On se baladait dans les rues de Lisbonne avec une amie monteuse et elle m'indiqua brusquement une petite boutique pour téléphones portables, ici me dit elle Paulo Branco travaille dans une petite piece à faire fonctionner le cinéma européen. Elle l'avait rencontré quelques semaines au paravant le temps d'un festival de documentaire et elle était encore aux anges lorsqu'elle évoquait les compliments du grand Paul à propos de son travail sur un documentaire s'interessant aux mals logés de Lisbonne, avec la crise de plus en plus nombreux. Elle savait qu'elle ne bosserait pas d'ici tot avec Branco, je sais qu'elle fera l'un de ses films et qu'il se souviendra d'elle. Et nous savions tout deux qu'imaginer Paulo Branco dans l'arrière boutique d'un commerce spécialisé dans le cellulaire, donnait une idée précise de ce qu'est devenu le cinéma indépendant européen. A l'heure ou l'on donne la palme d'or a une production Besson, (une autre idée du cinéma independant) Paulo Branco reste le plus célère producteur européen, le plus réputé, celui que tout cinéphile admire intérieurement même sans être admiratif de l'ensemble de ses productions (j'en suis). Paul Branco est un guerrier qui se bat pour le Cinéma à l'heure de la guerre économique. Seul contre tous. Qu'importe ses problèmes financiers, il fera en sorte que votre film que tout le monde refuse ait les honneurs du grand écran.

Eyes find eyes fait sans doute parti de ces petits films qui n'aurait aucune chance de s'en sortir sans un personnage comme Branco. Mais les réalisateurs ont su toucher le coeur de Paulo, et ce dernier a cru au potentiel des deux cinéastes. Il a su qu'ils défendaient le même cinéma, un cinéma héritier de Cassavetes et des premiers Godard. Du temps ou le cinéma signifiait liberté. On est en effet en pleine nostalgie du cinéma libéré des deux maitres. A travers l'histoire d'un trafiquant d'art, c'est l'amour de la vie et de la liberté que célèbre Eyes find eyes, une liberté artistique, une liberté sexuelle, s'affranchissant des frontières, se trimbalant entre Paris et New York sans trop se prendre la tête. C'est aussi une ode au corps, au modele, aux acteurs et à la texture, de la peau, de l'image.

Plein de bonne chose donc, mais pourtant on reste sur sa fin, sans doute par exces de symbolisme (la fin ratée) par le jeu approximatif des seconds rôles. Et sans doute aussi pour la pose trop arty des séquences new yorkaises, assez enervantes. Mais bon, mieux vaut Eyes find eyes que Thor ou je ne sais quelle Fille du puisatier. Avec deux francs six sous l'on peut évoquer le trafic des oeuvres d'art, l'intérêt des mafias pour l'art et le hasard liant une expert de seconde zone, le crime organisé et la police des douanes.

PS: Belle B.O. en tout cas, avec beaucoup de jazz, genre musicale qui ne me parle pourtant pas du tout.
m_gael
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le 25 mai 2011

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