, mais j'ai tout de même l'impression que le tout était plus "sincère", plus cohérent.

Bon, et la forme ?

Alors là, il faut quand même parler de la shaky cam. Ce style de cadrage (souvent associé à des cuts épileptiques) a du apparaître au milieu des années 2000. Et personne ne s'est rendu compte depuis tout ce temps que les gens détestaient ça ? Personnellement, je ne connais aucun fan de cette pratique (qui ici atteint des sommets insoupçonnés !).

Certains me diront peut-être qu'il s'agit d'un parti pris esthétique, et c'est entièrement possible. La shaky cam peut être utilisée pour refléter la panique d'une foule, la détresse d'un personnage, donner un style documentaire, etc... Mais alors, pourquoi prendre ce parti esthétique de ce côté là et se plier bassement aux insipides canons hollywoodiens en ce qui concerne le scénario ? Mystère. En tout cas, vous aurez envie de vomir, et ça ce n'est pas un mystère quand on voit le gros délire que s'est tapé le caméraman sur certain plans.

Au final, Elysium attire son public avec un univers "apparemment" intéressant, pour finalement nous resservir l'éternelle formule que nous connaissons, sans aucune surprise. Sommes nous les victimes d'Elysium, ou Elysium est-il une bonne idée victime d'Hollywood ?

...

Eh bien, vous ne croyiez pas que j'allais répondre tout de même !

Ma scène préférée : Le suricate et l'hippopotame. Définitivement.
BastienCl
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le 14 août 2013

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BastienCl

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