Episode 50
2.6
Episode 50

Film de Joe Smalley (2011)

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Regrettable, ce film est profondément regrettable ... car force est de constater que les idées de base sont là, Episode 50 utilise le format found footage pour présenter le reportage d'une équipe de démystificateurs spécialisée dans les phénomènes paranormaux, proposant une web-série pour rationaliser scientifiquement des faits troublants, puis ils se voient confier la mission d'inspecter durant un week-end un hôpital psychiatrique au passé terriblement chargé et réputé comme étant l’endroit le plus hanté des États-Unis. Arrivé sur place ils se rendent compte qu’un autre groupe a été engagé pour mener une enquête, pour le coup de manière beaucoup plus spirituelle, les deux vont donc coexister et confronter leurs opinions ainsi que leurs preuves matérielles.


Je dirais que les vingt premières minutes sont satisfaisantes, l’aspect documentaire se tient plus ou moins, on constate tout de même que ça ne cherchera pas totalement le réalisme, de par les choix de cadres ainsi que l’interprétation des acteurs, mais l’intention est de retranscrire l’immersion en interne liée à l’investigation, le film pose d’ailleurs une sorte d’accroche textuelle comme quoi cet épisode exceptionnel a mal tournée et que l’on va assister petit à petit à un événement chaotique annoncé, donc c’est excitant. Cependant la suite inquiète assez rapidement, dans le sens où les événements paranormaux et autres apparitions vont intervenir à nos yeux et nos oreilles de manière typiquement gratuite et attendue, comme par exemple en entendant des voix en reverb facilement compréhensible ou en voyant au travers de couloirs des formes humaines en hologramme furtif, on tombe dans le cliché des représentations "cinéma" des fantômes et non dans celles d’entités insondables, le film ne laisse pas parler les silences. Et pourtant tout ce petit monde est équipé comme il faut pour enregistrer des choses et ensuite les interpréter, mais cette méthode n’est utilisée que très rarement, laissant le spectateur seul témoin de la hantise, ce qui nous éloigne inexorablement de la vision subjective de la caméra embarquée, les caméras fixes et de surveillance n’auraient pas dû être autant additionnées au montage du film, si ce n’est au moins dans une majeure partie, vierge de toute suspicion.


Le point de vue reste le gros problème de ce long métrage, car les angles et autres contrechamps changent tellement que nous sommes dans l’obligation de nous poser la question de savoir qui filme, il arrive qu’on voit le caméraman mais à de nombreux moments le cadre semble prendre une direction de mise en scène "classique", et là c’est gênant car on perd l’intentionnalité du reportage et cette idée de réalisme qui découle du genre found footage. Et ça empire au fur et à mesure car le contexte va basculer dans quelque chose de beaucoup trop scénarisé, effritant tout bon sens, principalement vis à vis du rôle des esprits/démons dans cette histoire, où les deux personnages féminins vont exposer les grandes lignes explicatives, la médium va directement interagir avec eux et la documentaliste va constamment nous aiguiller vers une mécanique de correspondances entre le passé des lieux et ce qui se déroule à l’instant T, en gros on perçoit sans mal les ficelles qui vont nous amener vers un dénouement remplit de conneries mystico-religieuses. Et à côté de ça le film n’hésite pas à nous coller sous le nez des poncifs démoniaques ridicules, une espèce d’infirmière au visage torturé ou une forme invisible se dénommant elle-même "Legion !", c’est du grand n’importe quoi, et le pire dans tout ça c’est que le film croit toujours qu’il entretien une certaine crédibilité, notamment avec les deux rationalistes qui tentent de communiquer à travers une radio, la scission théologique ne fonctionne pas tant le spectateur est de son côté totalement saucé, la tension n’existe plus.


La dernière demi-heure nous perd définitivement pour monter crescendo vers la débilité la plus profonde, les événements s’enchainent à une vitesse folle pour déchiffrer ce fameux épilogue scénaristique (dont on se fout royalement il faut dire, perso je n’avais pas signé pour ça), on assiste même à une mort frontale nappée de notes de piano, certifiant un montage télé-réalité des plus sordide et déplacé ou confirmant le fait que le réalisateur ne savait plus du tout ce qu’il faisait, au choix. Et le final s’entremêle entre la confrontation ultime des deux antagonistes masculins, usant toute la symbolique qui lui reste (ajoutez à cela quelques répliques surréalistes), et le sensationnalisme poussé à l’extrême du chemin de la porte des Enfers (où ils sont conduit dans un timing absolument parfait), le schéma vire à la caricature grossière, plus rien n’est assumé et le parti pris de départ s’en retrouve fatalement décrédibilisé, et ne parlons pas des points de vue caméra qui n’ont strictement plus aucun putain de sens, c’est terrible. En arriver là c’est comme jeter son propre film à la poubelle, comme si le réalisateur s’était rendu compte que son script n’amenait nulle part et qu’il ne fallait plus se priver pour balancer tout ce que le spectateur avait envie de voir, en espérant bien sûr qu’il soit fortement crédule, pour ne pas dire abruti.


Episode 50 est donc un cruel exemple de film found footage au potentiel intéressant se cassant la gueule de manière spectaculaire, et ça me rend triste car je le répète les intentions premières étaient bonnes, si seulement la mise en scène avait eu de la retenue et surtout un minimum de cohérence dans sa technique ainsi que son scénario tout cela aurait pu accoucher d’un projet assez remarquable. Or le constat démontre malheureusement qu’il est très mauvais, de plus l’angoisse est quasiment absente pour multiplier les effets déconcertants, cependant il faut souligner que les jumpscares sont peu nombreux, mais si il n’y a pas d’ambiance véritablement appuyée pour contrebalancer ce sentiment de peur tant recherché c’est inévitablement raté …


Je conseillerais tout de même ce film aux curieux (notamment ceux qui aiment le format de reportage style Chasseurs de fantômes) pour voir à quel point le cinéma d’horreur demeure impuissant face à ce genre de thème passionnant qui mériterait à l’avenir une exploitation enfin à la hauteur de ses ambitions.

JimBo_Lebowski
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le 13 juil. 2016

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JimBo Lebowski

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